Les producteurs craignent de payer pour des « prix bas » Migros

Les producteurs craignent de payer pour des « prix bas » Migros
Les producteurs craignent de payer pour des « prix bas » Migros

Stratégie commerciale

Les producteurs craignent de payer pour les « bas prix » de Migros

Le grand détaillant a annoncé sa stratégie pour concurrencer les discounters. Il assume seul la responsabilité des conséquences.

Publié aujourd’hui à 8h55

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Bref:
  • Migros réduit les prix de 1 000 produits pour concurrencer les discounters.
  • Le grand distributeur assure assumer à lui seul un investissement de 500 millions.
  • Les producteurs agricoles craignent les conséquences malgré les promesses.
  • Le Bureau Technique du Maraîchage rappelle que le prix n’est pas toujours représentatif de la valeur du produit

Pommes, pommes de terre et autres concombres sont les fleurons de la nouvelle stratégie commerciale lancée lundi par Migros. Pour contrer la concurrence des discounters, le géant suisse de la distribution a annoncé vouloir baisser les prix de plus de 1’000 produits essentiels à leur niveau.

Dans les rayons et sur le site de vente en ligne, une cinquantaine de fruits et légumes sont proposés depuis une semaine à un tarif préférentiel. Et la coopérative affirme que c’est elle et elle seule qui en assumera les conséquences.

Migros investira 500 millions de francs dans cette opération au cours des cinq prochaines années. Et en assumera les conséquences en termes de bénéfices : « Les investissements ne se font pas au détriment des exploitations agricoles et des producteurs », assure Mario Irminger, président de la Fédération des coopératives Migros.

Des producteurs peu bavards

Autrement dit, le prix d’achat « proposé » aux maraîchers, agriculteurs et autres arboriculteurs ne serait pas affecté. Interrogés, les principaux concernés se sont montrés peu bavards, alors que ce n’est pas simplement leur silence qui témoigne de leur réticence à prendre position sur le sujet.

En effet, le thème est sensible pour les producteurs qui ont besoin du contrat signé avec les grands distributeurs, Migros en tête, pour survivre. C’est ce qu’explique l’un d’eux, sous couvert d’anonymat : « Migros représente plus de 50 % de mon chiffre d’affaires. Je n’ai donc pas vraiment envie qu’un avis un peu nuancé sur l’attitude des grands distributeurs m’expose à de futures collaborations, disons… moins fructueuses.

Quoi qu’il en soit, s’il est clair que le consommateur sortira gagnant de cette opération, le producteur ne devrait pas en sortir perdant. Sans pour autant que la pression exercée sur eux ne diminue.

A la lecture du communiqué diffusé en début de semaine par Migros, les habitants du pays, qui se battent pour obtenir un juste salaire pour leur travail, trouveront peut-être cela un peu saumâtre. «Bien sûr, Migros apporte sa contribution en cherchant à favoriser ses clients. Mais pourquoi ce qu’elle peut visiblement amputer ses marges ne profiterait-elle pas aussi – au moins en partie – à ses producteurs, pour lesquels elle pourrait augmenter le prix d’achat des produits », constate Julie Ristord, directrice du Bureau technique maraîcher de Morges, qui regroupe plus de 300 producteurs vaudois et genevois.

Pour ces derniers, il est évident qu’il y a une inquiétude de la part du monde agricole face à cette action et aux déclarations qui l’accompagnent. « La question du coût des fruits et légumes est récurrente et refait surface à chaque fois que des actions de ce type sont mises en œuvre. Parce que le prix n’est pas toujours représentatif de la valeur du produit.

On a tendance à oublier les risques pris par les producteurs de fruits et légumes dont le travail n’a rien à voir avec un processus industriel irréprochable. « Ce sont des produits vivants, avec tous les dangers que cela comporte, et qui ne peuvent être maîtrisés… »

L’exercice qui vient de se terminer en est un parfait exemple. Les conditions climatiques étaient telles que certains maraîchers n’ont même pas pu pénétrer dans leurs champs de carottes pour les récolter. Et donc les vendre. « Pourtant, ils ont investi en achetant des semences, des intrants et en embauchant de la main d’œuvre. Et ces coûts sont évidemment les seuls à les supporter.»

Un tour de passe-passe ?

Certains craignent en tout cas un petit tour de passe-passe de la part de Migros pour amortir quelque peu les effets de sa nouvelle stratégie commerciale. « Il faudra voir sur quelle gamme de produits portent ces réductions », note un maraîcher.

Migros pourrait par exemple acheter davantage de produits M-Budget pour lesquels la marge du producteur est plus faible. Une analyse rapide des 54 prix bas affichés cette semaine pourrait le rassurer. Parmi les treize produits suisses faisant partie du panel, on compte un emballage M-Budget (sur dix au total) pour les pommes et un label bio (sur trois) pour les carottes.

Certes, mais reste à savoir à qui sont achetés ces fruits et légumes. «Si quelqu’un vend une vingtaine de produits différents à Migros, il peut facilement tolérer que deux ou trois d’entre eux soient soudainement achetés au prix M-Budget. Mais si ce prix concerne le seul légume pour lequel vous avez un contrat avec Migros, le commerce risque de ne plus être rentable du tout», poursuit le maraîcher.

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