«Cette ‘diplomatie détournée’ montre que les Russes restent très prudents»
Le Kremlin contre-attaque donc, avec le dernier ajout à son artillerie. À première vue, cela ressemblait à une escalade significative du conflit ukrainien, susceptible de provoquer une réaction de la part des alliés. Mais, comme l’explique le colonel interrogé par HLN, la Russie a pris des mesures pour éviter de gêner les États-Unis. “Les Américains savaient déjà un jour avant l’attaque russe que quelque chose allait arriver et ont temporairement évacué leur ambassade à Kiev”, a-t-il détaillé. « Une demi-heure avant le lancement du missile, les Russes ont même prévenu les Américains. Moscou voulait ainsi éviter que toutes les alarmes nucléaires ne se déclenchent à Washington. Cette « diplomatie détournée » montre que les Russes restent très prudents. » Cette situation illustre bien, selon le spécialiste belge de la défense, à quel point Moscou ne souhaite pas une escalade avec l’Occident. Et ne risquerait donc pas de toucher un objectif européen.
Cependant, il a admis que les calculs concernant la vitesse à laquelle l’Orechnik pourrait atteindre notre pays étaient corrects. « Ce missile pourrait toucher Bruxelles en une quinzaine de minutes. Cela vaut aussi pour Londres ou Paris», postule-t-il dans les colonnes de HLN, arguant toutefois que les Américains seraient informés dans la seconde qui suivrait le tir du missile. « Il faut ensuite cinq secondes aux puissants ordinateurs américains pour déterminer le type de missile. Deux minutes plus tard, ils savent dans quelle direction il se dirige. Une minute supplémentaire leur suffit pour avertir leurs alliés. Donc si un missile est en route vers Bruxelles, on le saura environ trois minutes après son lancement (…) Mais on ne pourrait presque rien faire. Nous ne disposons pas nous-mêmes de défense aérienne et les systèmes classiques allemands, français ou américains ne sont pas disponibles. pas efficace contre un missile balistique hypersonique. Il a toutefois précisé que l’Orechnik pourrait effectivement être intercepté par deux types de défense aérienne très coûteux utilisés par les Israéliens et les Américains. Ce dernier, appelé système THAAD, serait actuellement présent sur le sol polonais, mais ne couvrirait qu’une zone limitée.
« L’Occident craint la chute de Vladimir Poutine. C’est choquant »
Vladimir Poutine et les armes nucléaires
Comme le colonel Roger Housen, Tanguy Struye s’est voulu rassurant. Dans un entretien à La Libre ce samedi, le professeur de Relations internationales à l’UCLouvain et chercheur associé à l’Institut Egmont a estimé qu’il ne fallait pas craindre un attentat mais que la situation électrique pourrait facilement dégénérer. « Nous sommes dans une phase de bluff, de surenchère. Nous devons le contrôler, sinon nous risquons de nous retrouver avec des interprétations biaisées et une escalade du conflit. C’est pourquoi l’Occident ne doit pas adopter une posture réactive sans connaître les faits exacts », a-t-il prévenu.
La semaine dernière, Moscou a également modifié sa doctrine nucléaire. “Parmi les conditions justifiant le recours à l’arme nucléaire figure le lancement de missiles balistiques contre la Russie”, selon ce décret. Et, compte tenu de l’utilisation de missiles britanniques et américains par l’Ukraine pour frapper la Russie, se pose la question d’un éventuel recours à l’arme nucléaire par la Russie contre ces deux pays. Mais, pour Tanguy Struye, Vladimir Poutine n’est pas du tout dans cette logique pour le moment. «Il sait très bien que Trump arrive au pouvoir le 20 janvier et que cela pourrait changer la donne. Peut-être voit-il enfin une opportunité d’obtenir tout ce qu’il veut : tout le Donbass, la Crimée… Mais je ne veux pas dire qu’il faille sous-estimer et rejeter l’utilisation d’armes tactiques.»
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