La publication des audits de performance des entreprises de transport commandés par le gouvernement du Québec permet de passer à une autre étape : celle de la discussion sur notre vision collective pour garantir la pérennité du financement de ce service essentiel.
Philippe Schnobb
President of the Société de transport de Montréal (STM) and the Quebec Urban Transport Association (ATUQ) from 2013 to 2021
Je me méfiais de ces audits. J’étais préoccupé par le fait que l’exercice visait à trouver des preuves de mauvaise gestion à la vue des administrateurs.
Au final, je suis agréablement surpris par la rigueur du processus et par la quantité impressionnante de données collectées et publiées.
Ce qui m’a rassuré, c’est le commentaire du signataire du rapport de vérification, Nicolas Plante, qui a déclaré aux journalistes : « …nous n’avons pas abouti à des conclusions permettant de dire que les entreprises de transport gaspillent de l’argent. l’argent des contribuables…
J’aurais aimé entendre l’opinion du ministre des Transports à ce sujet.
En huit ans à titre de président de la STM et de l’ATUQ (qui regroupe les 10 entreprises auditées), j’ai pu constater les efforts des directions générales pour équilibrer leur budget tout en tenant compte de la capacité de payer des associés. À la STM, j’ai vu l’équipe de la vérification générale scruter les activités pour trouver des pistes d’amélioration et d’économies. Il y a certainement du travail à faire pour continuer à mieux contrôler les dépenses.
Cependant, l’impression générale qui ressort de la couverture médiatique est que les entreprises font des déficits répétés que le Québec ne veut plus absorber.
N’oubliez pas que les entreprises de transport ne peuvent pas faire de déficit. Chaque année, nous devons trouver des sources de revenus pour atteindre l’équilibre budgétaire pour l’année à venir afin d’éviter les déficits.
Avant la pandémie, l’équilibre était fragile, mais constant : les clients payaient un tiers des coûts, les villes un tiers et le gouvernement du Québec assumait le tiers restant via des programmes d’amélioration des services et le paiement d’une partie des coûts du service de la dette.
Pendant des décennies, l’État a assumé un tiers des coûts et ce n’est que très récemment que cette contribution a été considérée comme une aide pour combler un déficit.
Reconnaissons néanmoins que Québec a considérablement augmenté sa contribution pour compenser la perte de revenus due à la pandémie.
Un déficit structurel
S’il y a un déficit, il est structurel. Ce n’est pas le résultat d’une mauvaise gestion des fonds, mais plutôt le résultat d’une mauvaise planification du partage des coûts. Ce déficit structurel a été amplifié par la pandémie, mais il existait auparavant et existera encore lorsque la fréquentation reviendra aux niveaux de 2019.
Il est essentiel de prévoir ce partage des coûts car il est clair qu’ils vont augmenter. Cette hausse anticipée est liée notamment à l’inflation, à l’application des conventions collectives et aux initiatives gouvernementales. La Politique de Mobilité Durable du gouvernement prévoit une augmentation du service de 5% par an qui devra être financée. La stratégie d’électrification des bus coûtera des milliards, ce qui entraînera une hausse des coûts du service de la dette sans ajouter un bus sur la route. Nous devons également prendre en compte les investissements essentiels dans la rénovation des infrastructures pour garantir la fiabilité du service.
Apparemment, l’entretien du métro nécessite autant d’investissements qu’une nouvelle ligne ; le planifier est une gestion responsable. Cela dit, la réfection des infrastructures est aussi un moyen de réduire les coûts de fonctionnement, une piste non explorée par les auditeurs.
Le rapport d’audit de Raymond Chabot Grant Thornton (RCGT) offre néanmoins des pistes intéressantes pour améliorer la performance des entreprises ; certaines idées viennent des entreprises elles-mêmes et peuvent être facilement mises en œuvre. D’autres, liées à la sous-traitance, peuvent provoquer des conflits majeurs avec les syndicats qui pourraient détourner l’attention de l’objectif premier qu’est l’optimisation des ressources.
Ces avenues doivent avant tout empêcher la discussion de fond sur le financement à long terme de la mobilité durable dans les grandes villes, mais aussi sur tout le territoire québécois pour offrir des solutions alternatives aux automobilistes. Cela passe nécessairement par une révision des sources de revenus qui n’ont pas été indexées depuis des années.
Il est absurde que la croissance du parc automobile soit supérieure à notre taux de natalité et nous devons offrir des options pour que les familles puissent voyager sans avoir besoin d’une deuxième ou d’une troisième automobile avec les coûts importants que cela représente. dans les dépenses des ménages. C’est un choix individuel, mais la solution existe si nous trouvons le courage d’assumer le financement d’une vision collective de la mobilité durable.
Le déficit de fonctionnement se retrouve dans nos allées et dans l’économie, au coin de la rue, à l’arrêt d’autobus.
Lire la chronique « 120 000 $ pour les chauffeurs d’autobus »
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