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L’horreur universelle vient du Japon

Les habitants d’une ville sombrent dans la folie et sont torturés par une simple forme. C’est le pitch de Spiralele manga Junji Ito, récemment adapté en série animée – le premier épisode est sorti dimanche dernier sur HBO Max. Avec quatre ou trois autres épisodes comme un compte à rebours jusqu’à Halloween, cette adaptation continuera de faire découvrir l’univers de son auteur, génie de l’horreur.

Depuis TomPublié pour la première fois en 1987 au Japon, Junji Ito a multiplié ses œuvres, tantôt sous forme de séries en plusieurs volumes, tantôt sous forme de nouvelles. Toujours avec un style et des thèmes récurrents en commun : l’horreur cosmique qui surgit du quotidien et la déformation du corps. Allergique aux insectes, à l’infiniment grand et aux humains qui finissent écrasés, s’abstenir.

«On touche au grand chef-d’œuvre»

Et malgré le format manga, son œuvre n’invoque pas autant de codes de la culture japonaise. Pas de monstres folkloriques ni d’adaptations de légendes urbaines à l’horizon. « Junji Ito est universel, son travail est relativement intemporel », assure Anaïs Koechlin, co-fondatrice de Black Studio, qui traduit l’œuvre du mangaka en français. Nous approchons du grand chef-d’œuvre. C’est unique en son genre, mais pas particulièrement japonais. »

Visuellement aussi, Junji Ito utilise « un trait qui n’est pas caractéristique du manga : des lignes fines, peu de cadres, beaucoup de détails dans les fonds ». Ce dessin parfois très réaliste instaure une atmosphère lourde et intensifie les mutilations grotesques et terrifiantes des victimes de ses récits. Ce langage de la peur se traduit-il facilement à l’écran ? L’adaptation animée de Spirale prend également un parti pris esthétique. Plutôt que la colorisation numérique de la plupart des anime grand public, Studio Drive a choisi ici le noir et blanc, qui rappelle les mangas. L’animation a un rendu proche de la rotoscopie (transfert de plans réels), qui crée un subtil malaise lors des scènes calmes, et explose dans les moments d’horreur.

À un niveau très littéral, traduire Junji Ito comporte quelques difficultés. « Il est parfois passionné par des thématiques très complexes comme la physique quantique, donc ça demande un peu de recherche », précise Anaïs Koechlin. Et puis, il faut transmettre l’horreur sans tomber dans le ridicule. Il y a un côté très burlesque à entretenir sans pour autant être comique. » Son confrère lettreur, Martin Berberian, apporte par exemple un soin tout particulier aux onomatopées, très présentes dans le manga, et qui doivent traduire des sons parfois gores sans être fous et gêner le dessin.

Succès mondial

Cette traduction technique est une réussite qui confirme l’universalité de l’œuvre originale. « Cela dépasse tout ce que nous avions imaginé », confirme la traductrice. Mangetsu a vendu 5 000 à 10 000 exemplaires d’un album il y a quelques années, ce chiffre a été multiplié par dix depuis. » L’auteur est également populaire aux États-Unis, avec 1,5 million de volumes vendus dans le pays entre 2020 et 2022, selon l’organisation Circana Bookscan. Jeux vidéo avec Monde d’horreur à la mode grâce à des collaborations avec des marques comme Sanrio ou Hot Topic, son influence est désormais incontournable, tout comme Lovecraft.

A l’inverse, « Ito ouvre la porte à l’horreur japonaise dans le manga », résume Anaïs Koechlin. Son succès a également conduit à un regain d’intérêt pour d’autres mangakas, dont Kazuo Umezu, que Junji Ito lui-même cite comme Source d’inspiration. Dernière preuve de son statut de superstar s’il en est : il a été invité au festival d’Angoulême en 2023, et sera présent à la Japan Expo 2025.

 
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