Au cours des quinze derniers mois, entre 67 et 79 patients sont décédés en attendant une opération du cœur, faute de perfusionnistes pour réaliser une opération, selon des médecins spécialistes. Ils réclament une meilleure rémunération pour leurs collègues pour éviter d’aggraver la pénurie.
« Quand j’ai eu les chiffres, ça a été un choc. Dans un pays occidental avancé, cela n’est pas acceptable », déclare le Dr Louis Perrault, président de l’Association des chirurgiens cardiovasculaires et thoraciques du Québec, en entrevue avec notre Bureau parlementaire.
Son association a procédé à ce bilan après avoir eu connaissance d’une dizaine de décès liés à un seul établissement.
En 2019, les médecins spécialistes avaient déjà tiré la sonnette d’alarme après une dizaine de décès en quatre mois, là encore par manque de personnel. Auparavant, ces décès étaient rares, selon leur fédération.
Toutefois, des chirurgiens et des salles d’opération sont disponibles, assure le Dr Perrault. Mais les interventions chirurgicales ne peuvent se dérouler sans perfusionnistes, car ils sont essentiels au fonctionnement de la machine « cœur-poumon » qui maintient le patient en vie pendant l’opération.
A ses côtés, le Dr Bernard Cantin, président de l’Association des cardiologues du Québec, juge « scandaleux » de voir le système de santé échapper à des patients placés sur une liste d’attente.
Ceux-ci peuvent souffrir par exemple de vaisseaux sanguins obstrués ou d’une sténose aortique. Parfois, il suffit d’un effort physique « excessif » pour que la mort survienne.
Sans compter que les patients voient leur situation se dégrader après un trop long délai, ajoute le Dr Cantine.
Leur sortie est survenue le même jour que celle du président de leur fédération, la FMSQ. En pleine négociation pour renouveler l’accord-cadre pour les médecins spécialistes, le Dr Vincent Oliva a dénoncé hier les conséquences de la lutte contre le déficit de 1,5 milliard de dollars du réseau de la santé.
Pénurie
Avec 70 perfusionnistes au Québec actuellement, il en manque une vingtaine pour répondre aux besoins.
Le président de l’Association des perfusionnistes cliniques du Québec compare la situation à un « panier qui fuit ». Le Québec a augmenté le nombre d’inscriptions universitaires, « mais on en perd de plus en plus », explique Yannick Pinard.
Au cours des dernières années, huit de ses membres ont quitté la province pour l’Ontario ou les États-Unis et 27 étudiants ou perfusionnistes actifs ont abandonné la profession.
Parmi ceux qui restent, 25 ont plus de 50 ans et se dirigent donc lentement vers la retraite.
Un jeune sortant de l’école obtiendra un taux horaire de 27,46 $ au Québec, comparativement à un salaire variant de 42 $ à 65 $, selon les régions, en Ontario.
Meilleur salaire
Afin de ralentir l’exode, les perfusionnistes réclament un taux horaire de 51 $ à l’entrée, en plus d’une meilleure progression salariale.
Au cabinet du ministre de la Santé, on se dit « très préoccupé par les listes d’attente chirurgicales » et on promet d’examiner « les données du syndicat des chirurgiens cardiovasculaires ».
L’attaché de presse du ministre Christian Dubé rappelle toutefois le contexte des négociations et invite les médecins spécialistes « à discuter du renouvellement de l’entente-cadre à la table de négociation ».
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