À Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier voyage surtout en fuite, son bureau dans son sac à dos, à la recherche de sujets et de gens fascinants. Il s’adresse à tout le monde et s’intéresse à tous les horizons dans cette chronique urbaine.
Les DVD ont toujours la cote : un Montréalais fait des affaires improbables en vendant plusieurs de ces objets d’une autre époque grâce à une campagne publicitaire aussi rétro et botte de foin que diablement efficace.
Plusieurs colonnes de cartons remplis de DVD occupent la moitié du couloir principal de la salle Jean-François, dans Rosemont.
Une pile de 10 DVD de Noël attend qu’un client la récupère.
Près de la porte, une boîte contient 30 enveloppes prêtes pour la poste :
« Il y a là-dedans environ 150 $ de films », confie l’homme coiffé d’une casquette « DVD Pro ».
Près de la porte, une boîte contient 30 enveloppes prêtes pour la poste.
Louis-Philippe Messier
Son pull est marqué de la citation : « Les DVD ne doivent pas disparaître ! »
Une minute après mon arrivée, son téléphone a vibré.
“Je viens d’en vendre un!” s’exclame celui qui se fait appeler le « DVD Pro ».
M. Hall n’est pas le sexagénaire auquel je m’attendais en voyant ses affiches promotionnelles faites maison que vous avez peut-être vues partout à Montréal.
Le jeune homme de 42 ans, technicien professionnel du cinéma, conserve chez lui environ 9 000 DVD.
Environ 6 500 de ces DVD sont activement répertoriés sur eBay.
“Quelqu’un en Colombie-Britannique vient de m’acheter le film Apocalypse de Stonehenge pour 12 $ », m’explique-t-il.
Lors de ma visite, le téléphone du Pro a sonné : quelqu’un en Colombie-Britannique venait de lui acheter ce film.
Louis-Philippe Messier
Le descriptif du produit comporte la mention D6… qui est la boîte où est stocké le film.
Je retire ladite boîte d’une colonne dans le couloir et remets le DVD à M. Hall.
Je me suis amusé à retrouver le film parmi les 9000 DVD stockés ici.
Louis-Philippe Messier
Il vérifie que le disque est impeccable et inscrit l’adresse de l’acheteur sur une enveloppe.
M. Hall se prépare à envoyer le film en Colombie-Britannique.
Louis-Philippe Messier
Mais où trouve-t-il ses DVD ? Des dons de personnes qui ne savent qu’en faire ou en rachetant des stocks de vidéoclubs disparus, par exemple.
La demande est là
«Beaucoup de films sont introuvables sur les plateformes en ligne et même si seulement 1 % de la population écoute des DVD, comme je les vends partout au Canada, cela représente un énorme bassin de clients», explique M. Hall.
L’idée géniale qui a propulsé l’entreprise du Pro était sa méthode de promotion ultra-artisanale : des morceaux de pancartes électorales sur lesquelles M. Hall griffonne ses pancartes avec des marqueurs.
« Je me suis dit que les gens trouveraient ça spécial et que ça deviendrait viral sur les réseaux sociaux », se souvient le Pro.
En effet, cela a piqué la curiosité de milliers de clients potentiels.
La publicité du DVD Pro ne coûte pas cher à produire… et on peut la voir presque partout à Montréal et dans les villes où voyage M. Hall.
Louis-Philippe Messier
Lorsqu’il accroche ses affiches sur des poteaux, les gens le saluent.
Certaines personnes souhaitent se prendre en photo avec ce légendaire « DVD Pro ».
« Les policiers ou les ouvriers qui me voient faire ça me saluent et sourient », se réjouit-il.
« Un professeur de marketing à Condordia m’a arrêté dans la rue pour me dire que ma campagne semblait être un grand succès.
Personne ne lui a encore demandé son autographe, mais peut-être qu’il le fera !
« Je ne m’attendais pas à une réaction aussi merveilleuse et encourageante de la part du public, confie M. Hall.
« Beaucoup de gens pensent que je fais ça depuis de nombreuses années, mais non : cela ne fait que deux ans !
J’ai laissé le « DVD Pro » avec une de ses pancartes dans mon sac… après avoir promis de l’afficher près de chez moi – promesse tenue.
En écrivant cette chronique, j’ai pris une petite pause pour accrocher cette publicité près de chez moi, dans Hochelaga, comme je l’avais promis.
Louis-Philippe Messier