Écrivain, poète et dramaturge, Albert Cohen a toujours entretenu des relations contrastées avec la cité de Calvin. Un collectif d’historiens de l’Université de Genève édite un guide littéraire sous forme de balades pour souligner l’importance de la ville pour l’auteur de «Belle du Seigneur».
Comme le précise l’introduction du guide « Albert Cohen et Genève » (éd. La Baconnière), riche de notices illustrées, de cartes ou de documents inédits et inutilisés à ce jour, Albert Cohen (1895-1981), juif séfarade originaire de Corfou, a connu l’antisémitisme dès l’enfance : d’abord en Grèce où il a été contraint à l’exil avec sa famille après un pogrom, puis à Marseille où un colporteur l’a traité de sale yip.
À l’aube de la Première Guerre mondiale, il s’installe à Genève comme étudiant étranger où il poursuit avec succès des études de droit. Au contact des Juifs russes, il devient un militant sioniste convaincu. Si Genève rejette sa demande de naturalisation, le canton d’Argovie est moins prudent.
Il y a tout un appareil critique, car nous nous sommes basés sur différentes sources. Nous recherchions des choses innovantes et nouvelles.
Il passe l’essentiel de sa vie en Suisse à l’exception de trois parenthèses, d’abord au début des années 1920 à Alexandrie en Egypte, berceau d’une profonde désillusion et d’une dépression qui lui donne l’élan d’écrire, puis à Paris dans les années 1930 où il publie son premier roman « Solal » avec un succès critique éclatant, et enfin à Londres pendant la guerre, où il déploie ses talents de diplomate.
>> A consulter, le dossier RTS Archives dédié à Albert Cohen : Les mots d’Albert Cohen
Vingt-neuf lieux emblématiques
A la mort de l’auteur de « Belle du Seigneur », ouvrage prolifique paru en 1968 et Grand Prix du roman de l’Académie française, La Tribune de Genève titrait : « Le plus grand écrivain genevois depuis Jean Jacques Rousseau continue 17 octobre 1981. Genève ? Vraiment? Pourtant, dans La Pléiade, Genève est à peine évoquée alors même qu’Albert Cohen y a vécu près de cinquante ans. Par ailleurs, aucune trace de postérité n’apparaît dans l’espace public genevois à l’exception d’une modeste rue.
La petite rue Albert Cohen permet de parler de la place qu’elle occupe dans la mémoire collective genevoise, plutôt petite si l’on en croit son apparence.
Il n’en fallait pas plus aux chercheurs de l’Université de Genève pour prouver l’importance de cette ville pour Albert Cohen. Ainsi la déambulation littéraire se concentre sur vingt-neuf lieux emblématiques, rappelant leur histoire mais surtout leur lien avec l’auteur. A la lumière de ce guide, il ne fait plus aucun doute que Genève était un personnage à part entière dans son œuvre et sa vie, bien plus qu’un élément de décor, et ce malgré les relations ambivalentes qu’il a entretenues avec elle de son vivant. .
Philippe Congiusti/sf
« Albert Cohen et Genève », de Pierre-Louis Chantre, Marie-Luce Desgrandchamps, Idit Ezrati Lintz, Thierry Maurice, Bruno Racalbuto, Noémie Sakkal Miville, Yan Schubert, éd. La Baconnière, novembre 2024.
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