Alors que les petites et moyennes valeurs continuent d’être à la traîne, Portzamparc, spécialiste de la classe d’actifs, vient partager avec nous ses observations et ses plus fortes convictions à l’approche de l’année 2025.
Nicolas Royot, la publication de votre liste Convictions S1 2025 est l’occasion de faire un bilan de fin 2024. Quels sont selon vous les faits les plus marquants ?
« 2024 devrait être la 6e année de sous-performance des petites et moyennes capitalisations sur les 7 dernières années. Particulièrement cette année, nous observons une très forte corrélation entre les tailles de capitalisation d’une part et la performance, la liquidité et la collecte des différents fonds de la catégorie d’autre part. Si l’actualité politique des deux côtés de l’Atlantique a influencé les performances, il faut reconnaître que les révisions à la baisse des attentes de résultats, tout aussi corrélées à la taille des capitalisations, ont joué un rôle majeur. D’où des valorisations encore très basses… mais pas plus qu’il y a un an.
Vers six ans de sous-performance en sept ans
Les ratios de valorisation pour l’année 2025 ne sont-ils pas trompeurs, fondés sur des attentes de rebond du bénéfice par action (BPA) encore trop optimistes ?
« Si l’on prend l’indice CAC M&S, les BPA médians ont déjà été révisés à la baisse de -20%, et le consensus vise toujours une hausse de 15% entre 2024 et 2025. Nous pensons que l’essentiel des révisions à la baisse ont été faites et que les facteurs de soutien sont nombreux : effet de base 2024 favorable sachant que la dissolution a gelé bon nombre de projets, impact dollar plutôt favorable, croissance outre-atlantique, baisse de l’énergie et des tarifs, etc. Par ailleurs, les charges de personnel seront mieux maîtrisé en 2025. Le PER médian projeté à 10,3x est donc crédible et affiche une décote d’au moins 25% par rapport au CAC 40. Rappelons qu’historiquement les petites et moyennes valeurs bénéficiaient d’une prime justifiée par leur croissance plus forte du BPA sur le long terme. Enfin, la décote par rapport aux actifs non cotés s’est creusée. au-delà de 30 %.
Quelle est l’actualité du marché primaire et des offres publiques ?
« Avec seulement 4 introductions en bourse, 2024 marque un creux. A noter cependant que la qualité était au rendez-vous compte tenu des performances des fichiers introduits et de la taille des deux ETI Exosens et Planisware. L’année 2025 pourrait voir l’introduction de davantage de dossiers de ce type, plus matures et plus rentables que ce que nous avons vu ces dernières années. Mais la concurrence des fonds de private equity reste forte, notamment en termes de valorisation. Espérons qu’un cercle vertueux se développe. remis en place afin de renouveler le pool de sociétés cotées sachant qu’une trentaine de dossiers ont fait l’objet d’une offre publique cette année, dont les deux tiers émanant de dirigeants ou d’actionnaires en leur propre qualité afin de bénéficier « d’une valorisation opportuniste et pour éviter les contraintes croissantes du référencement. A ce titre, les mesures de marché comme le lancement du fonds CDC doté de 500 millions d’euros à investir dans 25 fonds de petite et moyenne taille sont appréciables.
Dans ce contexte, comment se sont comportées vos convictions pour 2024 ? Quelles sont les convictions les plus fortes des analystes de Portzamparc pour débuter 2025 ?
« Après une excellente 1est semestre (+35,7%, meilleure performance semestrielle depuis 2009), le second semestre n’a pas échappé à la morosité ambiante et affiche -5,4% au 10 décembre 2024. Pour aborder la nouvelle année, nous avons privilégié les petites capitalisations qui étaient fortement réduits. Ces dossiers pourraient attirer l’attention en cas de regain d’intérêt pour la classe d’actifs.
Nous conseillons également toujours Entech, une entreprise bretonne qui conçoit et intègre des technologies de production et de stockage d’énergies renouvelables. Nous sommes surpris par l’ampleur de la baisse du titre ces derniers mois, alors même que la société a réalisé de bonnes performances et que la révision de ses objectifs à moyen terme était attendue. L’entreprise est reconnue par les plus grands constructeurs et opérateurs du secteur, les projets ambitieux sont nombreux et le groupe s’appuiera sur une amélioration structurelle de la marge et du fonds de roulement. 2025 devrait être une année de croissance accélérée que la valorisation actuelle ne reflète absolument pas. Nous visons plus de 10 €, soit un potentiel d’augmentation de plus de 80 %.
Nous recommandons également Séché Environnement, en baisse significative suite à la déception lors de la publication des résultats semestriels. Le premier semestre a été pénalisé par un arrêt de maintenance non programmé et surtout un effet de base défavorable lié à la baisse des prix de revente de l’énergie produite et aux gros contrats de services en 2023. Le troisième trimestre marque déjà un retour à la croissance avec une accélération sur les trimestres à venir. A cela s’ajoute la très bonne acquisition d’ECO à Singapour qui aura un impact favorable sur les marges et le cash-flow du groupe (ECO : 43% de marge Ebitda) et servira de plateforme de développement en Asie. Avec ce profil plus résilient et plus rentable, Séché mérite bien mieux que la valorisation actuelle. Nous visons 120€, soit 50% au-dessus du prix actuel.
Enfin, alors que les taux d’intérêt se contractent, nous avons souhaité mettre en avant deux dossiers dont l’endettement effraie un peu le marché. D’un côté Bastide, dont le processus de transfert d’actifs a commencé et est loin d’être terminé, avec des multiples de transactions qui s’avèrent très rassurants. Environ 200 millions d’euros pourraient être dégagés à moyen-long terme de ces cessions de filiales, sachant que les principales échéances de remboursement de la dette sont lointaines (échéance majeure de 215 millions d’euros en 2029). Même si selon nous le risque d’augmentation de capital est nul, la valorisation actuelle de Bastide est décotée d’environ 50% par rapport à ses multiples historiques. Enfin, GL Events n’a pas fini de croître après une année 2024 très dynamique. Nous pensons que le Groupe a les ressources pour maintenir son niveau d’activité en 2025 et cela compte tenu de ses nombreux projets (acquisition, reprise de concessions, etc.) en cours , elle devrait continuer à conquérir des parts de marché à travers le monde. le tout tout en maîtrisant son niveau d’endettement. Ici aussi, nous avons identifié un potentiel de hausse de 50 %.
Performances relatives remarquables (vs CAC Mid & Small) pour le palmarès de conviction de Portzamparc