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l’œuvre qui fait entendre la violence si elle ne parvient pas à la faire taire

Peindre et composer : un jardin secret dévoilé

“J’ai toujours peint” confie Zad Moultaka. Bien qu’il ait commencé simultanément la musique et la peinture, il a longtemps gardé cette dernière comme un espace intime, presque secret. Ce n’est que plus tard que le dialogue entre les deux disciplines se formalise dans son œuvre : « Chaque pratique a son espace propre : la composition musicale se déroule dans un espace lent, tandis que l’art plastique se déroule dans une dynamique rapide. Mais au fond, c’est un seul et même espace, avec des visages différents. »

Bien qu’il ait commencé simultanément la musique et la peinture, il a longtemps gardé cette dernière comme un espace intime, presque secret. Ce n’est que plus tard que le dialogue entre les deux disciplines se formalise dans son œuvre. // Portrait de Zad Moultaka © A. Sidoli

Né au Liban, Moultaka ne force jamais son identité à s’imprimer dans ses créations. « Mon identité fait partie de moi comme mon bras fait partie de mon corps. Je ne le contrôle pas : il se manifeste par des odeurs, des couleurs, des sons, des goûts. Mes œuvres sont irriguées par tout cela. » Cette approche organique insuffle à ses créations une profondeur particulière. Les musiques contemporaines comme les arts visuels deviennent des lieux d’écho, où se croisent histoires anciennes et questions actuelles.

Zad veut lutter contre la paupérisation spirituelle dont il est aussi victime

Fasciné par les matériaux historiques et les histoires anciennes, Zad Moultaka puise une énergie unique dans les civilisations passées. « Contrairement à notre monde contemporain, les civilisations anciennes étaient liées à l’invisible, au mystère et au sacré. Cette énergie transparaît dans leurs textes et leurs œuvres, et elle doit nous nourrir aujourd’hui pour sauver notre monde de son aspect terriblement creux. »

Šamaš, criant la paix par Zad Moultaka. Réacteur bombardier des années 1950. © Léa Degay

Pour l’artiste, créer est une forme de résistance : « Je veux lutter contre l’appauvrissement spirituel dont je suis aussi victime. Nous sommes tous responsables et nous devons ouvrir des horizons plus profonds. » Dans ce combat, il s’inspire de figures lumineuses comme Christian Bobin, Etel Adnan, Mark Rothko et György Ligeti. « Heureusement, les génies continuent de nous éclairer. »

« Mon identité fait partie de moi comme mon bras fait partie de mon corps. Je ne le contrôle pas : il se manifeste par des odeurs, des couleurs, des sons, des goûts. Mes œuvres sont irriguées par tout cela » confie l’artiste.

Shamashmélange entre passé et présent

Šamaš, crie à la paix est irrigué par le mélange entre passé et présent, plongeant les spectateurs dans « une boucle sans fin » presque 12 minutes. Comme le palindrome de son nom, il se répète à l’infini, illustrant les alternances de justice et de violence qui semblent imparables et interrogeant la capacité de l’humanité à rompre avec ses démons.

Shamash, criant à la paix par Zad Moultaka à l’Institut du monde arabe. © Léa Degay

Présenté pour la première fois en 2017, Shamash est aujourd’hui empreint d’actualités douloureuses. L’installation, qui fait entendre voire faire taire la violence, entre en résonance avec les différents conflits présents au Moyen-Orient, notamment en Palestine et au Liban. Cependant, Zad Moultaka s’efforce de prévenir que l’œuvre est intemporelle et n’a pas vocation à cibler les coupables : « Šamaš parle de violence humaine, quelle que soit son identité. Elle ne prend pas parti, car les victimes d’hier sont les bourreaux d’aujourd’hui, et vice versa. »

A travers cette œuvre, Zad Moultaka lance un vibrant appel : que cesse la violence. Un cri pour la paix, à voir et à écouter, en boucle, à l’Institut du monde arabe jusqu’au 6 avril 2025.

 
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