L’un des arguments les plus utilisés contre l’indépendance du Québec pour effrayer les citoyens retraités et préretraités est la perte du fameux chèque canadien de la pension de vieillesse. Un argument totalement fallacieux mais récurrent en 1980 et 1995, et gageons déjà qu’il le sera lors d’une prochaine réunion.
Alors pouvez-vous imaginer qu’un parti politique indépendantiste à Ottawa lance un ultimatum à un gouvernement fédéraliste minoritaire et demande une augmentation de 10 % des pensions de vieillesse canadiennes pour les 65 à 74 ans ? Ce serait un coup porté directement au pied de l’ensemble du mouvement indépendantiste. Pourquoi vouloir bonifier le chèque de pension de vieillesse canadien avec le drapeau canadien alors qu’on veut quitter le Canada? Sérieux…
C’est pourtant ce qu’a fait le Bloc québécois. C’est carrément contradictoire.
Comment un parti politique fédéraliste agirait-il à Ottawa ?
Un parti politique fédéraliste vise à renforcer la fédération canadienne et son sentiment d’appartenance. Une mesure universelle comme celle des pensions de vieillesse canadiennes contribue grandement à développer un sentiment de loyauté envers l’émetteur du chèque, qui est le Canada.
Pour un parti fédéraliste, il s’agit d’un excellent calcul électoral étant donné que la mesure prévoyant une augmentation de 10 % pour les 65 à 74 ans touche environ 4 millions de Canadiens dans toutes les provinces, même si l’ultimatum est un échec.
Comment un parti politique indépendantiste agirait-il à Ottawa ?
L’objectif d’un parti indépendantiste est de quitter le Canada et de préparer la construction de la République du Québec. Il n’a donc aucun intérêt à renforcer le sentiment d’appartenance au Canada. Pire encore, cela porterait atteinte à son objectif premier. Un parti indépendantiste vise plutôt à transférer une identité au nouveau pays, développant ainsi un sentiment d’appartenance au Québec, un pays en devenir.
Dans un dossier comme celui des pensions de vieillesse, un parti indépendantiste à Ottawa poserait plutôt comme un ultimatum le rapatriement du régime de retraite du Canada au Québec. Cela permettrait au gouvernement du Québec d’offrir lui-même la prime de 10 % au million de prestataires québécois. Cela permettrait également d’intégrer les deux régimes de retraite afin que les bénéficiaires ne reçoivent qu’un seul chèque avec le drapeau québécois, développant ainsi leur sentiment de loyauté envers le gouvernement du Québec plutôt que celui du Canada.
On sait très bien que le gouvernement canadien rejettera cela, comme dans le cas de l’immigration ou de tout autre dossier. Cependant, cela démontrerait, une fois de plus, les avantages de quitter le Canada.
C’est dommage de voir autant d’occasions manquées de promouvoir véritablement l’indépendance au Parlement canadien. Le Bloc, s’il le voulait, pourrait préparer le futur régime de retraite intégré de la République du Québec et ainsi contribuer à préparer le terrain pour l’élection d’un parti indépendantiste au Québec. Il a accès à une expertise extraordinaire et à une plateforme exceptionnelle. C’est à lui de l’utiliser pour promouvoir l’indépendance et non celle du régime canadien !
Martine Ouellet
Responsable Climat Québec
Ancien chef du Bloc Québécois