Débâcle Juste pour Rire | «Je ne pouvais pas imaginer un désastre comme celui-ci» – .

Débâcle Juste pour Rire | «Je ne pouvais pas imaginer un désastre comme celui-ci» – .
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Il est « inimaginable » que des géants aux « ressources financières quasi illimitées » comme Bell et Evenko aient pu laisser sombrer le Groupe Juste pour rire (JPR), estime son fondateur et ancien président, Gilbert Rozon. Ce géant de l’humour se dirigeait « vers un mur en klaxonnant » à cause des décisions de ses actionnaires, raconte l’homme d’affaires déchu.

Lors de sa première sortie publique depuis que l’entreprise s’est mise à l’abri de ses créanciers le 5 mars, M. Rozon, qui a envoyé une lettre ouverte à La pressene mâche pas ses mots envers Bell, Evenko et Creative Artists Agency (CAA), à qui il impute la débâcle de JPR.

“Je ne pouvais pas imaginer une telle catastrophe pour la simple raison que ces entreprises disposent de ressources financières quasiment illimitées”, a-t-il ajouté lors d’un entretien téléphonique. Ils avaient entre les mains un fleuron international de l’humour qui existe depuis 40 ans. C’était inimaginable pour moi. »

Bell n’a pas répondu à un courriel de La presse l’invitant à répondre aux propos du fondateur de JPR ; Evenko a répondu qu’il ne voulait pas faire de commentaire.

Écrasé par des accusations d’inconduite sexuelle, M. Rozon a vendu son entreprise à ICM Partners (49 %) – qui appartient désormais à CAA –, Bell (26 %) et Evenko (25 %) il y a cinq ans. Il a depuis été acquitté des charges pénales retenues contre lui. La pandémie a ébranlé JPR, mais une épuration injustifiée ainsi que des contraintes imposées par ses actionnaires ont placé le spécialiste de l’humour dans une situation intenable, soutient son fondateur.

Le « premier choc » est survenu au printemps 2018, a-t-il déclaré. A la veille de la conclusion de la vente de JPR, plusieurs membres de la haute direction ont été licenciés. Les quatre sœurs de M. Rozon et d’autres hauts dirigeants, comme la directrice générale Guylaine Lalonde, sont laissés pour compte.

Toutes les personnes licenciées partageaient la même caractéristique : gagner de l’argent. On s’est débarrassé d’une équipe exceptionnelle. Cela défiait toutes les règles du bon sens. J’en ai immédiatement parlé, notamment auprès des Américains.

Gilbert Rozon

La chute de JPR pourrait coûter jusqu’à 17 millions à son fondateur. Il s’agit du solde du prix de vente intervenu en 2018, montant considéré comme une dette non garantie. L’homme d’affaires s’est tourné vers la justice dans l’espoir d’être payé.

Plus que l’inflation

En se tournant vers le Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC), JPR, qui porte des dettes d’environ 50 millions, avait imputé sa baisse à l’inflation, qui a gonflé ses dépenses, aux changements dans « l’industrie des médias » ainsi qu’aux « temps difficiles » que traversent les festivals gratuits en raison au plafonnement des subventions.

Depuis, La presse a révélé que plusieurs autres éléments étaient venus jeter du sable dans les engrenages. La stratégie d’acquisition à effet de levier utilisée par Bell, Evenko et CAA pour mettre la main sur JPR a rapidement fragilisé le groupe car il s’est retrouvé lourdement endetté. De plus, d’autres contraintes imputables aux actionnaires québécois ont accru la pression financière sur JPR.

D’abord, JPR a dû consacrer plus de la moitié de son budget publicitaire aux plateformes de Bell (radio, télévision et affichage) même si le géant des télécommunications a refusé d’être le partenaire principal de sa grand-messe d’humour. De plus, Evenko a exigé des commissions de 15 % pour la vente des commandites ainsi que des frais de gestion dépassant 1,5 million pour l’organisation du festival Juste pour rire.

Cela a contribué à fausser l’ensemble de la structure financière. Comment vivre sans être privé de plusieurs millions de parrainages chaque année ? Si nous obligeons JPR à dépenser en publicité une somme qui ne serait normalement pas dépensée, nous ajoutons une charge avec laquelle les managers ne pourront plus vivre.

Gilbert Rozon

Lorsque Evenko a acquis 25 % de JPR, ce qui tournait autour des commandites était centralisé chez Spectra. Ces deux spécialistes de la production et de la gestion de salles sont contrôlés par le groupe CH (51%) et le reste appartient au géant américain Live Nation. JPR se retrouve alors sous l’égide d’une équipe chargée de vendre des commandites pour des événements entièrement détenus par Evenko et Spectra : Osheaga, les Francos et le Festival international de jazz de Montréal, entre autres.

« Si Evenko détient 25 % de JPR et de tout le reste des événements, qu’est-ce qui finira en tête de liste lorsque viendra le temps de rechercher des commandites ? demande M. Rozon. C’est naturel chez l’humanité. »

Marque endommagée ?

Les trois actionnaires de JPR ont-ils acquis une entreprise dont la réputation était difficile, voire impossible, à réhabiliter en raison du scandale qui a coûté la vie à son fondateur ? Une marque « est plus forte que son propriétaire », répond M. Rozon interrogé sur le sujet.

Ce dernier reconnaît que les affaires auraient pu être plus « difficiles » en matière de sponsoring dans les années qui ont suivi la vente de JPR, avant d’ajouter que la marque était reconnue « à l’international ». Selon le contrôleur PwC, qui supervise le processus de vente de JPR, la marque valait 20 millions en 2022. Malgré des pertes de 12 millions accumulées par le groupe au cours des cinq dernières années, des actifs comme le salon Les gags restent très populaires, selon les documents envoyés aux acheteurs potentiels de l’entreprise.

Sur le marché québécois, le fondateur de JPR est toutefois toujours associé au spécialiste de l’humour même s’il l’a vendu il y a cinq ans. C’est le constat que fait Mesure Média, spécialisée dans l’analyse de données pour analyser ce qui se dit et écrit dans les médias sur une thématique particulière. Pour demande de La pressele cabinet se penche sur le cas de M. Rozon depuis 2017.

«En couverture, chaque fois qu’on parle de Gilbert Rozon, on parle de Juste pour rire», affirme le président de Mesure Média, Pierre Gince. Globalement, cela a généré, à son bénéfice et au bénéfice de la marque, un déficit de réputation qui ne cessait de s’accroître. »

Le fondateur et ex-président de JPR ne s’est pas manifesté pour tenter de racheter le spécialiste de l’humour. Sa crainte : assister à un démantèlement du groupe. Il espère que l’entreprise sera rachetée par un repreneur qui « aime la marque » et qui « comprend le contexte francophone ».

Lire « Les autres rocks de Juste pour rire »

L’histoire jusqu’ici

Octobre 2017 : Gilbert Rozon est accusé d’inconduites sexuelles par une dizaine de femmes. Il a été acquitté en décembre 2020.

Mars 2018 : ICM Partners – désormais propriété de Creative Artists Agency – rachète JPR.

Mai 2018 : Bell (26 %) et Evenko (25 %) deviennent actionnaires.

5 mars 2024 : JPR se met à l’abri de ses créanciers et supprime 70 % de ses effectifs, soit 75 postes. Le festival Juste pour rire/Juste pour rire est annulé.

Apprendre encore plus

  • 17 mai
    Date limite, selon le contrôleur, pour finaliser la vente de Juste pour rire

    Source : pwc

    15
    Nombre d’ententes de confidentialité signées par les parties intéressées à acheter Juste pour rire

    Source : pwc

 
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