La mesure interdisant, d’ici 2035, la vente de voitures neuves à moteur thermique – y compris les véhicules hybrides – bat son plein dans les institutions européennes depuis l’annonce de dernière minute du gouvernement allemand de ne plus soutenir le projet. Une décision qui interpelle et agace nombre d’acteurs bruxellois. La Commission européenne considère ainsi que l’impasse doit essentiellement se dénouer à Berlin, étant liée au revirement du FDP (Parti libéral) de Christian Lindner, l’une des composantes de la coalition au pouvoir. Et elle n’entend pas, à ce stade, revoir sa copie. Une impasse durable ? Pas nécessairement.
Que se passe-t-il dans les coulisses ?
Malgré les apparences, la messe n’a pas encore été dite à Bruxelles, où l’accent est notamment mis sur les échanges que mènent encore actuellement le gouvernement allemand et la Commission. Elles portent sur les garanties demandées par Berlin sur les carburants de synthèse (e-kérosène, e-méthanol…).
Le gouvernement allemand avait obtenu, lors des négociations, une note permettant aux constructeurs de continuer à vendre des véhicules à moteur thermique utilisant des carburants neutres en CO2. C’est cette dérogation que le FDP veut cimenter. Une Source européenne veut croire que, malgré les affirmations officielles, la Commission finira par mettre une nouvelle piste sur la table. Reste à savoir quand et si cela signifiera que le texte, déjà adopté par le Parlement européen, devra être rouvert.
À qui profite le crime ?
---Cette volte-face serait, selon certains, avant tout dans l’intérêt du FDP allemand, qui s’en servirait pour faire pression sur ses autres partenaires de la coalition sur le nucléaire. Mais, à Bruxelles, certains veulent saisir l’instant. La droite européenne du Parti populaire européen (PPE) au Parlement européen et, en particulier, ses représentants allemands appellent les autres États membres à suivre le mouvement de blocage. Ils dénoncent une mesure qui va freiner l’innovation technologique et détruire des milliers d’emplois.
L’Italie de Giorgia Meloni veut aussi profiter de cette situation alors que Rome s’oppose avec véhémence à cette interdiction des moteurs à combustion, tout comme la Pologne. Mais contrairement au FDP allemand qui veut autoriser les moteurs utilisant des carburants de synthèse, l’Italie a un vrai problème de fond avec l’ensemble de la mesure. “Folie, bêtise absolue, choix idéologique ou de mauvaise foi”, a récemment déclaré Matteo Salvini. Le président du Conseil italien a promis de fédérer davantage d’opposants.
Et Paris dans tout ça ?
Jusqu’à fin 2021, la France était contre et plaidait pour que l’objectif 2035 soit reporté et que les véhicules hybrides continuent à être commercialisés. “Les hybrides rechargeables sont une bonne solution de transition, ils doivent être une option de transition à long terme”, a indiqué l’Elysée.
Mais la France a alors assumé, au premier semestre 2022, la présidence du Conseil de l’UE et a décidé de mener à bien le texte, puis de se ranger derrière le compromis. Les constructeurs français misent désormais sur le tout électrique et se retrouvent donc, eux aussi, en attente face à ce nouveau blocage allemand.