Tout comme James Norman Hall dont il fut l’ami, Robert Dean Frisbie (1896-1948) arriva à Tahiti après la Grande Guerre. Comme Robert Louis Stevenson, il avait les poumons fragiles et poursuivait un rêve de soleil, de paix, de solitude et de littérature. Après quelques années à Tahiti (Un âge d’or, 1937), il se retrouve à Pukapuka, un atoll au nord des Îles Cook, seul Blanc parmi les Polynésiens (Une vie à Pukapuka, 1929). Il a écrit «Île du désir” dont la deuxième partie a déjà été publiée sous le titre «Suwarrow, ouragan sur l’atoll » par ‘Ura éditions. Il est vrai que dans cette véritable aventure, il se comporte de manière assez héroïque, pour sauver ses quatre enfants du désastre.
“Mais en fait, Ropati est plutôt un anti-héros», estime Henri Theureau le traducteur. Son but dans la vie est d’écrire le grand roman américain. Il rêve d’être un peu le nouveau Melville. Mais avant cela, il a un projet qu’il poursuivra toute sa vie sans jamais s’en rendre compte, celui de construire un petit voilier qui lui permettrait de voyager d’île en île, seul, et d’avoir la tranquillité d’écrire.
Après un séjour à Papeari au début des années 1920, il arrive à Pukapuka vers 1925 où il est le seul Blanc et gérant du seul magasin de l’île. Il y écrit des scènes de la vie insulaire qui seront publiées dans des magazines américains, et qui finiront par être publiées : d’abord «Le livre de Pukapuka »Alors “Île du désir ». Tous ses textes, y compris ses souvenirs de Tahiti, »Mon Tahiti», sont en fait autobiographiques et il n’écrira jamais son grand roman américain, malgré quelques tentatives infructueuses, qui seront aussi plus ou moins autobiographiques.
« Il reste en quelque sorte un héros dans la façon dont il embrasse la vie insulaire..» Très doué pour les langues, il apprend le tahitien en moins d’un an, puis Rarotonga et Pukapuka au passage. “Il lutte contre sa solitude culturelle en lisant avec voracité et en écrivant sans cesse..»
Il participe pleinement à la vie de la communauté insulaire, dont son magasin, mal approvisionné (deux à trois « goélettes » par an), est l’un des piliers fragiles. Il construit sa maison, épouse officiellement ‘Inangaro. Il pêche, plonge, ramasse des œufs d’oiseaux marins »,sans vouloir ‘devenir fou’ comme on disait élégamment à l’époque, c’est à dire devenir polynésien.»
“Il y a donc tout bien considéré, malgré son côté « beachcomber », son penchant pour la bouteille et son tabagisme permanent, quelque chose d’héroïque chez ce Frisbie, dans son obstination à poursuivre deux rêves jamais réalisés..» Son témoignage sur la vie d’une communauté humaine »dans des conditions d’une dureté qu’on ne peut imaginer, car les îles sont pour nous des fantasmes avant d’être des réalités» reste précieux.
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