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le sans alcool décolle

LLe froid glacial n’a rebuté personne. A Sauveterre-de-Guyenne, début janvier, devant l’un des hangars de Bordeaux Familles, le parking bondé témoigne de l’intérêt du moment : la cave coopérative de l’Entre-deux-Mers (300 vignerons, 5 000 hectares de vignes) présente son unité de désalcoolisation et vous invite à déguster les trois premiers millésimes à 0,0% qu’elle présentera dans un petit mois au salon Wine Paris. Comme de nombreux acteurs du vin, Bordeaux Families se lance sérieusement sur le marché des vins sans alcool.

Dans une salle entièrement verticale, la rutilante machine, opérationnelle depuis un mois, trône avec ses innombrables tuyaux et colonnes. Cet alambic très moderne permet de transformer du vin brut (alcoolisé) en vin sans ivresse, affichant seulement 0,05% d’alcool, grâce à une distillation sous vide et une ébullition à 40 degrés.

Une hérésie, penseront certains. La réponse à une nouvelle tendance de consommation et la conviction d’une croissance à plusieurs chiffres, diront d’autres. Une chose est sûre : Bordeaux Familles n’a pas lésiné sur les moyens : son unité de désalcoolisation, importée d’Afrique du Sud, lui a coûté environ 2,5 millions d’euros.

Une alternative

« En 2019, nous y réfléchissions déjà, tout en constatant que le marché évoluait », explique le directeur général Philippe Cazaux. Et puis Covid est arrivé. En 2021, face à la demande de certains clients, nous sommes revenus sur cette ambition. Et nous voici! »

Après ses premières bouteilles de blanc, rouge ou rosé, la cave proposera également des effervescents et même du très faible alcool avec des millésimes en appellation Vin de France à 0,5%. « Il faut répondre à une demande », précise Thibault Ressier, responsable commercial chez Bordeaux Families. Pour ceux qui pour des raisons médicales, éthiques ou personnelles ne veulent pas boire d’alcool et souhaitent participer au cérémonial de l’apéritif et de la table, il n’y a pas grand chose de disponible. Là, nous leur proposons une alternative. »


La cave coopérative géante de l’Entre-deux-Mers, Bordeaux Families, doit présenter sa toute première gamme de vins sans alcool à Wine Paris en février.

Claude Petit/ « Sud Ouest »

Dans ce monde émergent sans alcool, un écosystème est en train de se créer. La société parisienne B&S Tech, à travers Léognan et l’incubateur de start-up Bernard Magrez, conseille des coopératives ou des exploitations agricoles dans leur développement de boissons légères et sans alcool.

« Nous ne sommes ni antialcooliques ni moralistes », insiste Stéphane Brière, l’un des frères à la tête de l’entreprise. Notre volonté n’est pas de cannibaliser ceux qui apprécient les vins alcoolisés, mais que nos clients puissent recruter de nouveaux consommateurs et apporter une nouvelle offre de modération à la clientèle traditionnelle. »

“Une carte à jouer”

Partout en France, et notamment à Bordeaux, de nombreux acteurs font appel aux services de B&S Tech, qui les accompagne dans la conception de leur produit, vers un partenaire de production ou l’achat de matériel. Chaque année, elle bénéficie de deux à trois fois plus de soutiens aux projets.

« Parce que la marque France est puissante, de nombreux acheteurs à l’export recherchent des vins français désalcoolisés », explique Stéphane Brière. Les vignerons bordelais ont une carte à jouer ! Nous sommes le premier producteur mondial de vin. Il serait dommage que le reste du monde achète son vin désalcoolisé hors de France. »

Exemple de réussite, celle de la coopérative Berticot, née dans l’Entre-deux-Mers et comptant une centaine de vignerons répartis entre Lot-et-Garonne (Duras) et Gironde. Il y a un an, elle a lancé sa gamme de vins sans alcool : un rouge, un blanc et un effervescent. «Cela nous préoccupe depuis 2019», affirme Chloé Maixandeau, directrice marketing. Il nous a fallu du temps pour expliquer le projet, le mûrir et enfin le développer car nous souhaitions nous rapprocher le plus possible des caractéristiques organoleptiques d’un vin traditionnel. »

Les marchés français « prudents »

Même si le nombre de ces bouteilles reste minime (moins de 1 % du volume global), l’attrait a dépassé les attentes, notamment à l’export, la demande dépassant la production. « Les marchés français restent un peu plus prudents mais commencent à se montrer », poursuit Chloé Maixandeau. Au niveau de la grande distribution, nous sommes référencés depuis novembre par les magasins Système U à l’échelle nationale pour nos vins effervescents sans alcool. »

La coopérative travaille désormais sur un rosé pétillant et réfléchit à l’opportunité d’expérimenter du « faiblement alcoolisé ». Face à la crise de la consommation qui frappe le vignoble français, il faut évoluer. « Aujourd’hui, il faut être innovant », insiste le dirigeant. Le sans alcool nous apporte une complémentarité avec nos gammes actuelles et une clé pour pénétrer de nouveaux marchés. »

 
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