Le président du tribunal correctionnel et le parquet ont demandé ce lundi 12 février à huis clos de juger les suspects d’un important trafic de drogue aux bénéfices considérables, réinvestis selon le parquet de manière opaque dans les buralistes, les épiceries et l’immobilier. à Montpellier et à Dubaï. Une mesure justifiée par « la crainte de représailles et « pour assurer la sécurité de tous », au détriment de l’information du public sur ce sujet d’actualité sensible, et alors qu’un ancien intérimaire du tribunal judiciaire est sur le banc des accusés. averti.
Entreprises avec « de multiples sources de revenus cachés, afin d’augmenter artificiellement leurs résultats comptables »irrégularités « si nombreux qu’ils signent un système réfléchi et intentionnellement organisé » : l’enquête menée en 2021 et 2022 par un juge d’instruction de Montpellier a permis d’élucider un mystère rarement révélé à Montpellier, en décryptant les mécanismes de blanchiment des dealers. Et en établissant l’interpénétration entre le monde clandestin des trafiquants de cocaïne et de cannabis et celui de l’économie officielle.
Une nébuleuse d’entreprises familiales
Bureaux de tabac, épiceries, appartements, maisons à Montpellier comme à Dubaï : selon l’ordonnance de renvoi du juge d’instruction, que Midi libre a pu consulter, la famille de Mourad Dhrif, 36 ans, employé d’un bureau de tabac, Cours Gambetta, appartenant à son frère, et propriétaire d’une épicerie avenue du Père-Soulas et de nombreux biens immobiliers, serait au cœur d’une nébuleuse d’entreprises, où seraient réinjectés des fonds d’origine suspecte : “des traces de cocaïne ont été retrouvées sur 42% des contraventions” saisis à son domicile, contre 3% en moyenne, écrit le juge.
« Le Coca est magnifique »
Pour comprendre, la PJ a sondé la voiture et l’appartement d’un trafiquant, Mohamed Labidi, 42 ans, a suivi les suspects, qui passent leurs vacances à Marbella ou Dubaï, et multiplient les visites à la ville de Gély et à Marels, les deux plus gros points de deal dans le pays. Montpellier. “La coke n’a pas été travaillée, elle est magnifique” dit-il en 2021. «Il y en a trois fois 70 000 dans l’appartement» sa compagne a été déménagée en 2012. Bruit d’une trieuse de billets, d’une machine sous vide pour emballer des médicaments, d’un mixeur, “ce qui laisse penser qu’il coupe la cocaïne”, remarque la police.
281 000 € de fausses factures d’un hypermarché
Côté commercial, la police a mis au jour les étranges pratiques des fournisseurs très officiels de Mourad Dhrif : un hypermarché de l’est de Montpellier a établi de fausses factures d’une valeur de 281 000 € entre 2020 et 2022, pour qu’il puisse tout payer cash, sans être gêné par les formalités légales. plafond de 1000€ par achat. « Un service rendu au client » » avouèrent ses directeurs commerciaux, embarrassés. Idem pour une grande surface de carrelage, pour cacher un achat cash de 48 000 €, destiné aux murs d’une villa familiale à Saint-Gély-du-Fesc.
10 000 € de salaire mensuel pour l’épicier
C’est ainsi que pour les policiers, l’épicerie peut leur verser un salaire mensuel de 5 000 €, ce qui est tout à fait officiel. Il en perçoit ensuite un autre pour le même montant du tabac du Cours Gambetta, dont le chiffre d’affaires annuel de 4 millions d’euros reviendrait au juge. « artificiellement gonflé par l’injection de fonds d’origine illicite ». Un buraliste censé avoir 1.300 clients par jour, alors que la moyenne du secteur oscille entre 600 et 800, et dont il souffre « une concurrence déloyale, voire féroce » de vendre des cigarettes de contrebande devant sa porte.
600 000 € pour une villa à Dubaï
C’est ainsi, estime l’accusation, que Mourad Dhrif a pu faire fortune, au point d’envisager en 2022, lors de son incarcération, l’achat d’une villa pour 600 000 € à Dubaï, d’une Audi RS6 à 220 000 € ou d’un montre de luxe à 90 000 €. L’homme nie catégoriquement tout trafic et tout blanchiment d’argent. « L’administration fiscale n’a rien trouvé à redire et le fait que le bureau de tabac n’ait pas été saisi montre que le blanchiment ne tient pas le coup » assure Me Phung, qui le défend avec Me Medico et Me Ferri.
Sur le banc des accusés se trouve également une de ses filles, titulaire d’une maîtrise en droit pénal et qui était intérimaire au tribunal judiciaire, lorsque l’enquête a établi qu’elle aurait agi comme prête-nom pour le rachat d’un autre bureau de tabac, avenue de Lodève, ce qu’elle conteste.
Un prévenu sous haute protection policière
Dernier personnage intriguant : Nicole Derouineau, une quinquagénaire qui apparaît libre et terrifiée, malgré une protection policière rapprochée : elle a reconnu avoir passé des années à sillonner les routes de France et d’Espagne pour convoyer l’argent de nombreux trafiquants, au volant d’une voiture. équipé d’un cache avec vérins hydrauliques. «J’emportais de très grosses sommes» a-t-elle admis.
Des risques de représailles ?
Les Montpelliérains et le public n’en sauront pas plus : le président du tribunal correctionnel, en accord avec le parquet, a déclaré ce lundi 12 février un huis clos très inhabituel pour les quatre jours du procès, en raison de “la nécessité de garantir la sérénité des débats, les craintes de représailles évoquées par certains inculpés (sic) et afin d’assurer la sécurité de tous.”
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