La Première Guerre mondiale a généré des changements sociaux et culturels qui ont provoqué des bouleversements importants au Québec, particulièrement chez les Québécoises. Leur implication dans l’effort de guerre puis l’obtention du droit de vote au niveau fédéral en 1918 leur permettent d’acquérir un peu d’autonomie et surtout de rêver à de nouvelles libertés.
C’est dans ce contexte que beaucoup, largement influencés par les Américaines, profitent de ce vent de changement pour transgresser les codes sociaux. Ces années 1920, que l’on appelait les « années folles », furent entre autres une formidable période d’émancipation de la femme, marquée par l’émergence d’un nouveau style androgyne que l’on appelle encore aujourd’hui la mode « boyish ». « .
LES PREMIERS INFLUENCEURS
Au début du 20e siècle, les magazines et les journaux présentent de plus en plus de stars féminines aux silhouettes élancées. Des femmes aux poitrines discrètes, aux hanches plutôt étroites et aux longues jambes nues. C’est le début des publicités dans les magazines destinés aux femmes, publications dans lesquelles les femmes se voient présenter tout un arsenal de corsets, de gaines ou de recettes pour réussir à atteindre ces nouveaux standards de la mode.
Le style des années 20 suggère également que les femmes se coupent les cheveux près des oreilles. Une mode capillaire popularisée, entre autres, dans des livres comme le célèbre roman de l’auteur français Victor Margueritte, Le clapet, mais aussi mis en valeur par des films comme Jeunesse enflamméeou encore des stars comme Louise Brooks, Joséphine Baker, Coco Chanel et même des personnages de la culture populaire comme Betty Boop.
Ce style que les anglophones appellent « flappers » est devenu très à la mode dans les années 1920. Pour ces femmes, cela regarder dans le clapet, c’est bien plus qu’une mode, c’est une posture sociale, une affirmation de la femme audacieuse et insouciante qui n’hésite pas à se confronter aux dogmes conservateurs de son époque.
Joséphine Baker, chanteuse et danseuse. Dans les années 1920, elle représentait extrêmement bien la mode garçonne.
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ILS ATTERRISSENT AU CENTRE-VILLE
Après la Grande Guerre, la majorité des Québécois vivaient en ville. Le centre-ville de Montréal se transforme en paradis du plaisir et de la consommation, notamment sur la rue Sainte-Catherine et le boulevard Saint-Laurent. Les femmes s’y rendent pour découvrir les nouvelles cathédrales du shopping (Dupuis Frères, Eaton…), pour sortir au cinéma ou pour profiter des spectacles, cocktail à la main et cigarette aux lèvres, dans les cabarets. Ils dansent le tango, le foxtrot ou le charleston. Ils sont bronzés, maquillés, portent des bijoux. Certains osent même porter des pantalons. Evidemment, ces extravagances choquent le clergé catholique, qui voit d’un mauvais oeil que ces femmes s’éloignent de leur mission divine, celle d’être des épouses modèles mises sur terre uniquement pour procréer. Les évêques n’hésitent pas à publier des avis moraux pour condamner ces femmes, et les prêtres, depuis la chaire le dimanche, exhortent les parents à mettre en garde leurs filles contre les vices du centre-ville.
« Le stagisme est une maladie à la mode. Tous n’en meurent pas, mais beaucoup en sont frappés… »
Abbé Philippe Perrier, en 1926
Malgré d’abondantes critiques, cette mode des clapets s’est répandue au Québec au cours des années folles. Ce mouvement de transformation par le style s’est produit en même temps que naissaient de nombreuses organisations féministes. C’est l’époque où de plus en plus de femmes remettent publiquement en question leurs droits fondamentaux, plus précisément le droit de vote, mais aussi l’accès aux universités.
En fait, la volonté des femmes de ne plus s’habiller comme leurs grands-mères démontre certainement leur désir d’émancipation. Paradoxalement, cette nouvelle mode rendra difficile aux femmes le contrôle de leur poids, les amènera à dépenser des sommes colossales pour modifier leur silhouette et les obligera à réinventer la garde-robe de leur mère.
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