Emmanuelle, la révélation d'un phénomène de société

Sylvia Kristel et Just Jaeckin nous ont quittés il y a plusieurs années, mais leurs noms restent présents dans la mémoire collective, liés au triomphe deEmmanuelleen 1974. Elle fut si forte que leurs retrouvailles sur un plateau en 1981, pour le tournage d'une adaptation du roman de D.H. Lawrence, furent finalement oubliées. L'amant de Lady Chatterley.

A cette occasion, ils ont été invités sur le tournage deAntenne 2 midile journal présenté par Daniel Bilalian. Madelen vous propose de découvrir ou redécouvrir cette séquence au cours de laquelle le réalisateur et sa tête d'affiche analysent, sept ans plus tard, ce qui est devenu un véritable phénomène de société. L'arrivée de Valéry Giscard d'Estaing à l'Élysée y est sans doute pour beaucoup. Ses idées résolument libérales ont conduit le ministère de la Culture à transformer la décision de censure du long métrage, huit jours avant sa sortie en salles, en interdiction pour les moins de 18 ans. « Les images étaient très pures, sensuelles » explique Just Jaeckin sur Antenne 2, face à son interprète, un peu gêné d'admettre que ce rôle l'a rendue heureuse et son malheur.

Confinée à incarner des personnages érotiques, alors qu'elle rêve de comédies, elle est, peu à peu, tombée de son piédestal. A-t-elle regretté d'avoir accepté Emmanuelle ?. Elle n'en a jamais parlé. Elle a préféré limiter ses confidences au souvenir de cet après-midi où elle était entrée par erreur dans la salle où Just Jackin faisait passer des auditions pour y trouver une femme asiatique ressemblant à celle décrite dans le livre d'Emmanuelle Arsan. « Je suis venu pour un casting pour une publicité pour un produit pour lave-linge et je me suis trompé de porte » Sylvia Kristel a toujours expliqué.

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Dès qu’il a vu son visage, Just Jaeckin a su qu’il avait trouvé sa tête d’affiche. Il a alors fallu convaincre le producteur, Yves Rousset-Rouard, qui, après un long moment de réflexion, lui a finalement donné son feu vert. Il n’est pas étranger à la prise de risque ! À 32 ans, il décide de quitter le monde de la publicité, où il s’ennuie, pour s’essayer au 7e art. Disposant de moyens particulièrement modestes, il commence par chercher une idée qui lui permettrait d’essayer de gagner beaucoup d’argent tout en dépensant un minimum. Sentant l’air du temps, il s’interroge sur le succès inattendu du film de Bernardo Bertolucci Le dernier tango à Paris. Convaincu que le côté sulfureux de l'histoire est en grande partie responsable de l'engouement du public, il décide de surfer sur cette vague naissante et casse sa tirelire pour acheter les droits d'adaptation à l'écran de ce qui lui semble le sujet idéal, c'est-à-dire Emmanuelle.

Soucieux de donner autant d'importance à l'esthétique qu'à l'érotisme, il pense immédiatement à confier la mise en scène à Just Jaeckin. Il connaît son talent de photographe de mode et a remarqué le soin qu'il apporte à l'image et à la lumière dans la réalisation des reportages diffusés dans l'émission de télévision de Daisy de Galard, Dim Dam Dom Il propose de relever le défi, mais voit dans le regard de son interlocuteur une hésitation. Il est très heureux dans son monde et, ne connaissant rien au cinéma, il avait peur de ne pas être à la hauteur de l'aventure. Il changea d'avis en se rappelant que, quelque temps plus tôt, une diseuse de bonne aventure lui avait prédit un énorme succès. Elle ne s'était visiblement pas trompée. Le nombre d'entrées dans le monde a dépassé la barre des 50 millions. Yves Rousset-Rouart doit encore se pincer pour y croire. A la veille de la sortie sur les Champs-Élysées, jugeant l'ensemble trop beau, il était persuadé d'avoir produit son premier et dernier film. Sa seule erreur dans cette aventure.