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Je planifie mon renouvellement de prêt hypothécaire. Pourquoi l’écart entre le taux préférentiel (5,95 % lundi dernier) et le taux directeur (3,25 %), publié par la Banque du Canada, est-il si important ? L’écart ne devrait-il pas se situer autour de 1 % plutôt que de 2,7 % ?
Julie, from Rosemère
Question très intéressante. Présentons d’abord les faits : quel est l’écart habituel entre les taux préférentiels offerts par les institutions financières, tels que compilés par la Banque du Canada, et le taux directeur ? Voici un premier tableau qui décrit l’évolution des deux taux depuis 2000.
Evidemment, les deux taux se suivent d’assez près. Voici l’évolution de l’écart en points de pourcentage, toujours depuis 2000.
En moyenne, comme on peut le constater, l’écart au cours des 24 dernières années a été de l’ordre de 2 points de pourcentage et non de 1 point. A six reprises, quatre fois en 2020 et deux fois en 2024, il a atteint un sommet à 2,7 points. Le plus petit écart, 1,2 point, a été enregistré le 13 juillet 2022.
Maintenant que les statistiques ont été examinées, posons-nous la vraie question : que signifient ces taux pour les gens ordinaires ?
Le taux directeur, établi par la Banque du Canada 8 fois par année, est le taux d’intérêt que les banques et les coopératives de crédit se facturent mutuellement pour équilibrer leurs comptes en fin de journée. Ce sont les prêts les moins risqués, « quasiment cash », résumés en février 2024 dans La presse Jean Boivin, ancien sous-gouverneur de la Banque du Canada1.
Ce taux directeur se situe actuellement dans la fourchette inférieure la plus fréquemment citée, à savoir 3,25 %. Toute institution financière qui souhaite réaliser des bénéfices doit prêter à un taux plus élevé.
Un simple « marqueur »
Or, quel est le taux préférentiel ? Contrairement à ce que son nom l’indique, il ne s’agit pas forcément du taux que les institutions financières accordent à leurs meilleurs clients. « Le taux préférentiel sert de référence aux institutions financières lorsqu’elles fixent le taux d’intérêt variable des prêts qu’elles offrent », explique Jean-Benoit Turcotti, porte-parole du Mouvement Desjardins. Les institutions financières sont libres de définir leur propre taux préférentiel, « mais elles ont tendance à le fixer au même niveau », explique-t-il.
Le taux préférentiel ne dicte pas le taux d’intérêt qu’un client obtiendra pour un prêt personnel ou une hypothèque, rappelle Jean-Michel Klinkow, vice-président spécialiste des prêts hypothécaires à la Banque de Montréal (BMO). « L’important c’est qu’il faut comprendre que cela reste une référence. Il faut vraiment parler du tarif final dont bénéficiera le client. »
C’est évidemment ce « taux final », et non le taux préférentiel, qui dictera le montant des remboursements d’un prêt ou la pénalité en cas de modification d’un prêt avant terme.
Par exemple, au moment d’écrire ces lignes, Desjardins et la Banque de Montréal avaient un taux préférentiel de 5,45 %. Pour les prêts hypothécaires, les offres affichées par Desjardins comprennent par exemple un prêt fermé à taux fixe sur 4 ou 5 ans de 4,69 %, ainsi qu’un prêt ouvert à taux variable d’une durée de deux ans de 6,70 %. Chez BMO, les taux affichés varient de 4,59 % pour un prêt hypothécaire à taux fixe sur 5 ans à 7,15 % pour un taux variable ouvert sur trois ans.
Curieusement, les taux d’intérêt des prêts à taux variable sont généralement plus élevés que ceux des prêts à taux fixe. Les Canadiens étaient habitués au contraire.
“C’est mon 14e année avec BMO, et c’est ce que nous avons constaté au cours des deux dernières années », note M. Klinkow. Il est prudent lorsqu’on lui demande des explications. S’agit-il simplement d’une question d’offre et de demande, les taux variables étant plus populaires lorsque les taux d’intérêt sont attendus en baisse ?
«Je laisse à nos économistes internes et à nos spécialistes des prix le soin de l’expliquer», répond-il. Votre supposition est-elle possible ? Absolument. Ce que j’aime rappeler aux clients, c’est de se concentrer, de se préparer, d’aller à la banque et de négocier en fonction de leur situation. C’est étonnant, d’une banque à l’autre, d’un client à l’autre, on peut se retrouver avec un taux tout à fait différent. »
1. Lisez « Pourquoi les prêts hypothécaires suivent-ils le taux préférentiel ? » »
Consultez notre rubrique « Démystifier l’économie »
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