La en voie de désindustrialisation

La en voie de désindustrialisation
La France en voie de désindustrialisation

« La réindustrialisation est toujours en cours », a insisté le ministre de l’Industrie démissionnaire Marc Ferracci lors d’un déplacement à Toulouse mi-novembre à l’occasion de la Semaine de l’Industrie. Les chiffres témoignent cependant d’un retournement de situation dans l’industrie française ces derniers mois. Selon la dernière étude du cabinet Trendeo, spécialiste de l’investissement industriel, les fermetures d’usines ont été plus nombreuses que les ouvertures, avec un écart de 15. Bien loin du record de l’année 2021 où le solde net des ouvertures d’usines s’élevait à 129. ” C’est la première fois depuis 2015 que cet indicateur est négatif », souligne David Cousquer, fondateur et directeur du cabinet Trendeo.

L’industrie détruit-elle des emplois près de chez vous ?

La dynamique de réindustrialisation est-elle déjà derrière nous ? Il n’y a aucun doute pour la CGT, évoquant un « désindustrialisation galopante », à partir d’une carte réalisée en interne. Celui-ci recense 286 plans sociaux votés depuis septembre 2023, dans l’ensemble de l’économie française. Le syndicat appelle même à une mobilisation nationale ce jeudi 12 décembre pour alerter sur la situation d’urgence qui entoure la filière.

D’après une carte réalisée par la rédaction de La Tribune et dévoilé aujourd’hui, une centaine de projets de suppressions d’emplois et de fermetures d’usines ont été recensés dans l’industrie française depuis le 1er janvier 2024. Selon ce décompte, près de 13 000 emplois industriels ont été détruits au cours des douze derniers mois, et plus de 4 000 sont supprimés. affaibli. Bien entendu, ce décompte n’est pas exhaustif, la rédaction n’ayant pris en compte que les plans sociaux de plus de 50 emplois…

« Derrière ces plans sociaux, derrière ces chutes d’arbres, il y a des forêts qui poussent sur les territoires. Depuis ma nomination au poste de secrétaire général à l’investissement, j’ai visité 55 départements. A chaque fois, on me présente une multitude de projets économiques, il y en a plein ! Ces entrepreneurs manquent de ressources pour augmenter leur chiffre d’affaires. Ils ne sont pas gênés par les motions de censure, ils sont gênés par toutes les normes et réglementations en vigueur », affirme Bruno Bonnell, responsable du plan 2030, qui soutient l’investissement des entreprises dans les innovations technologiques.

“Le bouton pause”

Cet engouement contraste avec les indicateurs et retours de terrain observés ces dernières semaines : le dernier baromètre trimestriel de la Banque Palatine et du Le Mouvement des entreprises de taille intermédiaire, dévoilé mi-novembre, estime que 33 % des entreprises de taille intermédiaire envisagent un gel temporaire de leurs investissements et 65 % d’entre elles anticipent une réduction ou une suspension de leurs recrutements. Ce même Le baromètre avait déjà alerté sur la paralysie des dirigeants en matière d’investissements suite à la dissolution et à l’instabilité gouvernementale de septembre. La récente motion de censure n’a certainement pas rassuré le monde industriel.

« C’est comme si le tissu industriel avait appuyé sur le bouton pause ces derniers mois… L’industrie a besoin de stabilité, les porteurs de projets ont besoin de savoir où ils vont investir. L’été est souvent le moment idéal pour les investisseurs qui souhaitent prendre contact avec les autorités locales pour obtenir des terrains. Chaque été, j’ai trois à quatre dossiers sur la table. Cet été, je n’ai reçu aucun appel ! Les investissements ne peuvent pas se concrétiser dans un tel climat », déclare Sébastien Martin, président du Grand Chalon et président de l’association Intercommunalités de France.

Réindustrialisation : pourquoi est-elle bloquée ?

Pour preuve, la posture récente du groupe Safran. Cette dernière réfléchit à l’implantation de sa future usine de freins carbone entre la France, les Etats-Unis et le Canada. Au-delà du prix de l’énergie, sujet central dans ce type de projets, les dirigeants ne cachent pas que la situation politique locale influencera également leur décision. Cet investissement de 400 millions d’euros pourrait ainsi échapper à la France alors qu’il était initialement prévu pour la région lyonnaise.

« La France n’est pas un pays de grandes usines, sa force c’est sa granularité. L’emploi se fera dans des PME et ETI locales, experts dans des domaines particuliers et spécifiques. Nous avons identifié 5 000 projets de développement économique dans des entreprises locales (…) Je déteste le mot réindustrialisation. Je ne suis pas sûr que cela créera beaucoup d’emplois à une époque où les usines sont ultramodernes et robotisées », déclare Bruno Bonnell.

Un million de départs à la retraite : le défi de l’industrie française

Le climat des affaires reste encore un véritable thermomètre du tissu économique. Le cabinet d’avocats d’affaires ARC, en partenariat avec l’Ifop, a interrogé 500 entreprises durant le mois d’octobre et vient de dévoiler les résultats de son baromètre qui laisse place au scepticisme. Ils sont 94% (soit +6 points par rapport à 2023) à penser que la situation économique ne s’améliorera pas dans les six prochains mois et ils sont même plus de la moitié (52%, en hausse de 8 points par rapport à 2023). un an) pour prédire sa détérioration.

« La désindustrialisation est malheureusement en marche. On le voit à travers le taux d’utilisation des capacités de production industrielle qui est tombé à 75%. Lorsque l’industrie fonctionne normalement, ce chiffre est de 83 ou 84%», a déclaré dans le JDD du 8 décembre Patrick Martin, le patron du MEDEF, qui espère un élan politique à court terme.

Besoin d’une réponse politique

Pour inverser la tendance, la réponse sera nécessairement politique. Le retour espéré à une forme de stabilité gouvernementale restaurera la confiance dans les marchés et les industriels. Mais la question de la compétitivité des entreprises françaises se pose aussi. ” Notre système de protection sociale représente 47 % des dépenses de l’État et nous faisons de plus en plus peser cette charge sur le travail. Si nous voulons retrouver de la compétitivité dans nos entreprises, cela passe nécessairement par une réforme profonde de notre protection sociale. », juge Sébastien Martin, très impliqué dans cette question de la réindustrialisation.

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Concernant le plan France 2030, seuls 35 milliards d’euros sur les 54 prévus ont été engagés à ce jour, ce qui laisse une marge pour soutenir les entrepreneurs. Pour le reste, le flou demeure, à l’image de cet amendement de 1,55 milliard d’euros pour décarboner l’industrie, prévu dans le PLF 2025 et abandonné depuis. Même sort pour le livret d’épargne industriel que le Premier ministre démissionnaire, Michel Barnier, a porté depuis quelques semaines pour utiliser l’encours record du Livret A pour soutenir les industriels du pays. Quel avenir également pour l’exonération des futures usines de la loi ZAN ?

Barnier exempte les projets industriels du zéro artificialisation nette (ZAN)

« Nous n’avons pas de problème de foncier industriel en France. Nous disposons à ce jour de plus de 700 sites disponibles, aux mains des pouvoirs publics, qui représentent plus de 6 000 hectares, sans compter les friches. Il existe cependant un phénomène de rareté sur les terrains supérieurs à 20 hectares, c’est vrai. Toutefois, nous ne ressentons pas de creux pour l’instant, nous qui intervenons très en aval des dossiers pour la partie immobilière des usines. Peut-être qu’on touchera le fond de la vague plus tard», note Olivier Sichel, directeur général adjoint de la Caisse des Dépôts et patron de la Banque des Territoires, qui prévoit d’investir un milliard d’euros d’ici 2027 dans les thématiques industrielles.

Malgré une année 2024 noire pour la réindustrialisation de la France, tout n’est pas à jeter. Selon le cabinet Trendeo, le pays peut s’appuyer sur un bilan positif d’ouvertures d’usines de +316 entre 2016 et 2024. Par ailleurs, une étude de l’Insee révèle que la France a 310.000 établissements économiquement actif dans lel’industrie manufacturière, à fin 2022, contre 240 000 en 2014, même si cette croissance est principalement tirée par les micro-entrepreneurs.

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