Une femme a échoué 120 fois à son examen théorique de conduite, révèlent les données de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) obtenues par notre Bureau d’enquête.
Le directeur général de l’Association des écoles de conduite du Québec (AECQ), Marc Thompson, est sous le choc. « Cela n’a aucun sens », s’est-il exclamé.
La dame, aujourd’hui âgée d’une cinquantaine d’années, a tenté sa chance pour la première fois à cet examen à choix multiples en 2007.
Et elle n’est pas la seule à être passée des dizaines de fois devant les ordinateurs de la SAAQ pour tester ses connaissances du Code de la sécurité routière.
Un homme dans la quarantaine avait 99 anse tentative l’année dernière. Et quatre autres personnes ont dépassé les 90 tentatives.
« Que ce soit pour l’examen théorique ou pratique, le nombre de personnes qui font 10 tentatives ou plus est inférieur à 1 % », nuance toutefois Geneviève Côté, porte-parole de la SAAQ.
Récidivistes pour l’examen pratique
Quant aux examens pratiques, un homme d’une cinquantaine d’années a eu 30 tentatives l’année dernière. Sa première tentative remonte à 2013.
Sept autres personnes ont conduit plus de 20 fois en compagnie d’un évaluateur de la SAAQ, sans réussir à démontrer qu’elles savaient conduire de manière sécuritaire.
En Suisse, un candidat qui échoue trois fois à son examen de conduite doit se soumettre à une évaluation de ses capacités physiques et mentales par le médecin avant de pouvoir réessayer.
La SAAQ avoue s’intéresser à de telles pratiques et dit évaluer « la possibilité d’éventuellement limiter le nombre de tentatives ».
” [Ceux qui échouent trop]la SAAQ devrait leur dire : « vous allez dans une auto-école et vous allez faire du temps supplémentaire », dit M. Thompson.
Plus dur pour les plus grands…
Les données de la SAAQ démontrent que les taux de réussite aux examens de conduite diminuent avec l’âge.
L’année dernière, environ 80 % des jeunes âgés de 16 à 21 ans ont réussi les deux tests.
Or, dans la quarantaine, près de 40 % des hommes et 50 % des femmes échouent à ces mêmes examens. Et les taux d’échec augmentent régulièrement jusqu’à 80 ans.
Johanne Samson, directrice de l’école de conduite Routec 132 à Gaspé depuis 30 ans, observe ce phénomène chez ses élèves.
« À partir de 40 ans, on constate qu’ils ont moins de compétences », constate-t-elle.
Et pour les immigrés
La SAAQ précise que les personnes qui n’ont pas suivi de leçons de conduite sont plus susceptibles d’échouer.
Parmi eux, on retrouve les immigrés qui possédaient un permis de conduire à l’étranger.
« La demande pour le service de reconnaissance de l’expérience de conduite est en croissance dans la région métropolitaine de Montréal. La maîtrise de la langue peut expliquer en partie la baisse des taux de réussite aux examens dans ces endroits », estime M.moi Côté.
« Est-ce qu’ils connaissent vraiment le code de la route ? [du Québec] ? » demande, pour sa part, le directeur général de l’AECQ.
Il aimerait que toutes les personnes venant de l’extérieur du Québec suivent 50 heures de cours dans une école de conduite québécoise.
Les Gaspésiens sont-ils les meilleurs conducteurs ?
Le taux de réussite à l’examen pratique de conduite varie grandement d’une ville à l’autre au Québec, allant de 92 % à Gaspé à 59 % à Lévis.
La moyenne nationale de réussite à l’examen de conduite est de 71 %, selon les données de la Société d’assurance automobile du Québec (SAAQ), mais celle-ci est loin d’être répartie équitablement selon les territoires.
Par exemple, les trois centres de services situés dans la région Gaspésie–Les Îles-de-la-Madeleine affichent tous un taux de réussite de plus de 82 %.
À l’inverse, les candidats qui passent leur examen dans la grande région de Québec ont un taux de réussite inférieur à 65 %.
Les évaluateurs sont-ils plus sévères près de la capitale ? Les apprentis conducteurs sont-ils moins bons ? La SAAQ assure que « les compétences évaluées lors de l’examen pratique sont les mêmes, quelle que soit la région du Québec ».
Très jeune
Selon Johanne Samson, directrice de l’école de conduite Routec 132 basée à Gaspé et dans la Baie des Chaleurs, l’âge des candidats pourrait expliquer en partie cet écart.
« Près de 90 % de nos étudiants ont 16 ans. Les jeunes sont beaucoup plus compétents. Comme nous n’avons pas de moyen de transport collectif, les étudiants, s’ils veulent se déplacer eux-mêmes, ont besoin d’une voiture », rappelle-t-elle.
Elle juge que conduire au centre-ville de Gaspé, où se déroule l’examen de la SAAQ, n’est pas « forcément facile ».
« Les jeunes diront souvent qu’il est plus facile de déménager à Bonaventure, mais [selon vos données], ce n’est pas plus facile. Le trajet est tout simplement différent », dit-elle.
Le directeur général de l’Association des écoles de conduite du Québec (AECQ), Marc Thompson, juge anormal de constater de tels écarts entre les différentes régions du Québec.
“C’est incroyable”, a-t-il déclaré.
Selon lui, la SAAQ devrait publier les taux de réussite par école, ce qui permettrait de savoir où se situent les meilleurs établissements.
Cinq centres avec les meilleurs taux de réussite
- Gaspé : 92 %
- Îles-de-la-Madeleine : 90 %
- Baie-Comeau : 89 %
- Mont-Laurier : 84 %
- Saint-Jean-sur-Richelieu : 83 %
Cinq centres avec les pires taux de réussite
- Lévis : 59 %
- Trois-Rivières : 61 %
- Montmagny : 63 %
- Dorval : 65 %
- Hamel (Québec) : 65 %
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