In 1973, Robert Charlebois performed a song by Pierre Calvé, entitled Vivre dans ce pays. Cela résonne encore et résonne très fort aujourd’hui. Voici le texte :
Vivre dans ce pays
C’est comme vivre aux États-Unis
Pollution, les mêmes voitures
Les mêmes patrons, les mêmes impôts
Les petits, les grands
Dans la même galère
Ceux qui sont partis
Pour chercher un meilleur endroit
J’ai compris que dans d’autres pays
Dans d’autres Amériques, en Espagne ou à Marseille
A part le soleil
C’est pareil partout
Vivre dans ce pays
C’est comme vivre aux États-Unis
Les mêmes danses, les mêmes chansons
Le même confort et quand tu es mort
Il y a beaucoup de gens qui jouent contre toi pour de l’argent
Ceux qui sont partis
Pour chercher ailleurs plus loin
J’ai inventé un monde en fumée
D’amour et de paix, un nouveau monde
Parti de zéro
Comme à San Francisco
Vivre dans ce pays
C’est comme vivre aux États-Unis
C’est de la violence, de la répression
La loi du plus fort qui gagne encore
Sur ceux qui briseraient les conventions
Ceux qui sont partis
Pour trouver une solution
Qui a promis un nouveau soleil
Un nouveau pays vers lequel ils suivront
Jure qu’il y en aura des milliers, des millions
Quand ils reviennent
Quand ils reviennent
Cette chanson a suscité de vives réactions à l’époque. En 1973, nous étions en pleine ferveur nationaliste. La fleur de lys pousse partout. « Le Québec aux Québécois », c’est le cri de ralliement d’une jeunesse engagée. Et maintenant, le moins ordinaire de nos chanteurs, la voix de notre révolution, le roi de notre propre rock, nous dit que vivre dans notre pays, c’est comme vivre aux États-Unis. Ayoyé ! Ça fait mal. Face à ce sombre constat, la chanson laisse encore espérer un monde meilleur. Malheureusement, l’utopie hippie s’est depuis effacée.
Cinquante ans plus tard, vivre dans ce pays signifie plus que jamais vivre aux États-Unis. Oubliez les mêmes taxes. Le reste, les mêmes voitures, les mêmes patrons, les mêmes chansons, c’est tellement notre réalité. Au moins dans les années 1970, nous avions une certaine fierté nationale. Les Leclerc, Vigneault, Léveillée, Charlebois, Dufresne rythmaient notre quotidien.
Aujourd’hui, les cinq artistes les plus écoutés au Québec sont : Taylor Swift, Post Malone, Morgan Wallen, Zach Bryan et Billie Eilish. Nous vivons dans le même battre que nos voisins.
Dans les années 1970, nos héros étaient des gars d’ici qui dominaient leurs adversaires sur la glace, Lafleur, Savard, Cournoyer. Aujourd’hui, nos héros sont les Américains, Caufield et Hutson, dont les beaux jeux nous font parfois crier de joie.
Si, en 1973, Calvé et Charlebois dénonçaient le fait que nos valeurs étaient les mêmes que celles de l’empire américain, aujourd’hui c’est le fond et la forme que l’on emprunte à l’oncle Donald. Le même Facebook, le même Netflix, le même TikTok. La culture qui était notre protection contre l’assimilation est violée. Et notre identité continue de s’échapper, comme l’air s’échappe d’un ballon troué.
C’est pourquoi lorsque Trump dit que le Canada devrait avoir 51 anse État des États-Unis, on ne se fâche guère. Nous réduisons notre pays à un cinquante et unième pays étranger et nous ne montons pas aux barricades.
Notre patriotisme n’est pas affecté, car notre patriotisme est figé. Rabais. Oublier. On a dit NON deux fois au Québec et on n’a jamais dit complètement OUI au Canada, ce qui veut dire que la majorité d’entre nous vivons dans une ville, une région ou même une nation, mais pas un pays. Ce n’est pas la façon dont les Américains vivent dans leur pays. Pas comme si les Français vivaient dans leur pays.
Si Trump menaçait d’annexion n’importe quel autre pays dans le monde, ses paroles seraient reçues comme une déclaration de guerre. Nous le recevons comme une mauvaise plaisanterie, un moyen de pression voire une alternative.
Il est temps de choisir notre pays, notre soleil. L’aimer, le défendre et en être fier. Puisse le mépris de Trump enflammer en nous le désir d’être nous. Cela aurait été utile pour une fois.
Il est temps de dire haut et fort dans quel pays nous vivons.
Related News :