Restaurer les zones humides… mais sait-on comment ? – .

Des chercheurs québécois viennent de lancer un important projet de recherche visant à développer une expertise en restauration des milieux humides, pratiquement inexistante dans la province. Un constat qui devrait inciter le ministère de l’Environnement à plus de prudence en n’autorisant pas si facilement leur destruction tout en promettant de les restaurer avec un objectif de zéro perte nette.


Publié à 1h31

Mis à jour à 6h00

Nous ne savons pas comment restaurer les zones humides, n’est-ce pas ?

La réponse courte à cette question est oui. L’expertise est pratiquement inexistante, affirment les biologistes Kim Marineau et Stéphanie Pellerin. « Nous n’avons pas les connaissances nécessaires pour faire de la restauration. Il y a un besoin évident de recherche», déclare M.moi Marineau, président du cabinet Biodiversité Conseil.

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PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Biologiste Kim Marineau

«Si on veut faire de la vraie restauration, c’est un savoir-faire qu’il faut développer au Québec», ajoute M.moi Pellerin.

Et la réponse longue ?

Une certaine expertise s’est construite au fil des années pour la restauration des tourbières, explique Stéphanie Pellerin, qui est également chercheuse à l’Institut de recherche en biologie végétale. « Il nous a fallu 20 à 30 ans pour apprendre à les restaurer. Mais les tourbières sont des écosystèmes assez simples comparés aux autres zones humides. On peut généralement appliquer la même recette, alors que pour les marais et marécages, c’est beaucoup plus complexe. C’est presque au cas par cas à chaque fois. »

Comment alors construire cette expertise qui fait défaut ?

Un important projet de recherche vient de débuter avec la collaboration de chercheurs de l’Université de Montréal et de l’Université Laval. Le projet RARE (pour Recherche et applications pour une restauration éclairée des zones humides) bénéficiera d’un financement de 10 millions de dollars et s’étalera sur une période de cinq ans. “Il nous faudra au moins deux ans avant d’avoir nos premiers résultats”, souligne M.moi Pellerin, qui collabore au projet. L’un des objectifs de la recherche est également d’évaluer les coûts de restauration, trop souvent sous-estimés, ajoute-t-elle.

Savons-nous au moins si cela fonctionne vraiment ? Peut-on vraiment restaurer ou créer des zones humides ?

Selon Stéphanie Pellerin, il est tout à fait possible de développer ce type d’expertise au Québec, mais il faudra plusieurs années pour y arriver. Mais aussi avancée soit-elle, la science ne peut rivaliser avec la nature, du moins en ce qui concerne les zones humides, estime le chercheur.

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PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Biologiste et chercheuse à l’Institut de recherche en biologie végétale Stéphanie Pellerin

Toutes les études démontrent qu’une zone humide restaurée ne sera jamais l’équivalent d’un milieu à l’état naturel. La nature le fait mieux que nous.

Stéphanie Pellerin, biologiste

« Il y a des fonctions écologiques qu’on peut recréer, mais pour d’autres, c’est beaucoup plus compliqué », explique-t-elle. Restaurer une zone humide est bien plus complexe que recréer une forêt. »

Il y a donc un risque que nous ne puissions pas recréer tout ce qui a été détruit ?

« Le vrai scandale, ce n’est pas qu’on ne soit pas encore capables de restaurer convenablement les milieux humides, c’est qu’on continue à les détruire à ce rythme-là », affirme Stéphanie Pellerin. Partant du fait qu’il s’agit de milieux complexes, difficiles à reproduire, le Québec devrait appliquer un principe de précaution, estime-t-elle. Il sera difficile de restaurer des zones aussi vastes que celles qui ont été remblayées depuis 2017, ajoute M.moi Pellerin.

Mais la nouvelle loi n’était pas censée ralentir la destruction des zones humides ?

Loi concernant la conservation des zones humides prévoit une séquence dans l’évaluation des projets, à savoir « éviter, minimiser, compenser ». Cependant, plusieurs groupes environnementaux reprochent au ministère de l’Environnement de sauter les deux premières étapes et de passer systématiquement à l’indemnisation lors de l’autorisation d’un projet. De plus, les sommes exigées par le ministère ne semblent pas ralentir le remplissage des milieux humides, souligne Stéphanie Pellerin. « Le ministère semble avoir beaucoup d’espoir dans le projet de recherche [RARE] pour inverser la tendance. Mais c’est comme si nous ne faisions pas les choses dans le bon ordre. Nous aurions dû nous assurer d’avoir cette expertise avant de détruire autant de milieux humides», affirme Kim Marineau.

 
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