Le décès du photographe Jean-Christophe Polien a été annoncé dimanche 5 novembre. Le natif de Gray en Haute-Saône était âgé de 57 ans. A Besançon (Doubs), ses amis et anciens collègues rendent hommage à celui qui a photographié de grands noms du rock ainsi que des artisans et des Bisontins.
“Je suis sous le choc“.”Dévasté“.”je ne veux pas le croire“.”Je m’attendais à tout sauf ça« . Cela fait plusieurs heures que la mort de Jean-Christophe Polien a été officialisée, mais ses proches ne semblent pas encore se rendre compte de sa disparition. L’annonce de son décès a été faite dimanche 5 novembre, après que le photographe a été retrouvé sans vie à son domicile de Besançon. Il avait 57 ans.
Portraitiste de renom, Jean-Christophe Polien a fait ses initiales dans le monde de la musique dans les années 90. Installé à cette époque à Paris, il rencontre tour à tour les plus grands groupes de rock. Devant son objectif, il voit défiler Les Rita Mitsouko, AC/DC, The Clash ou encore Oasis. Grâce à son talent, il a marqué de son empreinte toute une génération d’artistes et de musiciens.
“Quand on m’a annoncé sa mort, j’ai cherché une chaise pour m’asseoir, ça a été un tel choc pour moi.», résume Raphaël Helle. Le photographe franc-comtois a collaboré à de nombreuses reprises avec Jean-Christophe Polien, dit « JC ». “J’ai perdu le seul photographe avec qui j’avais un point commun à Besançon“, il ajoute.
Et comment résumer le style « JC » Polien ? “Quelque chose de décalé”, “quelque chose de plus”pour certaines personnes. « À chaque fois, il faisait ressortir des choses que personne n’avait jamais vues. » explique de son côté Simon Nicolas. Pendant des années, les deux hommes ont travaillé ensemble sur des projets artistiques à Besançon. “Je me suis retrouvé à chercher des gants de boxe et je les ai trouvés en trois minutes pour qu’un artiste qu’il photographiait les enfile.», se souvient Simon Nicolas.
A travers des séances photos, plus d’une centaine en l’espace de quelques années, « JC » l’emmène dans des lieux insolites. “Nous nous sommes retrouvés dans les salles de costumes d’un théâtre avec Clara Luciani. Dans un atelier de menuiserie avec Eddy de Pretto. Dans une épicerie le soir avec un groupe de musique”. A chaque fois, le photographe tente de mettre les artistes dans des situations nouvelles. Chacun se prête au jeu, non sans avoir été préalablement “surpris et amusé”, assure Simon Nicolas.
Je pense qu’il était presque plus rock’n roll qu’eux.
Il se souvient que Polien, par exemple, «a demandé aux artistes de jongler avec les oranges« . « Il a demandé une tasse de thé à AC/DC. Il a demandé à Joe Strummer des Clash de sauter de joie avant de le prendre en photo. Ce qui n’est pas forcément le trait de personnalité que l’on connaît. plus Joe Strummer Tout était toujours inattendu et c’était complètement fou.»
Mais plus que des chanteurs, des stars ou des rockeurs, « JC » aimait avant tout les gens. Il a ainsi photographié des ouvriers sur des chantiers, des artisans, des commerçants, des voyageurs. Toujours pour “cherchons comment nous pourrions les mettre en avant », souligne Simon Nicolas. “C’est pourquoi il a fait des portraits. Parce qu’il voulait rencontrer des gens. Il n’en avait pas peur, il les aimait bien, même s’il ne le montrait pas toujours car il était très réservé.» explique Jean-Charles Sexe, photographe de la ville de Besançon.
Alors, pour rester au plus près des gens, « JC » réalise une série de photographies pendant la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19. Lors du confinement en 2020, il s’est particulièrement intéressé aux couturières bénévoles qui confectionnaient les premiers masques en tissu à Besançon. Une quarantaine de portraits seront peints, avant d’être exposés par la mairie de Besançon pour rendre hommage aux héros de la crise sanitaire. « Il savait comment s’arrêter. Il savait regarder là où les autres ne regardent pas. Entrez dans des endroits où tout le monde ne va pas. Il voulait rendre visibles les anonymes.»salue Emmanuel Dumont, ancien attaché de communication de la ville de Besançon, qui a participé au projet.
«JC» a également pu photographier le syndicaliste Charles Piaget, décédé samedi 4 novembre à l’âge de 95 ans, devenu célèbre pour avoir mené la révolte des ouvriers de l’usine horlogère LIP dans les années 1970.
La ville qui l’a vu mourir perd un habitant qui l’a photographié, aimé et voyagé depuis son installation en 2016. Selon ses plus proches collaborateurs, c’est dans le Doubs qu’il a pu affiner son style photographique. “Après une vie dans le milieu du show business, j’imagine qu’il voulait passer sa seconde vie au contact de gens normaux» commente Jean-Charles Sexe.
Il voulait rendre visibles les anonymes.
Emmanuel Dumont, ancien adjoint à la communication de la ville de Besançon
Et à Besançon, « JC » ne reste pas très longtemps à l’écart du rock’n roll. Il multiplie les projets avec la salle de spectacle La Rodia. « Il a pris, je ne sais combien de photos dans notre monte-charge et dans d’autres endroits inattendus de La Rodia», commente son ancien manager, Simon Nicolas. “On est même allé à la chaufferie pour qu’il prenne une photo d’un artiste dans une pipe», se souvient l’intéressé. Photographe de La Rodia depuis plusieurs années, Polien s’intéresse beaucoup à la scène locale émergente. “Il a fait beaucoup de portraits de groupes locaux”ajoute Simon Nicolas.
Une scène naissante à Besançon, qui compte les groupes Bigger, Catfish, ou encore Glease, qui lui rendent aujourd’hui hommage. Tout le monde s’est dit attristé d’apprendre la disparition. “d’un artiste”d’un “un personnage essentiel, d’une immense gentillesse, d’une grande modestie et d’un talent fou”, salue à nouveau le groupe Bigger.
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