Dix ans après son inauguration, en janvier 2014, il est difficile d’imaginer Paris sans sa Philharmonie. Avec sa salle modulable de 2 400 à 3 400 places, ses 450 levers de rideaux par an et son taux d’occupation moyen de 92 %, l’auditorium conçu par Jean Nouvel s’est imposé dans le paysage musical de la capitale. Même en remplacement de la salle Pleyel du 8e arrondissement, désormais consacrée à d’autres styles musicaux que classiques.
Pourtant, la construction de ce bâtiment emblématique de l’Est parisien ne s’est pas déroulée sans heurts. A la fin des années 1970, le site de La Villette est abandonné. Avec la création de Rungis, le marché aux bestiaux du 19e arrondissement ferme ses portes. Les autorités décident alors de transformer cette friche industrielle en un grand parc urbain. Parmi les lignes directrices du futur projet figure déjà la construction d’un auditorium dédié à la musique et à la danse.
La création de cette Cité de la musique est confiée à Christian de Portzamparc. L’architecte dessine les plans d’une salle de musique de chambre de 800 places, ainsi que ceux d’une grande salle dédiée à la musique symphonique. Finalement, seul le premier a vu le jour en 1995.
Le deuxième projet fut enterré pendant de nombreuses années, au grand désarroi de ses défenseurs. En 2006, un accord a été trouvé entre la Ville de Paris et l’État. Pour relancer la construction de cet auditorium, la mairie met à disposition un parking de deux hectares.
Le projet est attribué à l’architecte Jean Nouvel l’année suivante. Paris lui doit déjà l’Institut du monde arabe, la Fondation Cartier et le musée du quai-Branly-Jacques-Chirac. Son projet d’auditorium, décrit par certains “anti-Salle Pleyel” avec son orchestre situé au milieu du public, a su convaincre le jury.
Construction interrompue en 2010
Le permis de construire est délivré immédiatement et la date de fin des travaux est fixée en 2012. Mais, alors que tout semble enfin aller pour le mieux pour la future Philharmonie, le ciel s’assombrit à nouveau en 2010. Les travaux s’arrêtent. depuis près d’un an, laissant un grand trou béant à la place de l’ancien parking. En question? L’État, qui ne paie pas sa part.
Le gouvernement s’était toutefois engagé, comme la Mairie de Paris, à financer 45 % du projet. Mais la forte augmentation du budget l’a refroidi. Initialement estimée à 173 millions d’euros, la construction du « Centre Pompidou de la musique » a finalement coûté plus de 500 millions d’euros, selon les estimations de la Cour des comptes.
Malgré ses réticences, l’État a finalement versé les sommes nécessaires à la poursuite du projet, et l’auditorium a été inauguré le 14 janvier 2014, avec deux ans de retard.
Le dérapage budgétaire a cependant alimenté un long conflit juridique entre la Philharmonie et Jean Nouvel, qui a été évincé du projet avant la fin des travaux. Un accord de règlement a finalement été conclu en 2021.