La Halle Tony-Garnier de Lyon possède-t-elle des pouvoirs surnaturels ? Le public du Festival Lumière envoie-t-il des énergies particulières aux artistes du cinéma ? On pourrait le croire, tant il se passe quelque chose d’unique dans ce festival pas comme les autres, qui fête cette année son quinzième anniversaire. En 2023, la cérémonie d’ouverture vibrait devant un Fabrice Luchini très enjoué.
Le mois dernier à Le pointà l’occasion de la sortie de Jus de Beetle Jus de Beetleson premier film après six ans sans tournage, le cinéaste américain Tim Burton a évoqué sa venue au festival en 2022 : « L’accueil du public m’a bouleversé. J’en ai pleuré. A Lyon, j’ai vécu quelque chose que je n’avais jamais vécu de toute ma vie. C’était à la fois beau, effrayant, choquant et inspirant. Cela m’a vraiment aidée à renouer avec l’amour de mon travail que j’avais perdu.. »
Expositions : Carla Bruni au Borghèse
Ni palmarès ni tapis rouge.
Le succès de ce festival organisé par l’Institut Lumière, dirigé par Thierry Frémaux, défie en effet tous ceux qui prédisaient le déclin des cinémas au profit de plateformes comme Netflix. Le public s’accroupirait-il sur son canapé, ignorerait-il les vieux films, attendrait-il des paillettes, exigerait-il des concours ? Il ne faut pas le croire : l’an dernier, près de 166 000 spectateurs (129 000 billets délivrés et 37 000 lors de rendez-vous, expositions, etc.) se sont rassemblés à la Cité des Gones pour ce festival de cinéma qui ne présente ni palmarès ni tapis rouge et se concentre sur le bel équilibre des sa vaste programmation, à la fois classique et moderne : «Chaque fois qu’on essaie de changer de formule, on revient à celle-là parce qu’elle fonctionne tellement bien, constate Maelle Arnaud, la directrice de la programmation. C’est un succès public et populaire car, si on a un public de cinéphiles toute l’année, on voit bien qu’au moment du festival la fête est beaucoup plus large et collective : les Lyonnais, mais aussi un public qui vient du la France entière, s’est approprié l’événement et, du coup, l’idée de l’histoire du cinéma n’est plus réservée qu’à « ceux qui savent » : c’est un festival pour tous.»
A Lumière, chacun compose sa programmation à partir d’un savant mélange de films de patrimoine, présentés par des critiques et artistes passionnés, et de rétrospectives ambitieuses. Nous explorons les cinématographies du monde entier et assistons à des rencontres avec des cinéastes enfin détendus : hors du circuit de promotion d’un film, ils viennent parler de cinéma sans pression. “Tous les invités d’honneur sont ravis de venir car on ne leur demande pas souvent de venir parler cinéma au sens large, poursuit Maëlle Arnaud. Vanessa Paradis, par exemple, m’a confié qu’elle avait hâte de faire la première master class de sa carrière sur son travail d’actrice… Non seulement elle a accepté, mais elle était très intéressée par l’esprit du festival et souhaite également pour aller écouter les autres présentations. »
Prix Tech for Future 2024 : Libu, la lumière qui améliore la vie des travailleurs aux horaires irréguliers
L’actrice donnera sa conférence aujourd’hui (11h) et présentera ses films, tout comme Vincent Lindon, Benicio Del Toro, Xavier Dolan, Costa-Gavras… Des cinéastes comme Claude Lelouch, Jacques Audiard et François Ozon seront également là. En partie, Justine Triet donnera une master class autour de sa propre cinéphilie, en parlant des films qui l’ont marquée. “Nous voulons être le festival de tous les cinémas, insiste Maëlle Arnaud. Cette année, notre grande rétrospective est consacrée à Fred Zinnemann, dont les films sont totalement mainstream (Tant qu’il y aura des hommes, Le train sifflera trois fois…) mais dont le nom n’est pas : c’est un défi pour nous d’en faire un des hits du festival et c’est une réussite folle : on s’arrache les billets . »
Le festival présentera également le travail de la cinéaste espagnole Icíar Bollaín et son cinéma engagé et constructif. Nous replongerons lors d’une « Nuit Jodorowsky » dans l’univers délirant du cinéaste franco-chilien, on découvrira quelques avant-premières, on fêtera les 30 ans deReine Margoten présence de Jean-Hugues Anglade et nous (re)verrons les films de Delon, Huppert, Paradis, Hazanavicius et autres classiques incontournables… Enfin, le fameux prix Lumière, sorte de « Prix Nobel pouridiot» pour l’ensemble de sa carrière, sera décerné cette année à Isabelle Huppert. « Sa carrière s’étend sur tous les continents, elle a travaillé avec des réalisateurs français, coréens, américains et hongrois, avec de grands noms du cinéma comme avec des premiers films, elle va du drame à la comédie... conclut Maëlle Arnaud. Elle semble incarner l’actrice absolue. » De quoi nous faire courir dans des salles obscures.
Jusqu’au dimanche 20 octobre.
Related News :