A 58 ans, Philippe Vasseur a mis sa carrière d’acteur entre parenthèses et s’épanouit désormais en tant que plasticien. Les années AB Productions, la côte picarde, ses peintures inspirées de la mer et des bateaux, la rencontre avec celui que tout le monde connaît sous le nom de José d’Hélène et les garçons. [Première publication le 18 août 2024]
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Philippe Vasseur est un gars simple et discret. Sympathique aussi. Notoriété ? Une anomalie. Un concours de circonstances qui a duré… 32 années. En décembre 2023, l’acteur a dit au revoir à José, ce personnage joué pendant tant de saisons et est rentré chez lui.
Cayeux-sur-Mer, sa plage de galets, son chemin de planches et ses cabanes qui colorent l’été. Philippe habite un peu plus loin, au calme, dans une maison acquise en 2007. Quelques minutes de marche dans des dunes préservées et nous voilà face à la mer, magnifique sous un grand ciel bleu ce jour-là. “La nature est encore intacte ici. Il n’y a pas de bâtiments dégoûtants, comme on peut en voir ailleurs sur les côtes. C’est mon petit coin, il n’y a personne. J’aime être tranquille ici. je me sens libre.»
En s’installant sur la côte picarde, Philippe renoue avec son enfance. Né à Amiens, il a grandi à Cayeux. Sa mère y achète un salon de coiffure en 1974. Philippe a alors 8 ans. des années, chaque jour est une aventure : “Quand on est enfant ici, c’est le terrain de jeu idéal, il y a la mer, le sable, les dunes avec les blockhaus. A l’époque, il fallait faire attention, il y avait encore beaucoup de mines et d’armes qui traînaient. Je n’étais jamais à la maison sauf quand il pleuvait !“
Sept années de bonheur, de jeux et de bricolage. Philippe est un manuel et cette compétence va précipiter son destin. Collège à Abbeville, école d’art à Roubaix, il devient décorateur.
1989, entrée dans l’univers AB Productions, Philippe fabrique des accessoires de tournage pour le club Dorothée et les séries de cette société de plus en plus prolifique. Il participe à la création des décors d’un nouveau programme, Hélène et les garçons. Beau, il est repéré et devient un personnage incontournable.
“La première fois que j’ai joué, je jouais un mousquetaire dans un épisode de Muscle Men et j’avais tellement peur que je me suis dit : ‘ce n’est pas du tout une chose pour moi’. Quelques mois plus tard, ils m’ont proposé le rôle de José dans Hélène et les garçons. Les amis qui travaillaient avec moi sur la décoration à cette époque m’ont dit : ‘si vous ne saisissez pas cette opportunité, vous êtes stupide. Essayez-le, vous verrez. Et ils avaient raison.“
“Au début, la peur m’empêchait vraiment de m’amuser. Il m’a fallu plusieurs mois avant de me détendre et de m’amuser. Je dirais peut-être même deux ou trois ans.“
David Hasselhoff est venu voir comment nous travaillions. Quand on a vu ce grand gaillard arriver sur le plateau, c’était drôle. Les Américains ne travaillent pas du tout de la même manière.
Hélène et les garçons est une immense réussite. 4 à 6 millions de téléspectateurs quotidiens séduits par cette romance sans cesse rejouée, une presse abasourdie multipliant les articles sur ce phénomène de société. Les journalistes critiquent ces jeunes acteurs inexpérimentés devenus des rock stars. La machine AB tourne à plein régime. Les géants américains sont intrigués par ce succès du Made in France.
“C’était lourd de faire un épisode par jour. 26 minutes utiles par jour, à l’époque, qui n’existaient nulle part ailleurs. David Hasselhoff est venu voir comment nous travaillions. Quand on a vu ce grand gaillard arriver sur le plateau, c’était drôle. Les Américains ne travaillent pas du tout de la même manière.“
“Vous savez quand vous arrivez à 7h30 pour vous maquiller, mais vous ne savez pas à quelle heure vous partez. Il faut à tout prix conserver les 26 minutes. Il peut être 22h, 23h. Et le lendemain, vous refaites la même chose, selon l’heure de votre convocation. Si vous n’êtes pas dans les premières séquences, vous pouvez vous permettre de dormir deux ou trois heures de plus. Sinon, c’est fatiguant. Mais c’est un super métier, on gagne bien sa vie, que se passe-t-il ? ! Tout va bien ! J’avais 26 ans.“
Philippe est loin de s’en douter, mais l’aventure lui prendra la moitié de sa vie. A Hélène et les garçons réussir Le miracle de l’amour, La fête de l’amour et Les mystères de l’amour. Le nom change un peu, l’intrigue reste, une romance aux multiples combinaisons.
Les audiences d’antan ne sont plus d’actualité, la consommation télévisuelle ayant été bouleversée par l’explosion du nombre de chaînes et l’apparition des plateformes, mais la série existe toujours, favorisée par ses coûts de production inégalés et l’écriture fertile. de son créateur, Jean-Luc Azoulay. Philippe décèle aussi un ingrédient magique dans cette longévité : “Je n’imaginais pas que cela durerait aussi longtemps. Personne ne l’imaginait, peut-être même pas Jean-luc Azoulay…. C’est la magie de nous avoir réunis car humainement ça colle et quand ça colle sur le plateau, ça colle à l’image. Cela fait trente ans qu’on nous le dit. Les personnes les plus assidues, les plus fines voient la complicité.“
A 58 ans, j’ai le droit de dire que j’ai envie de jouer dans des choses de qualité, de dire des textes de qualité où je prends du plaisir, chose qui me fait bander ! Vraiment ! Dommage que ma carrière d’acteur s’arrête là.
De la complicité, oui, mais des envies venues d’ailleurs aussi. Philippe était déjà entré sur le terrain pour la première fois. Et puis, il est revenu, parce qu’il fallait bien vivre…. En décembre 2023, il décide de franchir le pas et annonce son départ. “Pourquoi as-tu arrêté ? Parce que j’ai passé la moitié de ma vie à dire ces textes. Tant que je m’amusais, ça allait. Avec mon ami Patrick Puydebat, on a fait de bonnes séquences, on a beaucoup ri, malgré les journées chargées, malgré les textes… que je trouvais légers. Factures à payer, vie, enfant à élever. Quand mon fils a fini ses études, j’ai décidé d’arrêter. Je ne m’amusais plus et j’avais du mal à apprendre les paroles, ça devenait trop lourd pour moi, je voulais juste de la qualité. Je ne crache pas dans la soupe. A 58 ans, j’ai le droit de dire que j’ai envie de jouer dans des choses de qualité, de dire des textes de qualité où je prends du plaisir, chose qui me fait bander ! Vraiment ! Dommage que ma carrière d’acteur s’arrête là. Eh bien, ça s’arrête là. Et je ne vais pas pleurer, je ne vais pas attendre près de mon téléphone. C’est fini, c’est fini, fini ! Je vivrai de mes mains. Donc.“
Vivre de ses mains serait idéal. Plasticien sous le nom de Paul Debeauvais, Philippe réalise d’étonnantes peintures en relief, puisées dans un imaginaire nourri par l’Amérique, pays des super-héros dont il dévorait les histoires étant plus jeune. Le Wells Fargo dépasse le porte-avions Nimitz. On imagine aussi Jules Verne de passage. “Le Nautilus est un rêve d’enfant. Quand je suis venu m’installer ici, cela m’a rappelé tous ces souvenirs… La mer, mon enfance, le Titanic, 20 000 lieues sous les mers, les épaves.“
Les mécanismes incrustés dans ses tableaux sont des trompe-l’œil, des moulages de pièces qui autrement seraient trop lourdes. “J’ai demandé au mécanicien local de me donner des pignons de distribution à mouler. Je mélange de la poudre de fer avec de la résine. Je l’ai laissé rouiller dehors et en trois jours, cela a pris dix ans. L’illusion est parfaite. Le résultat est terrible. J’aime les choses patinées. Peut-être que j’étais sur le Titanic, je ne sais pas !“
Maintenant je peux le dire, je mets au défi tous les acteurs de venir faire une série de jours de tournage comme nous l’avons fait et de dire ces lignes. On verra ce qu’ils feront si on ne leur donne que deux prises, s’ils sont bons tout de suite.
Et la comédie ? L’histoire est-elle vraiment terminée ? ? Reverrons-nous Philippe à la télévision ? Lorsqu’il se rend aux castings, des professionnels condescendants lui proposent des figurants. Il y voyait une offense. “A mon petit niveau, j’ai tout appris, travailler vite, apprendre les textes vite, être dans les séquences le plus vite possible. Nous sommes critiqués depuis des années. Maintenant, je peux le dire, je mets au défi tous les acteurs de venir passer des journées de tournage comme nous l’avons fait et de dire ces lignes. On verra ce qu’ils feront si on ne leur donne que deux prises, s’ils sont bons tout de suite. Là, je vais fermer ma bouche.“
“Peut-être que si j’en avais 500 000 followers ou un million, peut-être qu’ils voudraient de moi dans une autre série ou un autre film. C’est peut-être ce qui compte maintenant. C’est votre popularité, peut-être pas votre popularité en tant qu’acteur ou actrice. Je ne sais pas. j’ai perdu les codes.»
Ce que Philippe n’a pas perdu, c’est le sens de l’amitié et sa simplicité. Quand on parlait de lui ce jour-là à Cayeux-sur-Mer, les visages s’animaient, les habitants souriaient : “Philippe est un ami !“
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