La procédure est désormais courante : pour la promotion des films, plutôt que de véritables interviews, on organise de courts « junkets » avec les stars. Hier, au Festival international du film de Saint-Sébastien, douze journalistes se sont rebellés.
Par Samuel Douhaire
Publié le 25 septembre 2024 à 15h00
LLa presse cinématographique se rebelle. Mardi 24 septembre, douze journalistes internationaux accrédités au Festival de San Sebastian en Espagne ont collectivement décidé de refuser d’interviewer Johnny Depp après la projection en compétition du film Modi, un film biographique sur le peintre Amedeo Modigliani qu’il a réalisé. La raison ? Les conditions fluctuantes et, finalement, inacceptables de la rencontre prévue avec la star américaine.
Comme dit à Variété L’un des douze hommes et femmes en colère, le pigiste italien Marco Consoli, les attachés de presse du film avaient organisé deux tables rondes (ou « junkets ») de quinze minutes au cours desquelles deux groupes de six journalistes avaient été autorisés à poser leurs questions à Johnny Depp entouré de ses acteurs principaux, Riccardo Scamarcio et Antonia Desplat. Une pratique pas franchement idéale (chaque journaliste, dans ces conditions, ne peut poser que deux ou trois questions, et le risque est que les trois interviewés finissent par discuter entre eux plutôt que de vraiment répondre à leurs interlocuteurs), mais hélas devenue monnaie courante, surtout si les enjeux commerciaux sont élevés. Faute de mieux, les journalistes avaient accepté ce marché qui ressemblait à une aumône. Mais c’était sans compter sur le manque de ponctualité de Johnny Depp, malheureusement habituel. Faute de temps, les « publicistes » avaient alors proposé un seul « junket » avec le trio de « talents » pendant vingt minutes. Les douze journalistes, déjà assez agacés, ont demandé à pouvoir interviewer Johnny Depp en tête-à-tête. Après un nouveau refus, ils ont décidé de boycotter le voyage et même de ne pas écrire sur le film.
Informations en danger
Ce coup de gueule salutaire va-t-il inciter les équipes marketing des studios hollywoodiens à changer leur politique promotionnelle ? Il était temps… Lors de la dernière Mostra de Venise, fin août, une cinquantaine de critiques de la presse internationale avaient déjà publié une lettre ouverte pour alerter sur le fait que, de Nicole Kidman à Brad Pitt en passant par Angelina Jolie, « presque toutes les têtes d’affiche » La couverture de cette édition s’est limitée à des photos sur le tapis rouge et à des conférences de presse officielles, sans accorder une seule interview, un procédé « choquant et profondément dérangeant » OMS « [met] « L’information et les échanges autour du cinéma sont en danger »Une protestation qui, selon les signataires du texte (rejoints depuis par une cinquantaine de collègues), « ne fait que commencer. » Avec cet avertissement : « Bientôt, des centaines de journalistes et de médias pourraient boycotter les films et les artistes en refusant l’accès aux interviews dans les festivals. »
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