Le Premier ministre canadien Justin Trudeau a subi un revers politique majeur mercredi avec l’annonce surprise de son principal allié de gauche qu’ils mettaient fin à leur accord politique pour soutenir le gouvernement minoritaire libéral.
Le chef du gouvernement n’est pas automatiquement obligé de convoquer de nouvelles élections, mais il devra trouver de nouveaux soutiens au Parlement pour survivre aux votes de confiance.
C’est dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux que le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, a annoncé qu’il se retirait de cette alliance conclue il y a trois ans.
« Je ne vais pas faire de politique aujourd’hui », a déclaré le premier ministre canadien, interrogé en marge d’un voyage dans une école de la province de Terre-Neuve-et-Labrador, dans l’est du pays.
Dans son message, M. Singh n’a pas mâché ses mots contre ses anciens alliés : « Les libéraux sont trop faibles, trop égoïstes et trop proches des ultra-riches pour se battre pour le peuple. »
Il a également accusé Justin Trudeau de ne pas être en mesure de faire face à l’opposition conservatrice. Cette dernière, dirigée par Pierre Poilievre, est largement en tête dans les sondages à l’approche des élections législatives qui se tiendront d’ici fin octobre 2025.
Selon un sondage Angus Reid publié mercredi, les conservateurs devancent largement les libéraux, avec 43% des intentions de vote contre 21%. Quant au NPD, on lui attribue 19%.
Jagmeet Singh tiendra une conférence de presse jeudi.
Après que les libéraux de Justin Trudeau ont remporté de justesse les élections anticipées de septembre 2021, le NPD a accepté de soutenir le parti pour le protéger des votes de confiance qui pourraient faire tomber le gouvernement.
En échange de cet appui, le NPD a pu adopter plusieurs programmes sociaux, dont un nouveau programme de soins dentaires pour les Canadiens à faible revenu et une loi contre le recours à des travailleurs de remplacement lors d’une grève.
L’accord devait durer jusqu’en juin 2025.
– « Pas d’élections en hiver » –
« Mais la pression augmentait chez les néo-démocrates qui voulaient retrouver leur liberté de parole à l’approche des élections », explique à l’AFP Stéphanie Chouinard, professeure de science politique au Collège militaire royal du Canada.
Mais cela ne signifie pas que le NPD ne soutiendra plus les projets de loi du gouvernement, affirment les analystes politiques.
Et malgré ces bouleversements politiques, les experts ne s’attendent pas à des élections dans les semaines à venir.
« Les néo-démocrates ne veulent pas nécessairement faire tomber le gouvernement et les conservateurs ne peuvent pas le faire à eux seuls », a déclaré à l’AFP Félix Mathieu, professeur de sciences politiques à l’Université de Winnipeg.
La Chambre des communes du Canada compte actuellement 154 députés libéraux, 119 conservateurs, 32 députés du Bloc québécois, 24 députés du NPD, deux verts, trois indépendants et quatre sièges vacants.
« Il y a fort à parier que le gouvernement tombera autour du budget, au printemps. Car dans l’immédiat, aucun groupe minoritaire n’a intérêt à ce que les élections se tiennent maintenant, à part les conservateurs », croit Mme Chouinard.
Et les petits partis « ont besoin de temps pour renouer avec leur propre base, pour essayer de trouver des candidats vedettes… », ajoute Lori Turnbull, professeure à l’Université Dalhousie.
De plus, trois élections provinciales sont prévues à l’automne et, par convention, les élections législatives n’ont pas lieu en même temps. Et d’ajouter Stéphanie Chouinard, « en règle générale, on évite les élections en hiver à cause du climat, car on peut avoir des tempêtes ».
soi/co
