Le premier Conseil d’administration de Bank Al-Maghrib pour l’année 2023 se déroule dans un contexte national et international particulier marqué par la persistance d’un niveau d’inflation élevé de 8,9% à fin janvier, une amélioration de la répartition des crédits bancaires, une accélération continue de la masse monétaire, et des perspectives de croissance favorables, souligne CDG Capital Insight dans son « Flash Pré-Board of Bank Al-Maghrib », publié mercredi 15 mars.
Après une période d’observation, et suite à la montée de l’inflation et surtout à la transmission de la hausse des prix des biens échangeables aux biens non échangeables, le Conseil d’administration de Bank Al-Maghrib a décidé, à la fin des deux dernières réunions, tenues les 27 septembre et 20 décembre 2022, pour relever le taux directeur (TD), deux fois de suite, de 50 Pb, le ramenant ainsi de 1,50% à 2,50% à fin 2022, rappelle CDG Capital Insight.
Cette décision vise essentiellement à prévenir tout désancrage des anticipations d’inflation et à assurer les conditions d’un retour rapide à des niveaux conformes à l’objectif de stabilité des prix, souligne la même Source.
Pour le prochain conseil d’administration de BAM, CDG Capital Insight a évoqué les principaux facteurs qui pousseront vraisemblablement Bank Al-Maghrib à relever son taux directeur.
Liquidité bancaire
Il souligne ainsi que le déficit de liquidité du système bancaire, après la baisse enregistrée au cours des deux derniers mois de l’année 2022, reprend sa hausse au cours du mois de janvier 2023. Ainsi, la moyenne hebdomadaire du déficit est passée à -87,3 milliards dirhams (MrdDH) enregistré en janvier 2023 contre -86,5 milliards de dirhams un mois plus tôt, soit une légère hausse de l’ordre de 800 millions de dirhams.
Cette nouvelle tendance haussière s’explique par une dégradation conjuguée de trois facteurs indépendants de la liquidité bancaire. Premièrement, une baisse importante des avoirs de réserve officiels d’environ -10,9 milliards de dirhams, enregistrée au cours des mois de décembre 2022 (-6,9 milliards de DH) et janvier 2023 (-4 milliards de DH) pour tomber à 333,6 milliards de DH. Le deuxième facteur est lié à la poursuite de la forte augmentation de la circulation fiduciaire qui a augmenté de 9 milliards de MAD sur la même période pour s’établir à 357 milliards de MAD, soit +7 milliards de MAD en décembre 2022 et +2 milliards de MAD en janvier 2023.
Le troisième facteur concerne les créances nettes sur l’administration centrale qui, après une baisse enregistrée sur la période juillet-novembre 2022, ont considérablement augmenté au cours des deux derniers mois : de 21 milliards de dirhams à 316 milliards de dirhams, avec +19 milliards de dirhams en décembre 2022 et +2 MDH le mois suivant.
Dans ces conditions, Bank Al-Maghrib a continué à combler le déficit du système bancaire, à travers ses interventions auprès des banques, avec une moyenne hebdomadaire d’environ 101,9 milliards de DH enregistrée en janvier 2023 contre 103,3 milliards de DH le mois précédent.
TMP interbancaire
L’encours moyen des injections de BAM au cours du mois de janvier est composé de : 56,6 milliards sous forme d’avances à 7 jours, 21,5 milliards via des opérations de repo à long terme et 23,8 milliards dans le cadre de prêts garantis à long terme, selon au « Flash pré-Board de Bank Al-Maghrib ».
CDG Capital Insight rappelle que depuis le déclenchement de la crise du Covid-19 et afin d’éviter tout dérapage à la hausse du TMP (Taux Moyen Pondéré), la banque centrale continue de servir l’ensemble de la demande des banques durant Appels d’offres à 7 jours, enregistrant ainsi des excédents par rapport au déficit de liquidité du système bancaire dont le montant a été d’environ 14,6 milliards de dirhams au cours du mois de janvier 2023.
De même, poursuit la même Source, BAM a décidé, dès la deuxième semaine de janvier 2023, de recourir à un instrument structurel de politique monétaire, en l’occurrence des opérations d’open market, à travers l’organisation hebdomadaire, tous les lundis de la semaine, d’un appel d’offres pour l’achat de bons du Trésor sur le marché secondaire, dont l’échéance est inférieure à un an. BAM a fixé un plafond de 25 milliards de dirhams pour ces opérations dont l’encours au 13 mars 2023 s’élève à 15,8 milliards de dirhams.
Dans ce contexte, CDG Capital Insight indique que le TMP interbancaire, représentant la cible opérationnelle de la politique monétaire, a évolué à des niveaux quasiment identiques au nouveau taux directeur (2,5%).
Taux de débit et de crédit
Dans cette étude, préparée par Ahmed Zhani, Chief Economist chez CDG Capital, il est également souligné que le prochain Board de BAM est appelé, avant de prendre une décision sur le taux directeur, à prendre en compte l’évolution du Global Weighted Average Rate Débiteur (TMPGD). Un taux qui a enregistré une hausse de 26 Pbs au 4ème trimestre 2022 pour atteindre 4,50%. Cette hausse recouvre une hausse de 39 Pbs des taux correspondant aux prêts aux particuliers à 5,72% et de 26 Pbs à 4,30% pour ceux destinés aux entreprises.
La hausse des taux associés aux prêts accordés aux entreprises provient d’une augmentation de 24 Pbs de ceux des crédits d’équipement et de 26 Pbs de ceux des facilités de trésorerie, explique encore CDG Capital Insight.
Par taille d’entreprise, les tarifs ont augmenté de 10 Pbs pour les TPE (Très Petites et Moyennes Entreprises) et de 32 Pbs pour les grandes entreprises.
Dans le même temps, la hausse de 39 bp des crédits accordés aux particuliers résulte d’une hausse de 13 bp pour les crédits à l’habitat contre seulement 1 bp pour les crédits à la consommation.
Quant aux taux des dépôts bancaires, ils ont enregistré des hausses respectives de 46 bps pour les dépôts à terme à 1 an contre seulement 20 bps pour ceux à 6 mois.
En résumé, CDG Capital Insight estime que la transmission des deux hausses du taux directeur, de 100 bps au 4ème trimestre 2022, aux taux débiteurs et créditeurs reste partielle. De même, l’impact attendu sur la distribution des crédits (canal du crédit) n’a pas encore été identifié.
Hausse continue de l’inflation
CDG Capital Insight indique également que le Maroc, comme la quasi-majorité des pays au niveau international, enregistre un glissement à la hausse de l’inflation (8,9% à fin janvier 2023). Cette envolée est due, entre autres, à la forte hausse des prix des matières premières et de l’énergie au niveau international.
De même, le prochain BAM Board se déroule dans un contexte international marqué par la poursuite du resserrement des politiques monétaires, adopté par la quasi-majorité des banques centrales.
Compte tenu de l’ensemble de ces évolutions et perspectives, CDG Capital estime qu’il est plus probable que le Conseil de Bank Al-Maghrib augmente le taux directeur pour la troisième fois consécutive, avec une nouvelle hausse prévue de 50 Pb, le ramenant à 3 %.