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Pain et roses | La résistance désespérée des femmes afghanes, relatée dans un documentaire poignant

(Los Angeles) Un rare témoignage, filmé téléphone portable à la main, au cœur de la tyrannie des talibans : Pain et rosesun documentaire sur le calvaire des femmes afghanes, est le genre de film dont on ne ressort pas intact.


Publié hier à 15h17

Romain FONSEGRIVES

Agence -Presse

Soutenu par l’actrice Jennifer Lawrence (Jeux de la faim) et la prix Nobel de la paix Malala Yousafzai, ce long métrage plonge le spectateur dans l’asphyxie quotidienne que subit la moitié de la population en Afghanistan, depuis le retrait des troupes américaines et le retour au pouvoir des fondamentalistes religieux.

« Lorsque Kaboul est tombée en 2021, toutes les femmes ont perdu leurs droits fondamentaux. Ils ont perdu le droit à l’éducation et au travail», a rappelé jeudi à l’AFP Jennifer Lawrence, venue promouvoir ce film qu’elle a contribué à produire. « Leur vie a été complètement bouleversée du jour au lendemain. »

Présenté à Cannes en mai 2023, ce documentaire réalisé par la cinéaste afghane Sahra Mani sort sur Apple + le 22 novembre.

Après la chute de Kaboul, le réalisateur en exil a contacté une dizaine de femmes restées sur place et leur a appris à se filmer avec leur téléphone, pour documenter leur résistance.

Le résultat est un film émouvant, où les destins entrelacés de trois femmes afghanes reflètent le déclin des femmes du pays.

« Un énorme silence »

On rencontre ainsi Zahra, une dentiste dont le cabinet est menacé de fermeture par les talibans, propulsée du coup en leader des manifestations contre le régime.

Puis Sharifa, une ancienne fonctionnaire privée de travail et cloîtrée chez elle, réduite à étendre son linge sur son toit pour prendre l’air.

Et enfin Taranom, une militante en exil au Pakistan voisin, qui voit, impuissante, son pays sombrer dans l’obscurantisme.

“Les restrictions deviennent de plus en plus sévères”, regrette auprès de l’AFP Mmoi Mani, dénonçant le « silence énorme » de la communauté internationale. Pour le cinéaste, « les femmes afghanes n’ont pas reçu le soutien qu’elles méritaient ».

Depuis leur retour au pouvoir, les talibans ont instauré un « apartheid de genre » en Afghanistan, selon la terminologie de l’ONU.

Les femmes sont progressivement effacées de l’espace public : actuellement, les femmes afghanes ne peuvent plus étudier au-delà de l’école primaire, se rendre dans les parcs, les salles de sport, les salons de beauté, ou quasiment sortir de chez elles sans accompagnateur.

Une loi récente leur interdit même de faire entendre leur voix en public. Tout cela au nom d’une application ultra-rigoureuse de la loi islamique.

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PHOTO CHRIS PIZZELLO, PRESSE ASSOCIÉE

Malala Yousafzaï

Les talibans prétendent représenter la culture et la religion [de l’Afghanistan]même s’il ne s’agit que d’un petit groupe d’hommes qui ne représentent pas la diversité du pays.

Malala Yousafzai, productrice exécutive du documentaire

« L’Islam n’interdit pas à une fille d’apprendre, l’Islam n’interdit pas à une femme de travailler », rappelle cette militante pakistanaise que les talibans ont tenté d’assassiner alors qu’elle avait 15 ans.

Un courage incroyable

Tourné plus d’un an après la chute de Kaboul, le documentaire capture des moments d’incroyable bravoure.

« Vous avez fermé les universités et les écoles, autant me tuer ! » », dit une manifestante à un taliban qui la menace lors d’une manifestation.

Ponctué du slogan « Travail, pain, éducation ! » », ces rassemblements de femmes sont méthodiquement écrasés par le régime. Les manifestants sont battus, certains sont arrêtés, d’autres kidnappés.

Petit à petit, la résistance se fait plus discrète, sans pour autant s’éteindre : certaines femmes afghanes tentent désormais de s’instruire grâce à des cours clandestins.

Trois ans après leur arrivée au pouvoir, seule une poignée de pays comme la Chine et les Émirats arabes unis ont officiellement reconnu le gouvernement mis en place par les talibans.

Les diplomates internationaux protestent régulièrement contre le sort qu’ils réservent aux femmes, sans grand effet.

Au lendemain de l’élection de Donald Trump, les fondamentalistes ont indiqué qu’ils espéraient « ouvrir un nouveau chapitre » dans les relations entre Kaboul et Washington.

Mais renoncer à défendre les droits des femmes afghanes serait une grave erreur, selon Sahra Mani. Car moins les femmes afghanes sont instruites, plus leurs fils sont vulnérables à l’idéologie qui a donné naissance aux attentats du 11 septembre 2001.

« Si nous payons le prix aujourd’hui, vous risquez de payer le prix demain », lance le cinéaste aux Américains et aux Européens. « Les talibans continuent de prouver qu’ils restent les mêmes. »

 
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