ÔLes raisons du succès de Donald Trump seront longuement discutées. Comment une majorité d’Américains a-t-elle pu voter pour le retour à la Maison Blanche d’un homme qui, quatre ans plus tôt, affichait son mépris total pour les fondements mêmes de la démocratie ?
« C’est l’économie stupide ! » : la réponse, régulièrement répétée depuis la campagne victorieuse de Bill Clinton contre George HW Bush [en 1992]semble confirmé par la multitude de sondages et d’enquêtes d’opinion publiées depuis des mois. Encore faut-il comprendre comment la hausse du prix des œufs a pu pousser de nombreux Américains à élire à la présidence un homme qui pourrait transformer demain les Etats-Unis en une véritable ploutocratie ?
Car, à bien y regarder, l’économie américaine est loin d’être mauvaise. La générosité du budget fédéral a permis à l’activité de reprendre fortement après la pandémie. L’inflation, qui avait elle aussi bondi, est sur le point d’être maîtrisée. Pour y parvenir, la Réserve fédérale n’a pas eu besoin de provoquer une récession : depuis deux ans, la croissance reste solide et le chômage proche de son plus bas.
Revenu désespérément faible
Mais le niveau des prix n’a pas baissé, celui des produits alimentaires notamment. Il en va de même pour les prix de l’immobilier, qui ont été poussés à la hausse par la faiblesse des taux d’intérêt à la fin de la dernière décennie. Quant aux loyers, ils ont explosé sous l’effet des changements de modes de vie liés à la pandémie, de l’afflux de migrants et des insuffisances de l’offre. C’est clair : sous la présidence de Joe Biden, les conditions de vie quotidienne sont devenues plus dures pour de nombreux Américains.
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Que des usines aient été construites dans les secteurs d’avenir à des rythmes jamais vus, que les salaires des emplois les moins bien payés aient rarement augmenté aussi vite, que le taux de chômage des Noirs n’ait jamais été aussi proche de celui des Blancs ne change rien à une réalité. : les revenus d’une grande partie des ménages américains restent désespérément bas, tandis que la richesse d’une petite minorité, tirée par la hausse continue des cours boursiers, n’a jamais été aussi élevée. Après plusieurs décennies de capitalisme largement livré à lui-même, les retombées promises se font plutôt au compte-goutte et la prospérité de l’économie est de moins en moins partagée.
Ce creusement des inégalités a contribué à une profonde érosion de la cohésion sociale, érosion encore aggravée par la qualité, elle aussi encore très inégale, de l’éducation et des soins de santé auxquels ont accès les Américains. Cette qualité reflète le prix, lui aussi très inégal, que la démocratie américaine accorde à la vie de ses citoyens.
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