News Day FR

L’incidence des cancers toujours en hausse en France

L’INCa un a publié l’édition 2024 de son panorama des cancers, l’occasion de décrypter les tendances épidémiologiques de ces maladies. Décryptage avec Emmanuelle Mouret-Fourmedocteur spécialisé en oncogénétique et épidémiologie à l’Institut Curie, Hôpital de Saint-Cloud.

Premier constat, l’incidence des cancers ne cesse d’augmenter en France depuis 20 ans. Selon cette dernière estimation, 433 000 nouveaux cas sont survenus en 2023. « On peut en partie attribuer cela au vieillissement de la population mais si l’on regarde les comparaisons d’incidence réalisées par le Centre international de recherche sur le cancer [CIRC, agence de l’OMS]avec des tarifs standardisés, c’est-à-dire qui tiennent compte de l’âge et de la taille des populations dans chaque pays, on voit qu’il y a aussi forcément des facteurs et des comportements environnementaux qui interviennent”, analyse Emmanuelle Mouret-Fourme.

En contrôlant le tabac, l’alcool et la sédentarité, nous pourrions éviter un grand nombre de cancers grâce à la prévention primaire.

Le poids des facteurs externes

Ces raisons soutiennent l’augmentation constante de l’incidence dans certaines régions : en particulier le cancer du poumon chez les femmes. “Le pic d’incidence chez les hommes est passé, mais un grand nombre de femmes qui ont commencé à fumer dans les années 1970 ont aujourd’hui 70 ans”, analyse le spécialiste. Depuis 2010, on constate une augmentation constante de l’incidence du cancer du poumon (+4,3 % par an) et du cancer du pancréas (+2,1 % par an) chez ces derniers. Pour ces derniers, l’étiologie est plus difficile à décrypter. « Le cancer du pancréas est en augmentation, tant chez les hommes que chez les femmes. Nous pensons que cela est dû à la consommation de tabac et d’alcool mais aussi à l’exposition à des polluants ainsi qu’au surpoids et au diabète », reconnaît Emmanuelle Mouret-Fourme.

Ces données illustrent le poids des facteurs de risque modifiables. “En contrôlant le tabac, l’alcool et la sédentarité, on pourrait éviter un grand nombre de cancers grâce à la prévention primaire”, poursuit le spécialiste. Selon les dernières données de l’Inca, agir sur le surpoids, l’obésité, l’alcool, l’alimentation déséquilibrée et le tabac permettrait d’éviter près de la moitié des cancers, le tabac et l’alcool étant à eux seuls responsables de près de 28 % des cancers.

Seules 50 % des femmes de plus de 50 ans passent une mammographie dans le cadre d’un dépistage organisé

Enjeux de prévention et de dépistage

Cependant, nous constatons que les stratégies de dépistage et de prévention fonctionnent. Le nombre de cas de cancer du col de l’utérus diminue de 0,1% par an et le nombre de décès de 1,2% par an selon ce panorama 2024. «C’est encourageant. Cette baisse est due au dépistage par frottis. Cela stagne depuis 2010. On attend d’observer le relais vaccinal. C’est un cancer qui pourrait presque totalement être évité », ajoute Emmanuelle Mouret-Fourme.

À l’aube d’Octobre rose, mois de sensibilisation au dépistage du cancer du sein, l’enjeu est de taille. « Nous disposons de moyens de dépistage importants et pourtant seulement 50 % des femmes de plus de 50 ans passent une mammographie dans le cadre d’un dépistage organisé, auquel il faut ajouter 10 à 15 % qui la font sur ordonnance. On reste donc en dessous des 70 % recommandés pour un dépistage efficace », insiste le spécialiste.

Le cancer du sein reste le premier cancer chez les femmes (61 214 nouveaux cas en 2023) et la première cause de décès par cancer (12 600 cas en 2021) pour elles.

La question est également forte pour les cancers colorectaux, qui disposent désormais d’un test immunologique fécal. “C’est vraiment dommage, seulement 30 % des plus de 50 ans se font tester”, souffle Emmanuelle Mouret-Fourme.

Cependant, c’est le 3e cancers les plus fréquents chez l’homme (26 212 nouveaux cas en 2023) et le 2èmee chez les femmes (21 370 nouveaux cas en 2023). Pour les deux sexes confondus, elle est responsable de 17 000 décès chaque année (données 2021).

« Redéfinir l’alcool »

Actuellement, l’alcool est directement responsable de près d’un décès sur dix dans la Région européenne de l’OMS et est lié à plus de 200 maladies, dont au moins sept types de cancer, dont les cancers du sein et du côlon. Cependant, moins de la moitié des Européens sont conscients du lien entre l’alcool et le cancer, indique l’OMS Europe dans un communiqué de presse.

En outre, selon une étude récente, seulement 21 % des femmes dans 14 pays européens étaient conscientes du lien entre la consommation d’alcool et le risque de développer un cancer du sein – un risque qui commence déjà avec de faibles niveaux de consommation d’alcool. C’est pourquoi le Bureau régional de l’OMS pour l’Europe lance une nouvelle campagne d’information régionale, partageant les dernières recherches sur les effets de l’alcool sur la santé et encourageant des discussions ouvertes sur les méfaits souvent négligés.

La campagne « Redéfinir l’alcool » invite les Européens à réfléchir sur leurs relations personnelles et sociétales avec l’alcool et à reconsidérer le rôle de l’alcool dans la vie quotidienne, les célébrations et les traditions. La campagne vise à « sensibiliser aux risques pour la santé et aux dangers cachés associés à la consommation d’alcool et à encourager des choix plus sains ». AL

Liens d’intérêt des experts : Emmanuelle Mouret-Fourme ne déclare aucun lien d’intérêt.

Inscrivez-vous pour newsletters de Medscape : sélectionnez vos choix

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

Related News :