la guerre du Liban rencontre Antigone

la guerre du Liban rencontre Antigone
la guerre du Liban rencontre Antigone

En matière d’adaptation littéraire pour le cinéma, David Oelhoffen n’en est pas à son coup d’essai. Avant de saisir le Quatrième mur de Sorj Chalandon (Grasset), il revisite l’œuvre d’Albert Camus dans le très beau Loin des hommes. Nous lui devons aussi les derniers hommesinspiré du roman chiens jaunes (Presse de la ville) de l’écrivain et ex-officier militaire Alain Gandy. Ces films ont en commun des territoires en guerre (Liban en 1982, Atlas algérien en 1954 et Indochine en 1945) et conjuguent la petite et la grande histoire en confrontant les Occidentaux à leurs habitants.

Comme dans le roman, lauréat du Goncourt des lycéens en 2013, le cinéaste convoque Georges (Laurent Laffite), militant d’extrême gauche, procrastinateur et ami fidèle du réalisateur Samuel Akounis, un juif hellénique dont la famille a disparu dans les camps d’extermination. Ce dernier, malade, le convainc de mener à bien son projet de création Antigone à Beyrouth en faisant jouer les personnages par des acteurs et actrices issus de toutes les communautés libanaises. Comme dans une sorte de trêve olympique, les deux heures de représentation sur une scène de fortune, située sur la ligne de démarcation, seraient un témoignage fort de la possibilité d’un dialogue. Sur place, Georges devient négociateur et tente de comprendre le conflit. Mais dans ce climat belliqueux et violent qui laisse peu de place à la modération, l’engagement théâtral dépasse le cadre de la scène. C’est aussi celui d’une vie.

les camps de Sabra et Chatila

Avant de devenir un brillant romancier, Sorj Chalandon était aussi un excellent journaliste. Chroniqueur judiciaire du procès Barbie, reporter de guerre au Liban, il a vu et entendu son lot d’horreurs jusqu’à son entrée dans les camps de Sabra et Chatila après les massacres. Son alter ego littéraire et ici cinématographique, Georges, arrive sans doute plus vierge que l’auteur à Beyrouth. Son déni n’est pas moins violent. En essayant d’insuffler du romantisme dans son long métrage, David Oelhoffen en fait un peu trop. Bruitages pour indiquer le trouble du protagoniste dans les moments d’extrême tension, jeu de distanciation de Laurent Laffite, le film devient parfois trop programmatique. Il perd en fluidité ce qu’il gagne en cette esthétique de la distanciation et s’enlise dans un exercice de style.

Heureusement, les acteurs libanais, Manal Issa en tête, redonnent de l’authenticité à cette œuvre qui oscille entre l’envie d’explorer les explosions psychologiques d’un conflit et l’art face à la guerre dans un film qui peine à faire tomber le quatrième mur.

Le Quatrième Mur de David Oelhoffen, 1h56, , Luxembourg, Belgique

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