Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a appelé jeudi à un financement accru pour la force de sécurité internationale en Haïti, tout en exhortant les autorités de transition à avancer rapidement vers des élections dans ce pays ravagé par les gangs.
Le secrétaire d'Etat lui-même a annoncé 45 millions de dollars d'aide humanitaire supplémentaire, exhortant d'autres pays à contribuer au financement de cette force soutenue par les Etats-Unis et l'ONU pour soutenir la police haïtienne, débordée par des bandes criminelles dont la violence a aggravé la crise.
« En ce moment critique, nous avons besoin de plus de financement. Nous avons besoin de plus de personnel pour soutenir et atteindre les objectifs de cette mission », a déclaré Antony Blinken lors d’une conférence de presse, ajoutant en français : « Nous sommes avec vous ! »
Au siège de la Mission multinationale de soutien à la sécurité (MMAS), la force de police dirigée par le Kenya censée rétablir la sécurité, le secrétaire d'Etat a rencontré des responsables de la sécurité haïtienne et internationale.
Washington, qui ne fournit pas de troupes à cette force mais en est le principal contributeur financier et matériel, espère d'autres contributions pour assurer la pérennité de son financement.
– « Préparation des élections » –
Blinken, le plus haut responsable américain à se rendre en Haïti depuis 2015, est arrivé à Port-au-Prince deux mois après que le Kenya ait envoyé des policiers dans le cadre de la force internationale tant attendue.
Arrivé dans la matinée, M. Blinken a tenu plusieurs réunions à la résidence de l'ambassadeur américain.
Lors de sa rencontre avec le Premier ministre par intérim Garry Conille, il a noté de « réels progrès » dans le travail initial des forces internationales avec la police haïtienne.
« La sécurité est la base de tout ce qui va se passer ensuite, y compris la préparation des élections de l'année prochaine, mais aussi les services de base au peuple haïtien », a-t-il déclaré.
Le Premier ministre haïtien a reconnu une situation « extrêmement complexe » mais avec un certain optimisme. « Si nos partenaires nous soutiennent et s’engagent à nos côtés, nous atteindrons nos objectifs », a-t-il dit, saluant des progrès « tout à fait remarquables ».
« C’est un moment de grand défi, mais aussi d’espoir pour Haïti », a ajouté Blinken lors d’une conférence de presse avec le coordinateur du conseil de transition présidentielle, Edgard Leblanc Fils. « La prochaine étape cruciale dont nous avons parlé est la mise en place d’un conseil électoral. Nous espérons qu’il sera mis en place bientôt », a-t-il souligné.
Edgard Leblanc Fils a dit espérer pouvoir « présenter » ce conseil électoral dès la semaine prochaine avec pour objectif des élections en novembre 2025 et une passation de pouvoir en février 2026.
Haïti n’a pas organisé d’élections depuis 2016.
– Les bandits « ne sont même pas inquiets » –
Avec quelque 400 policiers arrivés cet été, sur les 2.500 prévus à terme, le MMAS tarde à se déployer, même si les responsables assurent qu'il a permis de reprendre « le contrôle d'infrastructures essentielles, comme l'aéroport » de la capitale, et de rouvrir des routes qui ont facilité le retour de milliers de déplacés haïtiens.
Mais deux mois après son arrivée, les habitants de la capitale commencent à perdre patience face au manque de résultats concrets.
« Les exactions des gangs continuent et les bandits ne sont même pas inquiétés », déplorait récemment auprès de l'AFP Watson Laurent, chauffeur de taxi-moto de 39 ans.
Le gouvernement haïtien a également étendu mercredi l'état d'urgence à l'ensemble du pays.
La visite de M. Blinken coïncide également avec une panne de courant massive à Port-au-Prince ces derniers jours, après qu'un groupe de manifestants a pris d'assaut une centrale électrique.
Les violences des groupes armés s'étaient intensifiées au début de l'année, forçant le controversé Premier ministre, Ariel Henry, à démissionner.
Le secrétaire d'Etat américain s'est ensuite rendu en République dominicaine, qui partage l'île d'Hispaniola avec Haïti et entretient des relations notoirement tumultueuses avec son voisin.
Blinken y rencontrera vendredi le président nouvellement réélu Luis Abinader, quelques jours après que son pays a autorisé les États-Unis à saisir l'avion utilisé par le président vénézuélien Nicolas Maduro dans le cadre des sanctions américaines contre Caracas.
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