Le rapport sur la grippe aviaire aux États-Unis déformé par les agriculteurs

L’épidémie de grippe aviaire parmi les vaches laitières aux États-Unis est bien plus importante que ne le suggèrent les chiffres officiels. Cela est dû à la réticence des agriculteurs à tester leurs animaux et à risquer les conséquences économiques d’un résultat positif. C’est ce qui ressort d’entretiens avec des experts laitiers, des vétérinaires et des agriculteurs dans six États où des cas sont connus.

Le Département de l’Agriculture des États-Unis (USDA) a enregistré 239 cas de grippe aviaire dans des troupeaux laitiers de 14 États depuis le 25 mars.

La transmission du virus des oiseaux aux vaches a accru les craintes que le virus puisse s’adapter aux humains. Les scientifiques préviennent qu’une surveillance limitée pourrait affaiblir la capacité des États-Unis à réagir à une nouvelle propagation humaine.

Treize travailleurs de fermes laitières et avicoles ont été infectés par la grippe aviaire cette année, selon les Centers for Disease Control and Prevention.

Reuters s’est entretenu avec plus d’une douzaine de chercheurs, vétérinaires, agriculteurs et groupes de l’industrie de l’élevage pour comprendre si la propagation du virus chez les vaches laitières est suivie avec précision.

Des experts en santé animale et humaine de trois États, qui travaillent en étroite collaboration avec des vétérinaires et des agriculteurs, ont déclaré que le chiffre du gouvernement était probablement sous-estimé. Les agriculteurs craignent des difficultés économiques causées par un test positif, après quoi ils pourraient être empêchés de vendre du lait ou du bétail pendant des semaines.

“Bien que nous ayons officiellement neuf cas positifs, il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup plus d’exploitations affectées ou infectées qui ne font tout simplement pas de tests”, a déclaré Joe Armstrong, vétérinaire et expert en élevage à l’Université du Texas. Minnesota. Il a déclaré qu’un décompte plus précis des cas de bétail au Minnesota serait trois à cinq fois plus élevé.

Un porte-parole de l’USDA a expliqué que le département avait encouragé les tests en exigeant des tests négatifs pour les vaches expédiées à travers les frontières des États depuis avril et en proposant un programme volontaire de tests hebdomadaires des réserves de lait des agriculteurs.

Selon les données de l’USDA, 24 troupeaux laitiers participent à ce programme, composé d’environ 24 000 fermes vendant du lait dans tout le pays.

Pas sérieux

Six agriculteurs, vétérinaires et autres experts ont déclaré que les agriculteurs étaient réticents à tester parce qu’ils ne considéraient pas le virus comme une préoccupation sérieuse ou parce que les incitations gouvernementales en faveur des tests ne compensaient pas les pertes attendues.

Terry Dye, un agriculteur du Colorado, a déclaré que ses deux fermes laitières avaient été infectées cet été et qu’il n’en avait pas informé l’État parce qu’il souhaitait gérer la situation en privé. Les responsables agricoles de l’État ont finalement eu vent des infections et ont mis ses animaux en quarantaine, a-t-il déclaré. “Parfois, il est plus pratique de ne pas savoir”, a déclaré Dye.

Aide financière

L’USDA propose d’indemniser les agriculteurs dont les animaux sont infectés pour les soins vétérinaires et 90 % de la production laitière perdue. Quarante-sept troupeaux se sont inscrits à l’aide financière de l’agence, bien que ce total comprenne des fermes indemnes d’infection qui demandent de l’aide pour les coûts de biosécurité.

L’USDA teste le lait cru des vaches pour identifier le virus dans les troupeaux. Pour mieux suivre la propagation, les experts ont déclaré que davantage d’États devraient imposer des tests sur le lait cru ou offrir des salaires plus élevés aux agriculteurs.

Des mesures agressives

Le Michigan et le Colorado ont pris des mesures agressives pour contenir la grippe aviaire chez les bovins, même si les experts estiment toujours que les cas passent inaperçus.

Phil Durst, un éducateur de l’Université de Michigan State qui s’est entretenu avec des agriculteurs dont les troupeaux sont touchés, a déclaré que les 27 troupeaux positifs du Michigan sont probablement sous-estimés d’au moins un tiers.

Jenna Guthmiller, professeur adjoint d’immunologie à l’Université du Colorado qui a étudié le virus, a déclaré que les 63 troupeaux positifs du Colorado sont également probablement sous-dénombrés.

Après une série d’épidémies, le Colorado est devenu le 22 juillet le seul État à exiger que les fermes laitières testent chaque semaine leurs approvisionnements en lait en vrac. Les tests ont révélé 10 troupeaux infectés qui ont été mis en quarantaine.

Méfiance

Certains agriculteurs ne font pas de tests parce qu’ils se méfient des responsables gouvernementaux ou des informations sur les risques de la grippe aviaire pour le bétail et les humains, ont indiqué quatre sources. « De nombreuses fermes laitières m’ont dit qu’elles n’y croyaient tout simplement pas », a déclaré Jason Schmidt, un producteur laitier de l’est du Kansas.

Le Wisconsin, deuxième État producteur de lait et premier producteur de fromage, n’a signalé aucun cas de grippe aviaire chez les bovins. Les producteurs laitiers ne procéderaient probablement pas à des tests même s’ils soupçonnaient des symptômes dans leurs troupeaux, a déclaré Keith Poulsen, directeur du laboratoire de diagnostic vétérinaire du Wisconsin. « Il est toujours moins coûteux de simplement traverser une épidémie dans un troupeau, de se rétablir et de passer à autre chose », a-t-il déclaré.

Article traduit et adapté initialement publié dans Farmtario.

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