« Si le président Trump vous demandait de démissionner, partiriez-vous ? « Non » « Ne pensez-vous pas que vous seriez légalement obligé de partir ? « Non » Jerome Powell, le président de la Fed, a répondu sèchement lorsque ces questions lui ont été posées après la nouvelle élection de Donald Trump. Depuis son premier mandat, le président américain ne cesse d’attaquer verbalement les dirigeants de la Fed. Il estime qu’il doit être impliqué dans les décisions de politique monétaire et, en tant qu’homme d’affaires, avoir un meilleur instinct que les dirigeants de la Fed. Le temps nous dira comment se déroulera le nouveau mandat de Donald Trump. Cependant, il est clair qu’attaquer une banque centrale est une mauvaise idée, car qui veut des prix stables a besoin d’une banque centrale indépendante. Il suffit de se tourner vers la Turquie ou le Venezuela pour s’en convaincre : les chefs d’État de ces pays ont détourné la politique monétaire et provoqué une inflation galopante. Heureusement, nous en sommes loin en Suisse. Sauf si?
La Banque nationale suisse (BNS) est également régulièrement la cible de critiques politiques. Une analyse des objets parlementaires déposés depuis 2014 montre que tous les partis souhaitent avoir leur mot à dire sur la politique monétaire. Mais ce sont de loin le Parti socialiste et les Verts qui lancent le plus d’attaques. Ils sont à l’origine de plus de la moitié des interventions contre le BNS. Celles-ci portent sur l’utilisation du bilan, les nouvelles missions (notamment dans le domaine environnemental) ou encore la composition du directoire. Il est assez ironique que les hommes politiques remettent en question la compétence de la BNS en matière d’utilisation intelligente du bilan, alors que cette même institution est soudainement considérée comme un acteur clé dans les questions environnementales.
Une évaluation des objets largués au fil du temps montre que les attaques visant le BNS sont des réactions aux événements actuels. Lorsque la BNS a relevé le taux plancher et introduit des taux d’intérêt négatifs en 2015, le mandat et l’utilisation de taux d’intérêt négatifs ont été soudainement remis en question au Parlement. Lorsque des dépenses publiques élevées ont été annoncées en raison de la pandémie de COVID-19, elles ont soudainement dû être financées par des fonds de la Banque nationale. De nombreux acteurs politiques ont avant tout un objectif : étendre leur sphère d’influence à la politique monétaire. Le pouvoir de la politique monétaire, dont les décisions ont un impact sur l’économie comme peu de questions traitées au Parlement, est tout simplement trop tentant. Et c’est cette tentation qui, tout au long de l’histoire, a régulièrement conduit à imprimer de la monnaie et à alimenter l’inflation.
On voit que pointer les États-Unis du doigt est exagéré. De nombreux acteurs politiques, notamment à gauche de l’échiquier politique, souhaitent exploiter le BNS. Toutefois, la mise en œuvre de ces objets aurait également un effet négatif sur la stabilité des prix en Suisse. Si par exemple la Banque nationale était chargée de missions environnementales, l’objectif de stabilité des prix perdrait de son importance et le bilan ne serait plus géré selon les principes de la politique monétaire. Si, sous la pression politique, les dépenses publiques étaient financées par la BNS, la stabilité des prix céderait bientôt la place à la maximisation des profits. Le récent dossier politique s’intéresse à ce « musée des horreurs ».
Une restriction de l’indépendance des banques centrales – que ce soit aux États-Unis ou en Suisse – serait fatale. Gardons-nous d’être arrogants lorsque nous commentons les attaques de Donald Trump contre la Réserve fédérale américaine, car en Suisse aussi, certains tentent d’exploiter la politique monétaire. Et c’est là que nous pouvons agir : nous devons rejeter haut et fort les attaques des politiciens contre la BNS.
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