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Ali Amran, un artiste kabyle doublement engagé sur les traces d’Idir

Voix grave, Ali Amran ne cesse de captiver son public. Auteur, compositeur et interprète, cet artiste autodidacte a gagné ses galons en donnant à la chanson kabyle une touche de modernité sans la dépouiller de son ADN.

Ses compositions sont teintées de pop, de rock, de folk, mais gardent leur âme kabyle et maghrébine grâce à l’harmonisation. Une démarche chère au cœur de cet artiste aux mille talents.

Un spécialiste de l’harmonisation

Il est sans doute le chanteur kabyle qui suit la voie tracée par Idir qui est celle de moderniser la musique kabyle sans lui faire perdre son âme.

Ali Amran partage son temps entre la et la Finlande où vit sa petite famille. Il anime régulièrement des concerts. “ L’été dernier, j’ai fait une tournée en Amérique du Nord. J’ai rencontré la diaspora algérienne au Canada et aux États-Unis. Ce sont toujours des moments intenses en émotion », confie Ali Amran à TSA.

Pour devenir chanteur, personne n’aurait parié dix dinars pour un tel destin. La guitare fait irruption dans la vie d’Ali Amran qui pousse son premier cri le 20 mai 1969, sous le nom d’Ali Koulougli, à Igariden, commune de Maâtkas, dans les montagnes de Kabylie.

Enfant, Ali était bercé par les chants traditionnels kabyles. Adolescent, il bricolait une guitare de fortune avec un bidon d’huile et chantait avec ses amis.

Influencé par les Beatles, Dire Straits…

La vie d’Ali Amran (Amran est le prénom de son grand-père) a basculé au lycée Amirouche de Tizi-Ouzou. “ C’est à cette époque que j’ai découvert la musique occidentale. J’ai adoré les Beatles. J’ai eu la chance d’avoir une partition de chansons de ce groupe que je me suis amusé à reprendre ! ‘Can’t buy me love’, ‘Yesterday’, ‘Let it be’… Parallèlement, j’écoutais Cat Stevens, Simon and Garfunkel, Dire Straits, U2, Pink Floyd… Tous ces groupes m’ont profondément influencé et inspiré et influencé. Mes cassettes comprenaient aussi Idir, Aït Menguellet, les Abranis… », dit-il.

L’étudiant obtient son baccalauréat en mathématiques et s’inscrit à l’université pour une formation en génie civil. “ J’ai vite jeté l’éponge, car ces études ne m’intéressaient pas », admet-il.

L’année suivante, l’Université de Tizi-Ouzou ouvre le département de langue anglaise. Ali Amran saute sur l’occasion : « Je me suis inscrit à un diplôme d’anglais en 1989 ».

Parallèlement à ses études, Ali Amran monte sur scène dès que l’occasion se présente. «J’ai accompagné musicalement la troupe de théâtre Meghres », se souvient-il. Et de poursuivre : « En 1994, j’ai enregistré une première cassette dont l’un des titres était Adu (le vent), qui a été classée dans les charts de l’émission Local Rock de la radio nationale Channel III. »

Son diplôme en poche, Ali Amran a enseigné pendant quelques mois la langue de Shakespeare dans un lycée de Maâtkas, sa ville natale. Il enregistre un album « Amsebrid » (Le Routard) en 1998.

« Durant cette période, j’ai chanté à la maison de la culture de Tizi-Ouzou, au théâtre régional de Béjaïa, et dans plusieurs festivals ».

Le chanteur en herbe a repris ses études en s’inscrivant à une thèse sur la civilisation berbère à l’université de Tizi-Ouzou. ” Je n’ai pas terminé ce projet. L’appel de la musique était le plus fort. J’ai dû chercher ailleurs et essayer de trouver mon chemin », confie-t-il.

Un artiste doublement engagé

En 2000, Ali Amran prend la direction de Paris. Il s’installe en France puis en Finlande. “ Je faisais constamment des allers-retours entre ces deux pays. J’ai fondé ma famille en Finlande. Je suis l’heureux père de deux garçons âgés de 19 et 21 ans. ».

Solo ou accompagné d’autres musiciens, l’artiste se produit dans les cafés-concerts et dans les salles communautaires. En 2007, il anime la première partie du concert d’Idir au Zénith de Paris.

Ali Amran compose sa propre musique et écrit ses propres paroles. Son style musical prend ses racines dans sa Kabylie natale, mais s’enrichit du rythme de la musique occidentale. Le succès continue et le cercle de ses fans s’agrandit tant en Algérie qu’à l’étranger.

Dans son cinquième album sorti en novembre 2023, Ali Amrane revisite les chansons de Cheikh El Hasnaoui en y mettant sa touche personnelle.

« El Hasnaoui est à mes yeux le fondateur de la chanson kabyle contemporaine. Dans cet opus, j’ai conservé l’âme des chansons de ce pionnier en y introduisant la musique harmonique occidentale. Cet héritage nous vient de très très loin. Il est important de le préserver. J’applique cette approche à toutes mes reprises du répertoire kabyle », explique-t-il.

Ali Amran ambitionne de publier une brochure sur la base de l’harmonisation. Il prépare également de nouvelles chansons. “ Certains mijotent, d’autres seront bientôt enregistrés », nous dit-il.

Quant à l’avenir de la chanson kabyle, l’interprète de « Tabalizt » pense qu’il y a un grand potentiel parmi la jeune génération, mais que le côté créatif fait défaut. “ Je vois beaucoup de jeunes qui ont de belles voix, mais ce qui manque, c’est de la profondeur dans les paroles. Il faut travailler davantage ! », conseille-t-il.

En puisant sa sève dans la musique traditionnelle kabyle ancienne qu’il arrose de sonorités pop rock et folk, Ali Amran a trouvé la bonne recette pour séduire un public multigénérationnel. Ses textes très inspirants parlent d’exil, d’espoir, d’identité, de condition des femmes, de politique…

Artiste doublement engagé dans la défense de la culture berbère et la modernisation de la musique kabyle, Ali Amran est une valeur sûre qui laissera sans doute son empreinte dans les registres de la chanson algérienne.

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