Par
Emilie Salabelle
Publié le
22 décembre 2024 à 13h02
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Leurs mains sculpteront demain les costumes des acteurs des théâtres parisiens et d’ailleurs. Pour l’instant, la promotion de première année du diplôme national des métiers d’art et du design (DNMADE) » Costumière et réalisatrice» du lycée polyvalent La Source, à Nogent-sur-Marne (Val-de-Marne) s’efforce de donner forme et vie au projet couture du moment : un chausson personnalisé. Actualités parisiennes se sont glissés dans leur atelier.
Apprenez à travailler pour le spectacle vivant
La première heure de cours vient à peine de commencer au lycée. Dans le préfabriqué qui abrite l’atelier de costumes, l’air se réchauffe lentement à mesure que les derniers retardataires arrivent. Autour de grandes tables blanches, les chaises se remplissent, côtoient des mannequins couture muets.
C’est avec le sourire que Célia Guillet, enseignante de l’atelier costumes, lance les opérations. « Nous continuons la création de notre chausson. Inscrivez-vous sur la liste, je viendrai vous voir au fur et à mesure », ajoute-t-elle. La formation ne néglige aucune partie du costume de spectacle en direct. « Les chaussures font partie de la tenue vestimentaire standard de scène, explique le professeur.
Après un bref moment d’hésitation, le - de remettre la main sur la pince perforatrice ou de retirer les morceaux épars de votre patron, le clic ronronnant des machines à coudre s’active entre deux sifflements du fer à vapeur. Nez penchés sur des moules de pieds en bois, visages concentrés. Pas de Charentaise en vue, mais découpes nettes ou fantaisie inspiré des lignes de chaussures iconiques : doubles boucles, bébés, escarpins, richelieus…
Production design, spécialité lycée
En France, seul sept lycéesproposer une formation de costumière. Ils ont chacun leur spécialité. « Au lycée Paul-Poiret à Paris, ils mettront l’accent sur les techniques de confection de costumes historiques. A Lyon, ils sont spécialisés dans le travail des formes, des couleurs, des matières… Ici, nous sommes spécialisés dans conception de réalisation . Les étudiants passent beaucoup de - sur les modèles. »
Cours de culture de l’art, de la philosophie et des sciences humainesterminer la formation. « Si on veut créer, il faut nécessairement s’inspirer de ce qui a déjà été fait », convient Astrid, 18 ans, fille d’un metteur en scène et d’un marionnettiste.
Eulalie, 18 ans, petite-fille d’un cordonnier et d’une couturière, a passé son enfance à dénicher des trouvailles dans les placards familiaux. « Il y avait souvent des choses qui disparaissaient », se souvient-elle en riant. Le costume estl’élément qui donne vie à un spectacle. C’est une manière beaucoup plus libre de s’exprimer à travers les vêtements que la mode, qui est un environnement plus strict et hiérarchisé.
« Se fondre dans n’importe quelle situation »
Dans les coulisses, les costumiers doivent avoir de grandes compétences en matière de conception. ‘adaptabilitéexplique le professeur. « Il faut savoir se fondre dans toutes les situations, trouver des idées, des astuces, être capable de trouver des matières inattendues. Il y a un tout travail d’analyse de personnagesnous allons chercher le petit détail qui nous permettra de lui mettre un costume. Et puis, il faut être passionné, aimer le théâtre. C’est un travail où on ne compte pas ses heures.
Eulalie en a déjà fait l’expérience lors d’un stage dans une petite compagnie de théâtre. « Souvent, les délais de retouche d’un costume sont très courts. Il faut trouver la bonne idée qui permettra au costume d’être prêt à être utilisé le lendemain. »
Des profils variés et passionnés
Issus de baccalauréats généraux, professionnels ou titulaires d’un diplôme de technicien du spectacle (DTMS), les profils de ces futurs costumiers sont variés. Ils restent cependant jeunes (moins de cinq ans après le baccalauréat) et sont en grande majorité des femmes. « Il n’y a aucun prérequis de connaissances. Ici, ils apprennent tout depuis le début: couture, dessin, bases philosophiques… En deuxième année, ils approfondiront les matières, les volumes, et créeront des costumes pour une entreprise partenaire. La dernière année est consacrée à l’élaboration d’un projet de mémoire plus personnel », explique l’enseignant.
Si certains sont plus avancés que d’autres en arrivant dans DNMADE, tout le monde a déjà « bricolé ». « Par exemple, nous avons des étudiants qui viennent du Cosplay, illustre Célia Guillet. En quelques mois, les premières années ont déjà un niveau honorable en couture. « On a vu l’assemblage, le surjet, le plaquage, comment enchevêtrer les tissus dans différents sens », illustre l’enseignante.
Issue d’un milieu généraliste, Valentine n’avait jamais utilisé de machine à coudre industrielle avant de débuter l’année. Loin de s’en soucier, c’est avec beaucoup d’ambition qu’elle crée un babouche très graphique, aux multiples découpes ajourées. « J’aime les cours d’arts appliqués, le stage de dessin, l’étude du corps, la réflexion sur le rôle du vêtement », dit-elle en retournant sa coquille de tissu. Comme elle, les étudiants sont souvent passionné par un aspect du divertissement ou du cinéma .
Olivia, 18 ans, sait qu’elle veut faire ce métier depuis qu’elle a rencontré des interviews avec Le costumier de Tim Burton. « Il y a toute une recherche sur le personnage. Ce métier rassemble tous mes intérêts : histoire, création, imaginaire, art… » explique-t-elle, sa chaussure rouge/bleue inspirée des années 30 à la main.
Mia s’intéresse particulièrement à la conception et à la production pour le grand écran. « C’est un travail plus précis qu’au théâtre, car la caméra va zoomer sur les détails. Mais je me verrais aussi dans le monde du cirque.
«Nous recevons 700 candidatures pour 15 places»
Pour accéder à la formation, la sélection est rude. « Nous recevons 700 candidatures pour 15 places dans les costumes DNMADE. Parcoursup en sélectionne 300, puis l’équipe pédagogique choisit les candidats retenus dans leur dossier. C’est drastique, mais c’est proportionnel aux possibilités d’opportunités dans le monde professionnel », explique la directrice, Muriel Guigo-Crenn.
Et ceux-ci ne sont pas infinis. « Dans toutes ces carrières, il y aura aussi emplois alimentaires comme travailler pour Disneyland par exemple », explique-t-elle. La profession exerce principalement sur des contrats de courte durée. Si certains décrochent une place dans une grande maison comme l’Opéra de Paris ou à la Comédie Française, la plupart deviennent spectacleset réaliser des missions d’une entreprise à une autre. « C’est moins stable, mais ils sont plus libres dans leur activité que dans une grande entreprise où les rôles sont très hiérarchisés », explique Célia Guillet.
« Un petit environnement »
L’établissement, qui propose différentes formations professionnelles en métiers des arts, du spectacle et de la création textilecherche à créer des liens entre les disciplines. Ainsi les étudiants en DNMADE « matières » (broderie, tissage, objets) ont préparé avec le « costume de première année » une exposition sur le thème des mondes, exposée lors du Salon Créations et Savoir faire 2024 à la Porte de Versailles. « Cette formation leur donnera un bon réseau. L’art textile estun petit environnementdans lequel on retrouve de nombreux anciens élèves de La Source. Ils sont rapidement repérés. »
Après leurs trois années en DNMADE, certains poursuivront leurs études vers un bac+5, d’autres entreront directement dans la filière professionnelle. « La chance qu’on a à Paris, c’est que nous ne manquons pas de salles de cinéma, sourit le proviseur.
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