Alors que l’interdiction des vols intérieurs en cas d’alternative ferroviaire de moins de 2h30 est officiellement entrée en vigueur mardi dernier, le gouvernement veut déjà aller plus loin. C’est en effet ce qu’a annoncé le ministre délégué aux Transports, Clément Beaune, ce mercredi au micro de France info.
Vols intérieurs : l’interdiction entre officiellement en vigueur mais ne change finalement rien
« Je le dis, on ira plus loin, on ira plus loin »a-t-il assuré, expliquant que la liste des vols intérieurs courts interdits “sera revu deux fois par an pour voir si l’offre ferroviaire s’améliore” et constatant que le texte était valable trois ans, conformément à un accord avec Bruxelles.
“Ma responsabilité de ministre des Transports est justement d’améliorer les liaisons ferroviaires pour que de plus en plus, cette règle des 2h30 entraîne la fermeture des compagnies aériennes”, il ajouta. Et d’insister : Nous fermons trois lignes, et nous continuerons. Peut-être allons-nous aussi resserrer progressivement cette règle de 2h30 pour la porter par exemple à 3h du matin. “.
4 heures : “C’est possible, mais il faut développer le rail en parallèle”
Cependant, peu de liaisons seraient concernées par un passage à trois heures : éventuellement, Paris-Mulhouse (2h43 en TGV), mais cet aéroport est franco-suisse et dessert également Bâle. La liaison Paris-Limoges pourrait également en faire partie, lors de la rénovation de la voie ferrée.
Interrogé sur le seuil de 4 heures préconisé par la Convention citoyenne pour le climat, Clément Beaune a répondu que “C’est possible, mais il faut développer le rail en parallèle”citant l’achat de TGV supplémentaires et le projet de construction d’une ligne à grande vitesse entre Bordeaux et Toulouse.
---Impact limité jusqu’à présent
Pour l’instant, l’entrée en vigueur de l’interdiction des vols intérieurs, lorsqu’il existe une alternative ferroviaire de moins de 2h30 “avec un service satisfaisant”, ne condamne que les vols entre Paris-Orly et Bordeaux, Nantes et Lyon. L’impact de cette mesure est d’autant plus limité qu’Air France l’avait anticipé et avait pris des mesures pour supprimer les liaisons entre Orly et Lyon, Nantes et Bordeaux, sachant que Nantes devait déjà s’arrêter avant la crise sanitaire.
Sans oublier que les vols en correspondance vers Paris-CDG restent protégés grâce à un subtil aménagement législatif. En effet, le texte prévoit que, dans le cas où l’aéroport est directement desservi par une gare TGV, c’est cette gare qui est prise en compte dans le calcul. Un concept qui réduit considérablement les possibilités d’une alternative ferroviaire suffisante en moins de 2h30 et qui protège ainsi le trafic reliant les deux hubs d’Air France à Paris-CDG et Lyon-Saint-Exupéry.
Un parcours du combattant
Initialement issue des propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat, présentées en 2020, la mesure a ensuite été inscrite dans la Loi Climat et Résilience de 2021. Mais elle a ensuite fait l’objet d’une plainte déposée auprès de la Commission européenne par l’Union des Français. Airports (UAF) et la branche européenne du Conseil international des aéroports (ACI Europe) en septembre 2021, puis par l’Union des compagnies aériennes autonomes (Scara). Les organisations ont dénoncé l’absence d’étude d’impact suffisamment conséquente.
Loi Climat et Résilience… ou comment freiner les industriels de bonne volonté
Les deux associations aéroportuaires assurent que les lignes concernées ne représentent que 0,24 % des émissions de CO2 du transport aérien intérieur français, soit 0,04 % des émissions du transport en France. En revanche, selon les calculs fournis par Paris à la Commission européenne, la fermeture des axes Orly-Bordeaux, Orly-Lyon et Orly-Nantes « entraîne une réduction totale des émissions de CO2 dues au transport aérien de 55 000 tonnes » par an sur la base du trafic 2019. Fin 2022, Bruxelles est finalement parvenue à trouver un compromis avec Paris conduisant à l’entrée en vigueur de la mesure. Or, l’Europe a imposé que la mesure fasse l’objet d’une évaluation par le ministère au bout de 24 mois et que celle-ci lui soit transmise.
(Avec AFP)