Une adaptation réussie du livre
Adapter un roman à succès au cinéma n’est jamais facile. D’autant plus lorsque l’histoire s’étend sur plusieurs années. Ici, les fans du livre vendu à plus de 400 000 exemplaires seront enchantés. Si Nicolas Mathieu n’a pas participé au scénario, les frères Boukherma, signataires de l’adaptation, ont repris l’histoire de manière quasiment identique pour réunir le tout harmonieusement en 2 heures et 16 minutes.
On suit ensuite Anthony, en quatre périodes de ses 14 à 20 ans, et son coup de foudre pour Stéphanie, une fille un peu plus âgée et d’une autre classe sociale. Dans une Lorraine post-industrielle là où les hauts fourneaux ne brûlent plus, on entre dans l’intimité de familles où des pères désillusionnés ont perdu l’œuvre de leur vie et où des jeunes, brûlants de désir, se cherchent entre désirs d’ailleurs et déterminisme social.
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Lorraine, un personnage à part entière
Dès les premières scènes, les Lorrains n’auront aucune difficulté à reconnaître le lac Pierre-Percée, bordé de forêt et filmé sous sa plus belle forme, en été. Un instant plus tard, l’imposante structure du haut fourneau d’Hayange emboîte le pas. Car c’est ici, parmi les quartiers populaires et les quartiers HLM du nord Lorraine, que commence l’intrigue.
C’est l’une des grandes réussites du projet : le film a été tourné entièrement en Lorraine, sur 55 jours à l’été 2023, avec la participation de 2 000 figurants locaux. La Vallée de Fensch, Joeuf, Yutz, le Snowhall d’Amnéville et une villa d’architecte à Épinal ont servi de lieux de tournage. Si le contexte social, dans un contexte de chômage, d’alcool et de drogue, est sombre, la photographie très esthétique et lumineuse rend clairement hommage à la région.
C’est également en Lorraine, et plus précisément à Épinal où a grandi Nicolas Mathieu, qu’est actuellement en tournage l’adaptation d’un autre de ses romans, « Connemara ». Mélanie Thierry, Bastien Bouillon et Jacques Gamblin font partie du casting sous la direction deAlex Lutz.
Gilles Lellouche et Paul Kircher : des acteurs très convaincants
Dès la sortie du livre en 2018, Gilles Lellouche demande à Nicolas Mathieu d’adapter son roman. Il devra finalement abandonner, trop occupé par un autre (gros) projet : « L’Amour Ouf ». Mais il n’abandonnera pas complètement le navire puisqu’il incarne Patrick, le père alcoolique d’Anthony. Il fait irruption à l’écran dans le rôle sombre d’un homme qui perd peu à peu tout ce qui lui était cher, jusqu’à la blessure la plus intime et la plus profonde : le respect de son fils.
L’autre belle performance est due à l’acteur principal, le jeune Paul Kircher, jeune espoir du cinéma français. Nominé deux fois aux César Le lycéen (2022) et Le règne animal (2023), il se confond avec le personnage touchant et mélancolique d’Anthony, sortant de l’ennui dès qu’il croise le regard de Steph, un amour destiné à lui échapper. Pour ce rôle, Paul Kircher a reçu le prix de l’acteur le plus prometteur à la Mostra de Venise.
Le casting est complété par Ludivine Sagnier, la jeune Angelina Woreth et Sayyid El Alami, ainsi que Raphaël Quenard.
Une bande-son de qualité
Quiconque l’a lu sait que la musique joue un rôle essentiel chez Nicolas Mathieu. Dans son Goncourt, chaque période porte le titre d’une chanson de l’époque, qui se termine sur “Je survivrai” en 1998. Le film est resté fidèle à cet esprit en puisant autant que possible dans les mêmes références. Sauf pour ” Sent comme de l’alcool d’ados “ par Nirvana en 1992, dont les droits étaient trop chers…
Difficile de retenir les émotions lors du tournage au bord du lac, un soir du 14 juillet 1996, accompagné de la voix fascinante de Francis Cabrel dans « Samedi soir sur Terre ».
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Souvenirs des années 90
Avec le film, c’est toute une série de souvenirs qui rappelleront aux spectateurs l’âge d’Anthony, 12 ans dans le film de 1992, ou encore simplement de Nicolas Mathieu, né en 1978. Les albums Panini, les jeux vidéo de l’époque, les 400 shots entre amis pour chasser l’ennui à l’époque où les téléphones portables n’existaient pas, les feux d’artifice, la demi-finale France-Croatie et le doublé de Lilian Thuram au 1998…
Dans cette France rurale au moment des premiers amours, tous les plus de 30 ans auront forcément un petit pincement au cœur en plongeant avec nostalgie dans les souvenirs d’enfance.
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