Malgré certaines limites, l’étude révèle une absence de différence significative sur les symptômes respiratoires entre le groupe de vapoteurs et le groupe témoin.
- Le groupe vapoteur n’a pas signalé d’effets respiratoires significativement plus élevés que le groupe témoin.
- Les résultats de cette étude sont rassurants quant aux effets du vapotage sur la santé respiratoire.
- La recherche présente plusieurs limites dont il convient de tenir compte.
Nouvelle recherche du Centre d’excellence pour l’accélération de la réduction des méfaits
En avril dernier, nous vous faisions part des dernières avancées de l’étude VERITAS (Vaping Effects: Real-world InTernAtional Surveillance). Lancé en 2023, il visait à étudier les effets respiratoires du vapotage chez les vapoteurs sans antécédents de tabagisme. Une recherche difficile à mener puisqu’il fallait trouver des participants qui utilisent une cigarette électronique sans avoir fumé régulièrement par le passé. Il y a quelques jours, les résultats de VERITAS ont été publiés dans la revue médicale, Rapports scientifiques1.
Près de 750 participants
Pour cette recherche, l’équipe du professeur Riccardo Polosa, bien connu pour ses nombreuses études concernant les vaporisateurs personnels, a recruté un total de 748 participants.
471 composaient la cohorte des vapoteurs. Ils devaient avoir utilisé une cigarette électronique au moins une fois au cours des 7 derniers jours, avoir fumé moins de 100 cigarettes combustibles au cours de leur vie, et n’avoir jamais consommé, ou moins d’une fois par semaine, d’autres produits tabac ou contenant de la nicotine.
Les 257 participants restants représentaient la cohorte témoin. Ils devaient répondre aux mêmes critères, mais sans avoir vapé.
Méthodologie
Tous les participants ont été invités à remplir un questionnaire évaluant la fréquence d’apparition des symptômes respiratoires suivants :
- Toux matinale accompagnée de mucosités ou de mucus.
- Toussez fréquemment pendant la journée.
- Ressentir un essoufflement qui rend difficile l’exécution des tâches quotidiennes normales.
- Être facilement essoufflé lors des activités quotidiennes normales.
- Avoir une respiration sifflante ou un bourdonnement dans la poitrine parfois lorsqu’aucune activité physique n’est pratiquée.
Chaque symptôme était accompagné de réponses différentes qui valaient un nombre de points distinct :
- Jamais : 0 jour au cours des 30 derniers jours = 1 point
- Rarement : 1 à 5 jours au cours des 30 derniers jours = 2 points
- Occasionnellement : 6 à 15 jours = 3 points
- La plupart des jours : 16 à 29 jours = 4 points
- Chaque jour = 5 points
Résultats
Il n’y avait aucune différence statistiquement significative entre le groupe vapoteur et le groupe témoin.
Comme l’indiquent les auteurs de cette étude, la majorité des vapoteurs et des cohortes témoins (85 % ou plus) ont déclaré n’avoir jamais ressenti chacun des cinq symptômes, « ce qui se situe en dessous du seuil optimal pour différencier les participants avec (ou sans) un diagnostic de maladie respiratoire ».
Après ajustement sur certaines covariables (effets de l’âge, du sexe, du statut professionnel et du niveau d’éducation), le groupe de vapoteurs présentait une fréquence plus élevée de symptômes respiratoires. Cependant, la différence moyenne n’était que de 0,18 alors qu’une différence d’au moins 0,57 aurait été nécessaire pour obtenir une différence cliniquement significative.
Cette absence de différence significative s’est également répétée lorsque les chercheurs ont étudié chacun des symptômes individuellement. La plus grande différence observée concernait le symptôme de respiration sifflante, où la différence entre les deux groupes était de 0,24, soit toujours moins de la moitié du chiffre nécessaire pour établir une différence cliniquement significative.
Il semble également important de noter que les antécédents de tabagisme (moins de 100 cigarettes fumées au total au cours de la vie) étaient plus élevés dans le groupe vapoteur (30,8 % des participants contre 12,1 % dans la cohorte témoin), alors que comme la consommation d’autres produits du tabac ou encore les produits contenant de la nicotine, avec 18,1% chez les vapoteurs et 5,8% pour le groupe témoin.
En conclusion
Cette étude est particulièrement intéressante, car peu d’études parviennent à recruter des vapoteurs n’ayant jamais fumé, ou rarement, au cours de leur vie. Ses résultats démontrent que les symptômes respiratoires entre vapoteurs et non-vapoteurs sont généralement similaires, bien que les utilisateurs de cigarettes électroniques signalent des symptômes plus souvent que le groupe témoin, en particulier à des fréquences plus élevées. « rares » ou “occasionnel”. Pour les scientifiques, cette différence pourrait s’expliquer notamment par les effets irritants du vapotage.
« La présente étude (…) se concentre sur les utilisateurs d’e-cigarette sans antécédents de tabagisme établis ou récents, et apporte ainsi de nouvelles preuves que le vapotage, en l’absence d’antécédents de tabagisme, n’est pas associé à une augmentation cliniquement significative de la fréquence des symptômes respiratoires »concluent les chercheurs.
Limites à garder à l’esprit
Il convient toutefois de noter que cette étude présente plusieurs limites.
Premièrement, de par son caractère transversal et observationnel, cette recherche ne permet pas d’établir un lien de causalité entre vapotage et symptômes respiratoires. Ensuite, si, dans certains cas, le groupe de vapoteurs rapportait effectivement plus de symptômes respiratoires, les participants de ce groupe étaient plus nombreux à avoir déclaré un historique de tabagisme, même si celui-ci était limité à un maximum de 100 cigarettes fumées au cours de la vie.
Certains facteurs susceptibles de fausser les résultats n’ont pas non plus été étudiés, comme l’exposition à des polluants environnementaux dans la vie professionnelle, ou encore le vapotage d’autres substances. Par exemple, lorsque certains répondants ont déclaré avoir vapoté des produits sans nicotine, il s’agissait peut-être de cannabis ou d’une autre substance susceptible d’avoir des effets sur les symptômes respiratoires.
Notons enfin que cette étude a été réalisée sur internet, à partir des témoignages des participants. Autrement dit, les symptômes respiratoires déclarés par les participants n’ont fait l’objet d’aucun contrôle médical, tout comme l’absence d’antécédents de tabagisme ou l’une des informations identifiées dans cette recherche.
Cette étude apporte donc de nouvelles données rassurantes concernant les effets du vapotage sur la santé respiratoire, mais ses résultats doivent encore être sujets à une certaine prudence.
1 Goicoechea, JZ, Boughner, A., Lee, JJC et al. Symptômes respiratoires chez les utilisateurs de cigarettes électroniques sans antécédents de tabagisme établis dans la cohorte VERITAS. Sci Rep 14, 28549 (2024). https://doi.org/10.1038/s41598-024-80221-8
Cette étude a été réalisée par le Centre d’excellence pour l’accélération de la réduction des risques (CoEHAR). Fondé en mars 2018 par Riccardo Polosa, le centre entretient, comme le professeur Polosa, des liens étroits avec l’industrie du tabac. De son côté, Polosa a travaillé auparavant comme consultant pour British American Tobacco. Elle a également déjà reçu des subventions de Philip Morris International et de Juul (dont le cigarettier Altria a détenu une partie pendant plusieurs années).
CoEHAR a reçu plusieurs millions de dollars ces dernières années de Philip Morris International par le biais de la Fondation pour un monde sans fumée, désormais rebaptisée Global Action to End Smoking.