Une préquelle à Roi Lion sur la vie de Mufasa, jeune patrouilleur à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis, le portrait d’une actrice mondialement connue, des vulcanologues au destin tragique… La sélection cinéma du Figaro.
Le Mur – Avoir
Thriller de Philippe Van Leeuw – 1 h 36
Une voiture sillonne la nuit en maraude au cœur des plaines arides de l’Arizona. A une intersection mal éclairée, on aperçoit le visage fermé du conducteur. Veste kaki, médaille d’or autour du cou, petit chignon, la jeune femme apparaît silencieuse et solitaire, sans maquillage. Au coin d’une station-service, elle récupère un migrant mexicain avant de le ramener chez elle pour faire l’amour. Au petit matin, l’héroïne renvoie brusquement le requérant et apparaît vêtue de l’uniforme de la patrouille frontalière entre le Mexique et les États-Unis. La surprise est grande. Elle rejoint son père, également agent fédéral, qui s’apprête à partir avec des collègues « faire la une des journaux sur les migrants qui tentent de traverser furtivement la frontière ». Même si elle n’est pas de service, la jeune femme participe au passage à tabac et arrête avec une certaine violence un clandestin. Son patron lui fait la leçon. Que lui est-il arrivé ? En bonne patriote animée par un esprit de zèle intégriste, saupoudré de racisme et d’intolérance, elle repartira à la « chasse aux clandestins », jusqu’à ce qu’un malheureux coup de feu retentisse dans la Sierra…
Le cinéaste belge Philippe Van Leeuw signe un western contemporain âpre et minimaliste. Vicky Krieps est vraiment étonnante dans le rôle de cette Jeanne d’Arc américaine. Le film repose principalement sur ses épaules… qu’elle a décidément très fortes. O. D.
Lire aussi
Notre critique de The Wall : haine sans frontières
Sarah Bernhardt, la Divine – Avoir
Drame de Guillaume Nicloux – 1 h 38
C’est le portrait d’une actrice de renommée mondiale et d’une femme puissante qui défie les conventions. Il y a la Sarah Bernhardt de 1915, qui vient de se faire amputer d’une jambe tuberculeuse, à la scie et à l’éther. Elle reste cependant combative. Et il y a la Sarah de 1896, son année jubilaire. Elle est au sommet de sa gloire. Ses amis et admirateurs la célèbrent lors d’une journée Sarah Bernhardt. Sa garde rapprochée est composée de femmes et d’hommes, anciens amants et maîtresses amoureux d’art et de fête. Parmi eux, Edmond Rostand, qui écrit Cyrano de Bergerac pour Coquelin. Sarah Bernhardt l’aurait volontiers incarné, sans prothèse de marche mais avec un appendice nasal. Elle n’est pas du genre à se morfondre. Elle a l’art de délivrer des punchlines. Mais la femme indépendante, mère sans mari, bisexuelle et moderne, est aussi une amoureuse romantique.
Avec ce portrait haut en couleur de l’actrice, Guillaume Nicloux montre qu’il est un cinéaste éclectique. Et Sandrine Kiberlain, une comédienne de talent. ET. S.
Lire aussi
Notre revue de Sarah Bernhardt, la Divine, toutes les nuances du scandaleux
Oh, le Canada – Avoir
Drame de Paul Schrader – 1 h 35
Trop tard. Leonard Fife est atteint d’un grave cancer. La phase terminale se profile. Avant de partir, ce célèbre documentariste accepte de réaliser une interview franche filmée par deux de ses anciens élèves. Dans sa maison montréalaise, il s’assoit devant la caméra, non sans exiger que sa femme (également ancienne étudiante) soit présente. Cela vaut la peine qu’elle prenne le - d’écouter. Richard Gere n’est plus le beau gosse pour lequel Paul Schrader a embauché Gigolo américain. Le - a fait son œuvre. Le maquillage n’aide pas les choses. Les cheveux sont devenus blancs et clairsemés (chimiothérapie). Des rides sont apparues. Le regard est un peu perdu. Mais bon, ce véritable fan de cinéma vrai a dit oui, alors foncez. Il était jeune. C’était dans les années 1960. Sa femme attendait un deuxième enfant. Il rêvait de devenir romancier. Son beau-père lui propose de rejoindre l’entreprise familiale et de lui prêter de l’argent pour s’installer dans le Vermont. Il a préféré disparaître, laisser tout le monde là-bas, partir au Canada. Il y avait des femmes. Quelle idole ! Les abandonner du jour au lendemain ne semblait pas trop le déranger. Leur prénom commençait souvent par un A. La confession se mélange. Il confond les noms, les époques, se perd dans son propre labyrinthe. Est-ce la faute de la drogue ?
Richard Gere est parfait dans ce rôle. Joie de le retrouver, de scruter son visage capté en très gros plans. Mission accomplie. Ses confessions ont quelque chose de discrètement émouvant. ET. N.
Lire aussi
Notre critique de Oh, Canada : la faim d’une vie difficile
Au coeur des volcans : Requiem pour Katia et Maurice Krafft – Avoir
Documentaire de Werner Herzog – 1 h 21
Les premières images deAu coeur des volcans : Requiem pour Katia et Maurice Krafft frappent immédiatement la rétine tant ils sont captivants et beaux. On découvre la silhouette cagoulée en scaphandre métallique qui étend un pouce levé tandis qu’en arrière-plan, une explosion de lave en fusion s’élève furieusement vers le ciel. Werner Herzog parle en voix off : “Ce film honore la mémoire de Katia et Maurice Krafft, volcanologues alsaciens en France, qui furent mes amis”. Leur sort est incroyable. Et tragique, puisqu’ils ont subitement disparu en 1991 sous d’énormes coulées pyroclastiques en voulant filmer une énième éruption, sans avoir eu le - d’évacuer les lieux à -. Trente ans plus tard, Herzog redonne vie à leurs images époustouflantes et rend hommage à ces deux volcanologues uniques. Ce que le film montre principalement, c’est la beauté fascinante que les volcans ont sur les humains. La quasi-totalité des images du documentaire proviennent de leurs expéditions menées au fil des décennies. Cataractes de lave comme des chutes du Niagara fumantes, fumerolles suggérant un bouillonnement de lave dévalant la pente d’un volcan, comme une apocalypse en cours… Tout cela est capturé avec de plus en plus de professionnalisme par les Krafft qui ne cessent de jouer avec le feu à mesure qu’ils se rapprochent. à la source de l’éruption. Mais au-delà de cette beauté terrifiante, Herzog capte aussi et surtout la passion d’un couple fusion devenu légendaire. Et c’est peut-être ce qui touche le plus le spectateur. DO
Moufasa : Le Roi Lion – A éviter
L’aventure de Barry Jenkins – 1 h 58
Le film raconte l’enfance du père de Simba à travers des flashbacks où apparaissent ses amis : Timon le suricate malin, le phacochère au grand cœur Pumba et le vieux mandrill Rafiki. Ces trois-là racontent à la jeune Kiara les histoires de son grand-père. Si l’intrigue de Moufasa : le roi lion reprend plus ou moins le récit initiatique de le roi lion, le film ne s’appuie pas sur les mélodies du film original et ne retranscrit pas exactement le destin de Mufasa en le calquant sur celui de Simba. Il navigue entre suite et remake, créant délibérément la confusion.
Cela ressemble à un documentaire animalier. La technologie abolit la frontière entre réalité et fiction. Cela devient assez vite tendu. Nous reprenons. Nous nous énervons. Tout semble alors artificiel, truqué, faux. Impossible de rugir de plaisir. O. D.
Lire aussi
Notre critique de Mufasa, le Roi Lion : impossible de rugir de plaisir
Tout le monde aime Touda – A éviter
Drame de Nabil Ayouch – 1 h 42
L’histoire d’une jeune femme marocaine rêvant de devenir Cheikha, une chanteuse traditionnelle qui interprète des textes de résistance, d’amour et d’émancipation transmis depuis des générations. Touda (Nisrin Erradi) se produit dans les bars de sa ville de province où elle subit des regards libidineux et des mains intrusives. Elle rêve d’un avenir meilleur pour elle et son fils sourd-muet. Casablanca est son rêve hollywoodien. Mais Casablanca se fait attendre depuis longtemps. Pour Touda, chaque jour se ressemble. Coincée dans son logement insalubre, elle s’enfuit alors qu’elle se maquille et prépare son quart de nuit.
Un film trop didactique. Pour le spectateur, chaque scène est une répétition de la précédente. Nabil Ayouch n’est pas le premier et ne sera pas le dernier réalisateur à connaître un déclin. Cela arrive aux meilleurs. F. V.
Lire aussi
Notre critique de Everybody Loves Touda : la chanson de l’impossible
Kraven le chasseur – A éviter
Action de JC Chandor – 2 h 07
Sortant de Kraven le chasseurle croquis de Inconnu courant insidieusement dans la tête. « Comment distingue-t-on un bon chasseur d’un mauvais chasseur ? “Le mauvais chasseur, il voit quelque chose, il tire.” Et le bon ? « Eh bien, un bon chasseur voit quelque chose. Il tire… Mais c’est un bon chasseur ! Hélas, le blockbuster de JC Chandor appartient à la catégorie des mauvais chasseurs. Comment le directeur de Appel de marge ou de Tout est perdu aurait-il pu s’égarer en créant cette absurdité ? Pourtant Kraven le Chasseur est un redoutable personnage Marvel, flamboyant, fascinant, brutal, théâtral et tellement léonin. En voulant raconter les origines d’un grand super-vilain issu de l’univers Spider-Man, sans avoir l’autorisation de le montrer à notre cher Web Weaver, le film plonge dans de grosses bêtises. Une histoire de fratrie au cœur d’une famille d’oligarques russes très mafieux. Un papa ours rugissant incarné par le gargantuesque Russell Crowe, plus histrionique que jamais. Aaron Taylor-Johnson revêt la peau de lion de Kraven, mais il n’a pas les épaules. Lors d’un safari qui tourne mal, un élixir africain ancestral lui sauve la vie après une attaque de lion et lui confère ses pouvoirs surhumains. Mais il faut plus qu’une simple potion pour incarner le véritable personnage de Marvel. Kraven le chasseur dans les bandes dessinées a tellement plus de présence, de force et de charisme. Quant au film, il se veut violent. Il est pathétique. Grrrr ! DO
Related News :