critique d’un remake sans un mot dit

Ne dites pas de mal, ne dites pas de remake

L’astuce n’est pas nouvelle et peut s’avérer plus que rentable. On se souvient du succès des remakes de J-Horror dans les années 2000, comme Anneau, La rancune ou dans une moindre mesure Eau sombre. Cela peut aussi donner de gros navets qui se contentent de recracher sans digérer, voire sans comprendre. Qui se souvient En quarantaine, L’oeil, Bonne nuit maman Ou À l’intérieur ? Jason Blum s’en est déjà mordu les doigts, lui qui a produit l’atroce remake de Martyrs en 2015.

Il ne prend cependant pas trop de risques avec Ne dis rienun sommet de malaise orchestré par Christian Tafdrup qui ferait passer le dîner de Le Bureau pour une séance de méditation. Pendant une bonne heure, Ne dis pas de mal reprend presque tel quel et dans l’ordre ses scènes les plus marquantesIl s’agit toujours de deux petites familles qui se rencontrent. L’une va inviter l’autre à passer un week-end chez elle. Un bon moment a priori, sauf que l’hospitalité de ce couple d’hédonistes peut parfois se révéler plus que gênante.

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Famille moderne

Il y a quelques changements bienvenus ici et là (la peluche qui n’est plus qu’un simple McGuffin), mais c’est globalement la même chose. Comme souvent dans ce genre de cas, ceux qui ont vu le premier film s’ennuieront à mourir, les autres apprécieront une histoire finalement très astucieuse, exploitant ces moments d’inconfort qui caractérisent les interactions humaines, les fissures sociales sur la façade polie de la petite famille proprette. A l’image de son modèle, Ne dis pas de mal révèle ce que cache la politesse quotidiennedans un geste finalement très critique.

Au moins jusqu’à la dernière demi-heure. Et c’est là que le film rencontre le même problème que dans Martyrs :évidemment, les spécifications hollywoodiennes ne permettent pas à Blum de recycler l’extrémisme cynique de Ne dis rien et sa fin très méchante. A l’entrée du dernier acte, elle bifurque. L’occasion de s’éloigner enfin un peu des enjeux de l’original… vers une invasion de domicile classique, typique de l’écurie Blumhouse.

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Oui, c’est une image promotionnelle officielle

Mode lumière

Ne dis pas de mal est très caractéristique du modèle de remake américain. Plus agressif que l’œuvre dont il s’inspire, il ne s’en détache réellement que lorsqu’il est contraint d’en adoucir un peu les aspects les plus piquants.. En y ajoutant quelques canons de Tchekhov et en alourdissant le passé de ses personnages, il traite cette histoire avec beaucoup moins de subtilité, d’autant qu’en face, James McAvoy reprend le rôle du psychopathe charismatique qui avait fait le succès de Diviserà mille lieues de la fausse normalité dérangeante de Fedja Van Huet.

Encore une fois, c’était le sujet de l’original : le vide des révérences ordinaires et des amitiés superficielles. Jouer le plus intelligemment, un peu plus artificiel, Le remake préfère cependant régulièrement l’extraordinaire à l’ordinaire.Surtout lorsqu’il s’agit de donner son twist, qu’une scène coupée au montage gâche à l’avance (bonus : elle est dans la bande-annonce). Et si le personnage de Paddy donne effectivement la réplique finale révélatrice, il ne le fait pas du tout dans le même contexte, ce qui en diminue les implications.

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Un dîner presque parfait

Et puis il y a bien sûr la fin, qui s’écarte donc du scénario danois non pas pour se réapproprier ses idées, mais pour esquiver sa conclusion nihiliste. La dernière demi-heure vise l’efficacité plutôt que la pertinence. Bien que le long climax ressemble à l’horreur américaine habituelle, il a le mérite d’être très bien exécuté. C’est l’intérêt d’avoir recruté James Watkins, un réalisateur plus que compétent qui avait percé avec Lac Eden en 2008.

C’est tout ce que l’on retiendra de cette reprise américaine : une reprise édulcorée, mais pas paresseuse du tout, qui compense tous ses défauts par une technique impeccable. Une maigre pitance pour ceux qui ont vu l’original, mais un film qui risque de faire son petit effet sur d’autres (de facto bien plus nombreux). Même si on ne peut que leur conseiller de commencer par la version 2022.

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