News Day FR

« Rire peut servir à mettre le drame à distance » selon le sociologue Jean Viard

Le festival international du film de comédie de l’Alpe d’Huez dévoile ce samedi 18 janvier son palmarès. L’occasion de s’interroger sur la place du rire dans notre société avec le sociologue Jean Viard.

Publié le 18/01/2025 10h00

Temps de lecture : 3min

« Rire est un moment de partage » selon le sociologue Jean Viard. (ELVA ETIENNE / MOMENT RADIO FRANCE)

Le festival international du film de comédie de l’Alpe d’Huez se termine ce samedi 18 janvier. Il permet chaque année de découvrir les comédies qui arriveront dans nos cinémas. Le succès du film Un petit quelque chose en plus en 2024 et celui de Une fanfare Ces dernières semaines témoignent de la bonne santé des comédies françaises. Le public recherche des moments de détente.

franceinfo : Quelle est la place du rire dans notre société aujourd’hui ?

Jean Viard: Il suffit d’écouter la radio pour le comprendre. Les comédiens sont partout. Nous voyons également beaucoup de spectacles de stand-up. Le succès du film Un petit quelque chose en plus C’est exceptionnel car a priori on a toujours peur de rire de la différence. Par exemple, on peut parler d’humour juif. Les juifs peuvent rire entre eux sur certains sujets parce que c’est une façon d’éviter le drame, mais quand on n’est pas juif, on ne rit pas. Le rire peut à la fois intégrer et diviser. En ce moment, dans notre société, nous cherchons à faire rire les gens. On les met partout parce que c’est aussi une façon de mettre à distance la mort et le drame. Il faut faire la distinction entre le rire. Nous avons un rire naturel ; on vous chatouille, vous riez. Il y a aussi un rire plus culturel, sur les codes qui nous rassemblent.

-

Le rire crée de la cohésion dans une société, mais il peut aussi diviser, voire exclure. Il ne faut pas attaquer les plus faibles. On ne peut pas rire d’une personne handicapée, on ne peut pas rire d’un gars qui a du mal à marcher parce qu’il est trop gros. On entre alors dans une violence radicale.

Le rire peut-il aussi nous permettre d’échapper à certains moments de désespoir, voire de lutte ?

Bien sûr ! Regardez ce qui s’est passé à l’Assemblée nationale cette semaine, lorsque le premier ministre s’est perdu dans ses papiers. Il a tout mélangé et joué avec humour. Tout le monde a éclaté de rire parce qu’on avait besoin de se détendre, alors il a surjoué. En soi, cela n’avait rien de drôle. C’est aussi un phénomène biologique. Le rire provoque la libération de plusieurs substances dans le corps comme les endorphines et cela nous fait du bien. Il y a aussi des gens pour qui rire est presque une philosophie de vie.

Le rire est-il l’une des nombreuses interactions nécessaires dans une journée ?

Dans une journée, nous aurons en moyenne une quarantaine d’interactions. Il peut s’agir de tenir la porte à quelqu’un, de faire une blague, de lui dire bonjour. Ce n’est pas nécessairement une bonne conversation. Et on peut nous faire rire quand quelqu’un fait une bonne blague, même si nous ne le connaissons pas. C’est fraternel. Cela contribue à la cohésion sociale et à l’apaisement des tensions. Le rire ne doit pas être agressif. L’objectif n’est pas d’en faire une arme de combat contre les autres, c’est d’abord d’en faire une arme d’unité.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 
-

Related News :