Né en 1929 et décédé il y a deux ans, le 26 décembre 2021, le célèbre biologiste et myrmécologue (spécialiste des fourmis) Edward Osborne Wilson – plus connu sous le nom de « EO Wilson » – n’a pas seulement légué à ses pairs un travail scientifique qui a inspiré des générations de conservationnistes et biologistes évolutionnistes. Il leur a également laissé des questions embarrassantes sur ses affinités avec les milieux scientifiques suprémacistes – héritiers de la « science raciste » du XIXe siècle.e siècle. Depuis plusieurs mois, la découverte de lettres inquiétantes dans sa correspondance suscite de vives discussions au sein de la communauté scientifique. D’autant plus frappant que EO Wilson est une icône de la biologie et de la protection de l’environnement – il a popularisé la notion de « biodiversité » – et est considéré par certains comme le successeur de Darwin.
La révélation de ses liens avec l’un des principaux représentants du « racisme scientifique » nord-américain, le psychologue canadien John Philippe Rushton (1943-2012), vient de deux examens distincts de ses archives personnelles, léguées à la Bibliothèque du Congrès. C’est en février 2022 que les historiens des sciences Mark Borrello (Université du Minnesota) et David Sepkoski (Université de l’Illinois à Urbana-Champaign), d’une part, et Matthew Gibbons et Stacy Farina (Université Howard de Washington), d’autre part, ont publié les résultats de leurs plongées dans la correspondance du grand biologiste, respectivement dans le Revue de livres de New York et en La science pour le peuple.
Les deux analyses concordent et dressent le portrait d’un grand scientifique soucieux d’éviter les polémiques publiques, mais jouant de son prestige, en coulisses, pour promouvoir des thèses pseudo-scientifiques sur l’inégalité des « races humaines ». “La relation entre Wilson et Rushton n’est pas une histoire de culpabilité par association ou d’erreurs honnêtes.écrivent Matthew Gibbons et Stacy Farina. C’est une histoire sur la façon dont les idées racistes sont intégrées dans le corps scientifique avec le soutien de puissants alliés qui opèrent en secret. »
En 1986, EO Wilson était déjà membre de l’Académie américaine des sciences. A ce titre, il peut « sponsoriser » la publication d’articles dans le prestigieux Actes de l’Académie nationale des sciences (PNAS). Au printemps 1986, John-Philippe Rushton demande à EO Wilson de publier dans le PNAS un de ses articles sur un présumé « coévolution génétique et culturelle » comportements sociaux complexes.
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