Un accord a été trouvé dans la soirée du jeudi 14 novembre pour soutenir le maintien dans l’emploi des salariés les plus expérimentés. Elle doit encore être validée par suffisamment d’organisations et doit être transposée dans la loi pour être pleinement appliquée. Un autre accord surprise revient sur la limitation des mandats syndicaux.
C’était, selon les syndicats, le sujet qui aurait dû être abordé avant même d’envisager un quelconque report de l’âge légal de la retraite. Pourtant, cela fait plus d’un an que la réforme entérinant l’âge légal de 64 ans est entrée en vigueur, et l’emploi des seniors est en baisse même si un consensus s’est établi autour de son taux insuffisant en France (58,4 % des personnes âgées de 64 ans). 55 à 64 ans étaient salariés en 2023). Gouvernement, patronat et syndicats s’étaient mis d’accord pour mettre le sujet au menu d’une négociation interprofessionnelle sur un « pacte de vie au travail », mais celle-ci a échoué au printemps dernier.
Début octobre, la nouvelle ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, a donné une nouvelle chance aux acteurs d’avancer en leur demandant de reprendre les discussions. Et cette fois, l’issue devrait être positive, puisque la délégation de la CFDT, premier syndicat de France, donnera un avis favorable à cet accord devant ses autorités, qui se prononceront jeudi 21 novembre. Idem pour la CFTC, qui le trouve “équilibre”. Les deux syndicats s’accordent cependant sur le fait qu’il n’y a là rien de révolutionnaire, mais “La CFDT n’a jamais prétendu qu’elle résoudrait tout”, souligne Yvan Ricordeau, son numéro 2. Il ne faut surtout pas rater cette occasion de démontrer que ce que l’on appelle le dialogue social n’a rien perdu de sa pertinence, surtout alors que le jeu politique traverse une phase tumultueuse. . Pour que Jean-François Foucard, le négociateur de la CFE-CGC, délivrera aux autorités de son syndicat un avis favorable sur l’accord, même s’il estime que la négociation a “a raté son objectif principal”. Quant à FO, elle réserve sa décision à une évaluation globale, lundi 18 novembre, des bilans issus de cet accord mais aussi de celui sur l’assurance chômage. Plus sévère que les autres, la CGT le voit « de petits gains mais pas de gros ».
Négociations tous les trois ans dans les succursales et certaines entreprises
Parmi ceux-ci «petits gains», l’une des avancées les plus concrètes pour les salariés réside dans la retraite progressive, un système actuellement sous-exploité : à peine 27 000 personnes en bénéficiaient fin 2023. Son principe est séduisant, puisqu’il permet à un salarié de se déplacer à temps partiel. en percevant une pension de retraite pendant les jours non ouvrés. Cependant, une de ses limites réside dans le fait qu’il est nécessaire d’avoir l’onction de son employeur. Aussi, l’un des objectifs des négociations, du côté syndical, était d’établir un « droit exécutoire » une retraite progressive activable dès 60 ans, alors que cet âge est censé évoluer au même rythme que celui de la retraite après la réforme de 2023. Une demande réfutée par le patronat et le gouvernement de Gabriel Attal lors des négociations sur le « pacte de vie au travail ».
Cette fois, le gouvernement de Michel Barnier s’est montré prêt à ménager des marges de manœuvre budgétaires pour financer l’expansion des retraites progressives. Mais le patronat refuse l’idée qu’elle soit « opposable ». Le compromis trouvé consiste donc à préciser qu’un refus de l’employeur doit être « justifié par l’incompatibilité de la durée de travail demandée par le salarié avec l’activité économique de l’entreprise ». « Les salariés auront donc le droit de se voir refuser la retraite progressive à 60 ans plutôt qu’à 62 ans. » résume Sandrine Mourey, de la CGT. L’accord prévoit qu’une réunion de “dernière partie de carrière”, dans les deux années précédant l’âge de 60 ans, permet d’aborder en amont le sujet de la retraite progressive. Globalement, il ne faut pas s’attendre à une révolution, d’autant que le système prévoit toujours qu’il faut avoir cotisé 150 trimestres, soit 37,5 ans, pour l’activer.
Retraite imposée à l’âge du taux plein
D’autres mesures vont dans le sens des organisations syndicales, comme l’obligation de négocier tous les trois ans “sur l’emploi et le travail des seniors” dans les secteurs professionnels ainsi que dans les entreprises d’au moins 300 salariés. Le texte prévoit également un entretien de mi-carrière suite à la visite médicale déjà prévue à 45 ans, permettant « aborder l’adaptation ou l’aménagement des missions et des postes de travail, la prévention des situations d’usure professionnelle, les éventuelles volontés de mobilité ou de reconversion professionnelle ».
Ci-contre, la principale devise des employeurs s’appelle « contrat de valorisation de l’expérience ». Autrefois appelé « contrats à durée indéterminée seniors », il apparaît dans la version définitive, à titre expérimental pendant cinq ans, après que les syndicats ont exprimé de nombreuses et sérieuses réserves liées à son caractère ultra-flexible pour l’employeur. Le principe est le suivant : si une entreprise embauche un demandeur d’emploi de plus de 60 ans – voire 57 ans si un accord de branche le prévoit –, elle peut lui demander de lui transmettre un document d’assurance retraite. « mentionnant la date estimée d’obtention » du plein tarif. Cela permettra à cette même entreprise, lorsque cette date viendra, de mettre automatiquement le salarié à la retraite, alors que la loi actuelle ne prévoit pas cette possibilité avant l’âge de 70 ans. Une prime réclamée par les employeurs, et notamment la Confédération des petites et moyennes entreprises ( CPME), est quant à elle reportée à 2027 et conditionnée à l’approbation des organisations signataires dans le cadre d’un comité de suivi : il s’agit d’une exonération de la cotisation patronale spécifique due au moment de la retraite, qui représente 30 % de la rémunération versée aux employé. C’est notamment pour cette raison que la CPME considère la mesure dévitalisée, et suspend sa décision sur l’ensemble de l’accord jusqu’à ce que ses autorités prennent position la semaine prochaine.
Un accord surprise sur la limitation des mandats syndicaux
Une fois validé par un nombre suffisant d’organisations patronales et syndicales, l’accord devra encore être transposé dans la loi pour être pleinement appliqué. Il en va de même pour un autre accord apparu par surprise dans la soirée : patronat et syndicats ont rédigé un court texte qui prévoit de mettre fin à la limite de trois mandats syndicaux consécutifs en vigueur depuis 2018. Cette limite est dénoncée par les syndicats, qui y voient un obstacle au travail des délégués du personnel dans les entreprises où les candidatures sont rares, et un risque de discrimination pour les syndicalistes qui seraient dans le collimateur de leur employeur. Il s’agit d’une toute première brèche dans les ordres de travail mis en place par Emmanuel Macron après son accession au pouvoir. Et des derniers, prévient le Medef, attaché à ces réformes : « N’attendez pas de développements ultérieurs de notre part, il n’y en aura pas »assure son chef, Hubert Mongon.
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