l’éternel retour des vampires de Stephen King

l’éternel retour des vampires de Stephen King
l’éternel retour des vampires de Stephen King

Troisième adaptation de l’un des meilleurs romans, sinon le meilleur, de Stephen King, Le terrain de Salem raconte comment un homme visitant la petite ville de son enfance la découvre sous le joug d’un vampire. Longtemps en gestation au studio Warner Bros, ce film de Gary Dauberman s’est achevé en 2022 en vue d’une sortie en salles prévue en septembre de la même année. « Tablette » depuis deux ans, Le terrain de Salem sera plutôt publié directement sur la plateforme Max, société mère de Warner. Au Québec, Crave prend le relais. Sachant tout cela, il y avait lieu de craindre le pire. Ni une réussite ni l’échec attendu, le film donne surtout envie de revisiter les deux précédentes adaptations et de relire le roman. Et pourquoi pas ?

Stephen King a publié Le terrain de Salem en 1975, plus d’un an après le succès surprise de son premier roman, Carrie. L’intrigue tourne autour d’un écrivain, Ben, lors d’un séjour dans la commune semi-rurale où il est né : Jerusalem Lot, dite Salem’s Lot. Enfant, Ben a vécu un épisode terrifiant dans le vaste et sombre manoir qui surplombe la ville : Marsten House.

Avec un passé sombre, la propriété attire le mal comme un aimant, croit désormais Ben. Il se méfie donc immédiatement du nouveau propriétaire, un certain M. Barlow, maître de ces pièces mystérieuses sur lesquelles personne n’a encore posé les yeux. Bientôt, Mark, enfant du coin, rejoindra Ben dans sa lutte contre l’épidémie de vampirisme qui déferle sur la ville.

Le roman contient de nombreux passages puissamment évocateurs, comme celui-ci : « Marchant lentement pour éviter de faire craquer le parquet, il se dirigea vers la porte et resta un instant immobile. La quintessence de toutes les terreurs humaines, pensa-t-il. Une porte autrefois fermée, désormais entrouverte. »

Plusieurs figures et motifs devenus par la suite récurrents dans l’œuvre de King sont rassemblés dans Le terrain de Salem : un écrivain protagoniste, l’idée du retour à la maison, les traumatismes liés à l’enfance qui hantent le présent, un enfant qui combat une manifestation du mal, la petite ville attaquée de l’intérieur par un mal insidieux…

King a été influencé par deux éléments distincts, l’un sociopolitique et l’autre narratif. D’abord, l’auteur connaît alors, comme des millions d’Américains, une profonde désillusion : le scandale du Watergate, la découverte des « White House Tapes » et la stagnation partisane au Vietnam donnent l’impression d’une démocratie « attaquée de l’intérieur ».

À l’époque, gagnant sa vie comme enseignant suppléant, King avait également inclus le roman Draculapar Bram Stoker. Dans son (indispensable) essai En écrivant. Souvenirs d’un métierKing se souvient s’être demandé à l’époque : « Et si les vampires envahissaient une petite ville de la Nouvelle-Angleterre ? » »

La réponse fut Le terrain de Salemavec en prime une allégorie sociopolitique en sous-texte.

Les deux mini-séries

Face au succès du roman, Warner Bros en a (déjà) immédiatement acquis les droits dans le but d’en faire un film. Aucun scénario n’étant jugé satisfaisant, le studio a accepté la proposition du producteur Richard Kobritz, qui a eu l’idée d’une mini-série en deux épisodes de 90 minutes chacun, en association avec la chaîne CBS.

Grâce au succès de son film Massacre à la tronçonneuse au Texas (Massacre à la tronçonneuse au Texas), Tobe Hooper a été embauché. Sa production s’est révélée très inspirée, bien supérieure à ce qui se faisait à la télévision à l’époque : impossible d’oublier ces apparitions nocturnes d’enfants vampires enveloppés de brume, flottant à la fenêtre. Les directions photo et artistiques, notamment dans le dernier acte dans Marsten House, une maison qui semble pourrir sur ses pieds, ont contribué à ce succès.

Diffusée en 1979 et dotée d’un casting formidable (David Soul, Bonnie Bedelia, James Mason), cette première adaptation a très bien vieilli (seuls les brefs arrêts sur image précédant les espaces publicitaires obligatoires sont datés). De plus, la version de Hooper propose un Barlow terriblement différent du roman. Interprété par Reggie Nalder, ce vampire qui ne dit pas un mot tout au long de la mini-série a été conçu pour ressembler au comte Orlok dans Nosferatude FW Murnau, adaptation illégitime de Dracula : tout est dans tout.

Il est intéressant de noter que la mini-série a été si bien accueillie qu’une version abrégée a été diffusée en salles en Europe (le film de 2024 sera projeté dans quelques salles en Angleterre et en Irlande).

En 2004, la chaîne TNT reprend le format mini-série pour, là encore, une durée totale de trois heures. Là encore, il s’agissait d’une production au budget conséquent et au générique bien fourni (Rob Lowe, Samantha Mathis, Donald Sutherland). Réalisateur qui a fait ses armes en réalisant quelques épisodes de la série Bande de frères (Frères d’armes), Mikael Salomon s’est vu confier le projet.

Si elle reprend certains passages du roman absents de la version de 1979 (les enfants vampires dans le bus scolaire), la version de 2004 n’en a ni le charme vénéneux, ni l’ambiance gothique. Joué par Rutger Hauer, ce Barlow n’a rien de effrayant.

Le film 2024

Et le film de Gary Dauberman ? Comme cela a été dit, cela fait à peine le travail. Il faut dire que Dauberman, scénariste de la trilogie Annabelledont il a réalisé le troisième volet, et co-scénariste du diptyque Il (Que), basé sur un autre roman de Stephen King présentant de nombreuses similitudes avec Le terrain de Salema de l’expérience dans le cinéma d’horreur commercial.

Son scénario s’apparente à un résumé studieux, mais simpliste, avec quelques libertés tantôt astucieuses, tantôt discutables. Inexplicablement, Dauberman sous-utilise Marsten House et la vide de sa charge maléfique : une erreur.

Il y a aussi quelque chose de mécanique dans le déroulement : ponctué d’ellipses maladroites, le récit ne respire pas, et de nombreuses situations semblent précipitées. C’est comme si on avait compressé un montage initialement plus long. Hormis le jeune Mark (Spencer Treat Clark, une véritable révélation), qui devient un héros improbable aux côtés de Ben, les personnages manquent de profondeur.

Le film, en revanche, s’annonce plutôt bien : le voyage à travers les bois au crépuscule des jeunes frères Glick, magnifiquement sinistre, s’apparente au théâtre d’ombres chinois. Lors des scènes de nuit, la direction photo de Michael Burgess (Malin / Mal) insuffle les notes macabres requises. Le film aurait-il mérité une sortie en salles ? De manière générale, l’horreur est payante et, dans le genre, on a vu bien pire. Avec ou sans vampire.

Le film Le terrain de Salem apparaîtra sur Crave le 3 octobre. La mini-série de 1979 est disponible sur Blu-ray et sur iTunes et la mini-série de 2004 sur DVD et sur le Microsoft Store.

Le Lot de Salem (VO)

★★ 1/2

Horreur de Gary Dauberman. Scénario de Gary Dauberman. Avec Lewis Pullman, Makenzie Leigh, Spencer Treat Clark, Bill Camp, Pilou Asbaek, Alfre Woodard, William Sadler. États-Unis, 2024, 113 minutes. Sur Crave à partir du 3 octobre.

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