« Les démocraties sont en danger. » Pour Loïc Guyot, co-directeur de P.Mauvaise herbe fantôme Avec Guillaume Gauthier, la Docufiction sort dans un contexte international tendu, où nos systèmes vacillent. « On garde parfois les choses pour acquises, mais on voit que le travail est toujours à refaire », précise-t-il. Jean-Pierre Charbonneau, ancien journaliste à Devoir Et l’homme politique au cœur du film, partage cette inquiétude : « Il y a des gens qui utilisent la loi de la force et des comportements de gangsters pour prendre le pouvoir. On voit ce qui se passe aux États-Unis avec l’extrême droite, qui n’hésite pas à user de la violence, de l’intimidation, des mensonges, des mensonges, pour installer son pouvoir. Au lendemain de l’intronisation de Donald Trump et des menaces économiques et politiques qu’il fait planer sur le Canada, ses propos sont encore plus froids dans le dos.
Pouvoir fantôme Souhaite remplir son devoir de mémoire collective en dépoussiérant la commission d’enquête sur la criminalité organisée (CECO) cinquante ans plus tard. A l’époque, dans les années 1970, les proches de Robert Bourassa et de Jean Drapeau côtoient le monde interlope… Il faut donc dissiper les soupçons, au plus vite. «Les gens l’oublient, mais, au Québec, la corruption est généralisée depuis des années», a déclaré Jean-Pierre Charbonneau, qui se souvient, pour avoir été longtemps sur le terrain, de mœurs électorales «tordues», de fonds électoraux «occultes» et de multiples « connexions incestueuses ». Selon lui, la corruption et la collusion concernaient non seulement les politiques et la police, mais aussi les services de renseignement, l’armée, le système judiciaire et le milieu journalistique.
Justement, avec son long métrage, Loïc Guyot a aussi voulu rendre hommage au « pouvoir de la plume », qui a joué un rôle essentiel dans la mise en place du CECO en septembre 1972, après la publication d’enquêtes signées Jean-Pierre Charbonneau. “Si nous n’avions pas eu un jeune intrépide, incorruptible, qui n’avait pas peur de prendre une balle et d’être menacé par la mafia, cela ne serait pas passé”, a déclaré le co-coscénariste. Si la liberté de la presse a rarement été en danger comme en 2025, pour des raisons allant de la difficulté de financement à fausses nouvellesil veut, avec Pouvoir fantômeinsister sur son caractère fondamental. « Il était très important pour nous de rappeler que la qualité de l’information est essentielle pour un cabinet d’avocats. Il fallait Jean-Pierre Charbonneau, mais il fallait aussi Devoirun organe de presse qui avait une diffusion. » Et le scénariste du documentaire, Tristan Malavoy, ancien journaliste, d’ajouter : « Je vois à quel point c’est fragile. Si on m’avait dit il y a dix ou quinze ans, lorsque j’étais designer puis rédacteur en chef de Voirque tout allait s’effondrer, je ne l’aurais pas cru. Aujourd’hui, le danger est bel et bien là.
Attachement aux faits
L’équipe à l’origine du Pouvoir fantôme en effet, il accordait une grande importance à l’aspect documentaire de son documentaire. «Il y a le factuel, le véridique, le vérifiable, notamment avec les bobines d’écoute électroniques et les reportages auxquels j’ai eu accès et que j’ai intégré tel quel au scénario», explique Tristan Malavoy. Selon lui, le film devient plus intéressant lorsque ce qui est censé être diffusé à l’écran sur le CECO est de la manière la plus informée possible. «Il y a des faits, incontestables et qu’on ne peut discuter, mais ce qui est présumé est une hypothèse éclairée, de Jean-Pierre Charbonneau, entre autres, qui a vécu les événements jusque dans sa chair, c’est le moins qu’on puisse dire, et qui Cela fait 50 ans que je réfléchis à ces questions », dit-il.
-La fiction au service du documentaire, quant à elle, est utile pour « combler les trous ». « Pour moi, c’est comme un mal de tête qui manquerait quelques morceaux. Mais avant d’imaginer les pièces manquantes, il faut être sûr d’avoir toutes les pièces existantes, être sûr qu’elles ont été retrouvées”, estime Tristan Malavoy, qui espère offrir au public la meilleure interprétation possible. Le recours à la fiction permet aussi de transcender les limites imposées par les documents d’archives, pour donner du relief à des personnages historiques. «Voir Robert Bourassa qui dit une parole plus accrochée que ce qu’on a l’habitude d’entendre ou voir Jean Drapeau qui s’énerve, ça fait du bien, parce que ça les humanise», raconte Loïc Guyot. Dans Pouvoir fantômeces personnalités ne sont plus simplement figées dans le temps, mais accessibles aux spectateurs.
Si Jean-Pierre Charbonneau estime que le mythe du mafieux peut séduire le grand public, il est essentiel de ramener régulièrement l’Histoire à ce qu’elle est. “C’est comme une sorte de devoir de conscience citoyenne, d’information et d’éducation, car ces organisations sont littéralement des cancers pour la société”, a-t-il déclaré. De son côté, Loïc Guyot souhaite que le spectre de la corruption et de la collusion ne s’estompe pas avec le temps. « Même si on a l’impression que tout va bien, ce n’est pas vrai. Il faut apprendre de l’histoire pour se protéger et pour qu’elle ne se répète pas », conclut le co-réalisateur.
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