Alanis Obomsawin au MAC

Le Musée d’art contemporain (MAC) rend hommage à la cinéaste activiste autochtone Alanis Obomsawin en présentant la rétrospective Les enfants ont besoin d’entendre une autre histoire. La presse a rencontré le prolifique artiste de 92 ans, dont le nom, prédestiné, signifie « éclaireur » en abénaquis.


Publié à 1h41

Mis à jour à 7h00

« Nous ne faisons pas un documentaire pour être loué. Si tu fais ça, je te plains. Il faut savoir au plus profond de son cœur pourquoi on fait ce qu’on fait, et dans mon cas, cela a toujours été pour vivre dans un monde meilleur, surtout pour nos enfants », a expliqué Alanis Obomsawin avec émotion.

La cinéaste militante et documentariste, qui a réalisé pas moins de 64 films pour l’Office national du film (ONF) depuis 1967, évoquait quelques instants plus tôt le tournage difficile de son film. Kanehsatake – 270 ans de résistanceréalisé en 1993, à la suite de quoi elle a essuyé de nombreuses critiques et insultes.

Cependant, Alanis Obomsawin n’a documenté que le tristement célèbre conflit avec l’armée canadienne. De plus, au fil du temps, l’opinion publique s’est ralliée à lui. Comment explique-t-elle ce revirement ?

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PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Œuvres visuelles créées par Alanis Obomsawin

« Durant toutes ces années, de nombreuses personnes, des dirigeants, ont œuvré pour apporter des changements et aussi pour montrer les injustices que nous subissions. […]ce que l’on ressent, des enfants qui sont toujours maltraités. Les gens sont mieux informés sur ces questions et, au fil des années, la situation s’est améliorée. »

Maintenant, j’ai 92 ans et je vois d’énormes changements. Je voyage partout dans le monde et je suis toujours heureux de revenir au Canada, qui est aujourd’hui en avance quant au respect qu’il témoigne à notre peuple. Je pense aussi que les Canadiens veulent qu’il y ait plus de justice. Alors je suis heureux, ça ne m’importe pas si je meurs demain…

Alanis Obomsawin

On se rend compte en parcourant la rétrospective qui lui est consacrée, tout ce qu’Alanis Obomsawin a fait dans sa vie avait un but : créer des ponts avec la population blanche en la sensibilisant à l’histoire des peuples autochtones et en corrigeant les mensonges qui circulaient à leur sujet. Tout cela dans le calme.

Dans un extrait de l’émission Prends 30diffusé en 1969 sur les ondes de CBC, un jeune activiste noir explique que la violence est le seul langage que les gouvernements comprennent et la seule façon de faire bouger les choses. Alanis Obomsawin la contredit et se dit convaincue de pouvoir « atteindre la conscience de l’homme blanc » de manière pacifique.

Est-elle toujours convaincue que la voie pacifique est la bonne voie à suivre ?

Je ne pense pas que la violence fasse avancer les choses. C’est à nous d’expliquer les choses. La violence est la haine. Voulons-nous vraiment enseigner la haine à nos enfants ? J’y suis allergique. Nous devons leur montrer de l’espoir et de l’amour. Et tu sais quoi ? Nous faisons beaucoup de progrès, même s’il reste encore des choses à faire.

Alanis Obomsawin

Comme on le voit bien dans l’exposition, Alanis Obomsawin a vécu plusieurs vies et porté plusieurs casquettes. De ses premières tournées dans les écoles où elle chantait et racontait des histoires indigènes à ses concerts de musique, sa vie de plasticienne et son parcours de documentariste, cette femme engagée a touché à tout.

Y a-t-il un de ces chapeaux qu’elle aimait davantage porter ? « Il y avait tellement de travail à faire et tellement de courage pour dénoncer les mensonges que j’ai utilisé toutes les plateformes possibles pour faire passer mon message. Mais avant de faire des films, je chantais dans les écoles, je racontais des histoires, et ça me faisait beaucoup de plaisir. »

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PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Dans son album Dame de Bushsorti en 1984, Alanis Obomsawin chante et raconte des histoires en plusieurs langues.

Tout au long de notre discussion, le sujet de l’éducation revient sans cesse. On se rend compte que dès son plus jeune âge, c’était son cheval de bataille.

Je me suis battu pendant 60 ans pour la même raison : un meilleur système éducatif. Ce système a été mauvais pendant plusieurs générations. Il m’a fallu plusieurs années pour comprendre pourquoi, les jours où j’avais mon cours d’histoire canadienne, j’étais battu. J’ai réalisé que nos livres étaient pleins de mensonges et de haine.

Alanis Obomsawin

Présentée à Berlin, Vancouver et Toronto, l’exposition Les enfants ont besoin d’entendre une autre histoire est divisé par décennie. On y découvre des extraits de films, des interviews, des photographies, des peintures, des dessins, des affiches et des coupures de journaux.

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PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Caroline Monnet, devant la murale qu’elle a réalisée à Place Ville Marie

À l’extérieur des locaux temporaires du MAC, au sous-sol de la Place Ville Marie, on peut voir une murale de Caroline Monnet, Wabigonqui signifie « Une fleur s’épanouit », réalisée en hommage à Alanis Obomsawin. Il s’agit du portrait de huit femmes autochtones qui sont des leaders dans leurs communautés, a-t-elle déclaré.

« J’ai voulu mettre en valeur tous les bourgeons qu’elle a réussi à semer au cours de sa carrière et l’impact qu’elle a eu sur moi, mais aussi sur toutes les femmes que j’ai photographiées », explique Caroline Monnet.

Jusqu’au 26 janvier 2025 au MAC temporaire, au 4, Place Ville Marie

Visitez la page de l’exposition

 
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