À un mois de l’entrée en fonction du futur président des États-Unis, Donald Trump, tous les regards sont tournés vers la Fed. Le Comité de politique monétaire (FOMC) de la Réserve fédérale, qui se réunit mardi et mercredi, devrait réduire les taux directeurs de la banque centrale de 25 points de base, ramenant les taux cibles entre 4,25 et 4,5 %.
Et après ? « Nous entrons dans le monde de l’imprévisibilité, car personne ne sait aujourd’hui ce que va réellement faire le président Donald Trump et il n’est pas certain qu’il le sache vraiment lui-même »» dit, perplexe, Anton Brender, économiste en chef chez Candriam.
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« Le retour de Trump nous conduira vers des trajectoires de politique monétaire plus contraintes que prévu aux Etats-Unis et ce sera l’élément clé pour lire 2025 »acquiesce Philippe Dauba-Pantanacce, économiste chez Standard Chartered. Car, à l’heure où Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE) annonce de nouvelles baisses de taux, la trajectoire semble bien moins accommodante outre-Atlantique.
Une approche plus restrictive que prévu
“Nous n’attendons que deux baisses de taux de la Fed, de 25 points chacune, dont celle de décembre”anticipe Gilles Möec, économiste en chef chez AXA Investment Managers (IM), une projection moins accommodante que le consensus de marché qui table sur 3,5% en 2025.
« Tout en restant plutôt positives sur les Etats-Unis en 2025, nos prévisions de croissance sont en revanche nettement inférieures au consensus pour 2026. Pour deux raisons : la toxicité du programme de Donald Trump va commencer à se faire sentir, avec une accélération de « l’inflation », mais la raison principale est l’orientation de la Fed qui ne pourra pas continuer à baisser les taux. »continue-t-il.
Dès l’élection de Donald Trump, et avant qu’il n’agisse quoi que ce soit, les marchés ont révisé à la hausse d’environ 100 points de base leurs attentes quant à une baisse des taux de la Fed au cours des deux prochaines années. Le président était censé, dans l’esprit des investisseurs, « stimuler » la croissance par ses réductions d’impôts et la déréglementation de certains secteurs, comme la technologie, le pétrole et la banque, et non par un retour de l’inflation.
Et pourtant. Comme le note Gilles Moëc, “Une ligne de résistance se dessine concernant l’inflation américaine, qui serait évidemment amplifiée par la politique largement inflationniste de Trump.”
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Idéologie ou pragmatisme
Dans ce contexte, la Fed devrait rester prête à évaluer la politique économique et budgétaire mise en œuvre par la nouvelle administration. En apparence, le programme 2.0 de l’administration Trump a été bien expliqué pendant la campagne présidentielle. Les premières nominations, dont celles de la famille Trump à des postes d’ambassadeurs, donnent l’impression d’un gouvernement composé d’idéologues radicaux, convaincus du bien-fondé de ce programme. Seule la nomination du financier Scott Bessent au Trésor pourrait rassurer, même si ce dernier entend faire payer à l’Europe le (lourd) prix de la protection militaire américaine.
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Si Donald Trump devait mettre en œuvre toutes ces promesses électorales, la facture pourrait cependant être lourde pour l’économie américaine.
“Dans ce scénario, la Fed serait contrainte d’arrêter de baisser les taux pour tenter d’endiguer une dérive à la hausse des salaires, voire de relever les taux si le marché du travail devait à nouveau se resserrer”, dit Anton Bender.
Pour mémoire, Donald Trump propose de relever les droits de douane à un niveau de protection équivalent à celui de 1929 et d’expulser 9 à 10 millions de migrants illégaux. Cependant, le marché du travail apparaît déjà tendu avec environ 150 000 entrées par mois, et déjà réduit à 50 000 depuis l’été. Sans oublier sa promesse d’augmenter la production d’hydrocarbures (schiste) de 3 millions de barils/jour, un objectif irréaliste avec le prix du baril étant « bon marché », autre engagement du Républicain.
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Quant aux mesures fiscales, la simple prolongation des mesures existantes (et donc sans relance de la croissance) coûterait déjà 5 000 milliards de dollars sur dix ans. C’est sans doute pour cela que Donald Trump souhaite démanteler les plans de soutien de son prédécesseur Joe Biden, voire augmenter les droits de douane, rien que pour financer ses baisses d’impôts.
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Restaurer la force
“Le pire n’est jamais le plus certain”, nuance Anton Bender. L’ampleur des différentes mesures préconisées par Trump peut varier considérablement et affecter l’économie à des degrés divers. Dans un scénario « soft » (campagne de droits de douane, arrêt de l’immigration clandestine, soutien fiscal modéré), “La Fed ne devrait pas changer radicalement le cap de sa politique et continuer à baisser ses taux jusqu’à 3,5% en 2025”, avance l’économiste.
“Il y aura une opposition entre la vision des idéologues et une vision plus pragmatique, avec un Donald Trump capable d’absorber, ou non, des coûts économiques qui deviendraient très vite des coûts politiques”, analyse Philippe Dauba-Pantanacce.
D’autant que, très vite, le nouveau président devra préparer les prochaines élections de mi-mandat de novembre 2026, rarement favorables au président élu. ” Il y aura sans doute une exécution séquentielle : toute la question est de prédire quand il y aura un changement de cap »» demande l’économiste Standard Chartered, responsable des recherches économiques sur la géopolitique mondiale.
Une chose est sûre : Donald Trump n’aime pas voir la bourse chuter. Si les taux restent élevés, voire si les taux à 10 ans s’envolent vers 5%, les valeurs américaines, déjà valorisées bien au-dessus de leur moyenne historique, notamment dans le secteur Tech (surévaluées de 35%, selon les estimations de Natixis IM), risquent de chuter. , s’en attribuant le mérite dans son sillage. Wall Street sera peut-être la seule force à rappeler Donald Trump.
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